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15/07/2004 | FRANCE | N°268728

France | France, Conseil d'État, 2eme et 7eme sous-sections reunies, 15 juillet 2004, 268728


Vu la requête, enregistrée le 16 juin 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour l'ASSOCIATION SPORTIVE DE CANNES, dont le siège est Avenue Pierre Poési, Stade Pierre de X... à Cannes La Bocca (06150), l'UNION SPORTIVE DE RAON L'ETAPE, dont le siège est ... L'Etape (81110), le FOOTBALL CLUB LIBOURNE - SAINT-SEURIN, dont le siège est ... (33503) ; l'ASSOCIATION SPORTIVE DE CANNES et autres demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision du 25 mai 2004 de la Fédération française de football homologuant les résultats du Championnat dit Nat

ional de football pour la saison 2003-2004 ;

2°) d'enjoindre à la Fé...

Vu la requête, enregistrée le 16 juin 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour l'ASSOCIATION SPORTIVE DE CANNES, dont le siège est Avenue Pierre Poési, Stade Pierre de X... à Cannes La Bocca (06150), l'UNION SPORTIVE DE RAON L'ETAPE, dont le siège est ... L'Etape (81110), le FOOTBALL CLUB LIBOURNE - SAINT-SEURIN, dont le siège est ... (33503) ; l'ASSOCIATION SPORTIVE DE CANNES et autres demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision du 25 mai 2004 de la Fédération française de football homologuant les résultats du Championnat dit National de football pour la saison 2003-2004 ;

2°) d'enjoindre à la Fédération française de football d'infliger au Stade brestois la sanction du match perdu pour les trois rencontres disputées contre les clubs requérants les 2, 9 et 13 août 2003 et, en conséquence, de recalculer les points dont bénéficient les clubs ayant participé au Championnat National, puis de procéder à la modification du classement qui en résulte dans un délai de 8 jours, sous astreinte de 500 euros par jour de retard ;

3°) de condamner la Fédération française de football à verser aux exposants la somme de 5 000 euros pour les frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la note en délibéré et la note en délibéré complémentaire présentées le 7 juillet 2004 pour l'ASSOCIATION SPORTIVE DE CANNES, l'UNION SPORTIVE DE RAON L'ETAPE et le FOOTBALL CLUB LIBOURNE - SAINT-SEURIN ;

Vu la loi n° 84-610 du 16 juillet 1984 modifiée ;

Vu les règlements généraux de la Fédération française de football ;

Vu le règlement intérieur de la Fédération française de football ;

Vu la Charte du football professionnel ;

Vu le règlement administratif et le règlement des compétitions du championnat national ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Christine Maugüé, Maître des Requêtes,

- les observations de Me Foussard, avocat de l'ASSOCIATION SPORTIVE DE CANNES et autres, de la SCP Vier, Barthélemy, avocat de la Fédération française de football et de la SCP Masse-Dessen, Thouvenin, avocat du Stade brestois,

- les conclusions de Mme Emmanuelle Prada Bordenave, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que l'ASSOCIATION SPORTIVE DE CANNES, l'UNION SPORTIVE DE RAON L'ETAPE et le FOOTBALL CLUB LIBOURNE - SAINT-SEURIN demandent l'annulation de la décision du 25 mai 2004 par laquelle la Fédération française de football a homologué le classement final du championnat dit National de football pour la saison 2003/2004 ;

Sur la fin de non-recevoir tirée du caractère prématuré de la requête :

Considérant que la Fédération française de football a publié le 25 mai 2004 sur son site Internet officiel un classement homologué du Championnat National de football pour l'année 2003/2004, par ailleurs diffusé dans de nombreux organes de presse ; qu'eu égard à son objet, cette publication était de nature à révéler que la Fédération avait pris le même jour une décision homologuant les résultats de ce championnat et à faire courir le délai de recours contentieux à l'encontre de cette décision ; que, par suite, la fin de non-recevoir tirée de ce que la requête serait prématurée doit être écartée ;

Sur le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 147 des règlements généraux de la Fédération française de football :

Considérant qu'il résulte de l'article 147 des règlements généraux de la Fédération française de football que l'homologation des rencontres est prononcée par la commission chargée de l'organisation de la compétition et que, sauf urgence dûment justifiée, une rencontre ne peut être homologuée avant le quinzième jour qui suit son déroulement, l'homologation étant de droit le trentième jour si aucune instance la concernant n'est en cours ; que la circonstance que le délai au terme duquel les dernières rencontres du Championnat National qui ont eu lieu le 22 mai 2004 pouvaient être homologuées n'était pas expiré à la date à laquelle est intervenue la décision litigieuse, ne faisait pas obstacle à ce que les résultats de ces dernières rencontres fussent pris en compte pour élaborer, sous réserve d'éventuelles contestations les concernant, le classement final de la compétition ;

Sur l'exception d'illégalité soulevée à l'encontre des décisions du 3 octobre 2003 du bureau du Conseil national du football amateur de la Fédération française de football :

Considérant qu'au soutien de leur requête, les clubs requérants invoquent l'illégalité des décisions du 3 octobre 2003 par lesquelles le bureau du Conseil national du football amateur de la Fédération française de football a refusé d'annuler les résultats des matchs joués par leur équipe contre celle du Stade brestois les 2, 9 et 13 août 2003 et d'infliger à ce dernier des sanctions de match perdu par pénalité ; que compte tenu des contestations dont ils ont fait l'objet, les résultats de ces matchs ne sont pas devenus définitifs ; que la décision homologuant le classement final a été établie en conséquence de ces décisions dont la légalité est contestée ; que, par suite, contrairement à ce que soutient la Fédération française de football, l'exception d'illégalité ainsi soulevée est recevable ;

En ce qui concerne la légalité externe des décisions relatives aux résultats des trois matchs litigieux :

Considérant qu'il résulte des dispositions de l'article 188 des règlements généraux de la Fédération française de football que le bureau du Conseil national du football amateur est compétent pour connaître, en deuxième instance et dernier ressort, des compétitions organisées par la Fédération ; que les décisions du 3 octobre 2003 rejetant les réclamations des clubs requérants ont dès lors été prises par une autorité compétente ;

Considérant qu'aux termes de l'article 33 du règlement intérieur de la Fédération, intitulé règlement intérieur du Conseil national du football amateur : (...) 6. Il est tenu procès-verbal des séances, signé par le président et le secrétaire (...)/ 9. a) La présence de 5 membres titulaires au moins est nécessaire pour la validité des délibérations du bureau du Conseil ; que s'il est soutenu que les décisions du bureau sont irrégulières faute de comporter la signature de leur auteur et d'indiquer le nombre et le nom des membres du bureau ayant participé au délibéré, il ressort des pièces du dossier que les courriers adressés aux clubs, le 8 octobre 2003, par le directeur de la Ligue française de football amateur se sont bornés à notifier aux intéressés les décisions prises par le bureau du Conseil national du football amateur lors de sa séance du 3 octobre 2003 ; que le procès-verbal de cette séance comporte la signature du président et du secrétaire du bureau ; qu'il mentionne, en outre, le nom et le nombre des membres du bureau ayant participé au délibéré ; que, par suite, les moyens manquent en fait ;

En ce qui concerne la légalité interne des décisions relatives aux résultats des trois matchs litigieux :

Considérant que les requérants soutiennent que la Fédération française de football a estimé à tort que la sanction de trois matchs de suspension infligée à M. avait déjà été exécutée à la date des matchs litigieux et que, celui-ci ayant régulièrement participé à ces matchs, le Stade brestois ne devait pas se voir infliger des sanctions de match perdu par pénalité ;

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 254 de la Charte du football professionnel relatif à l'homologation des contrats de travail des joueurs de football : Le contrat est établi par le club... Il prend effet sous condition suspensive de son homologation ; qu'aux termes de l'article 255 de la même charte relatif aux avenants des contrats des joueurs : Toutes conventions, contre-lettres, accords particuliers, modifications du contrat, doivent donner lieu à l'établissement d'un avenant soumis, dans le délai de 15 jours après signature, à l'homologation de la commission juridique selon la procédure décrite à l'article 254 ci-dessus, sauf en ce qui concerne les avenants de résiliation pour lesquels le délai est impérativement de 5 jours ; qu'en vertu de son article 261 relatif à la résiliation conventionnelle des contrats : Quelle qu'en soit la durée, un contrat peut, à tout moment, être résilié avec l'accord des parties... L'avenant doit être soumis... à la Ligue de football professionnel pour homologation ; qu'il résulte de ces stipulations que l'homologation des contrats de travail des joueurs de football professionnels par la Ligue de football professionnel conditionne l'entrée en vigueur de ces contrats ; qu'il en va de même pour l'homologation des avenants à ces contrats, y compris les avenants de résiliation ;

Considérant que M. Y... , joueur du club Nîmes Olympique, a conclu avec ce club le 21 mars 2003, un avenant résiliant son contrat à compter du 14 mars 2003 ; que cet avenant a été homologué par la Ligue de football professionnel le 15 avril 2003 ; que si l'homologation était nécessaire pour permettre à l'avenant de produire ses effets, elle ne faisait pas obstacle à ce que ceux-ci rétroagissent à la date prévue par les parties, soit le 14 mars 2003 ; qu'il en résulte que M. , qui avait fait l'objet d'une mesure de suspension de cinq matchs prononcée le 13 mars 2003 par la Commission centrale de discipline de la Fédération française de football, sanction ramenée à une suspension de trois matchs par la Commission fédérale d'appel le 11 avril 2003, ne pouvait plus être regardé comme étant joueur du club Nîmes Olympique à compter du 14 mars 2003, une fois homologuée la résiliation de son contrat le 15 avril suivant ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 226 des règlements généraux de la Fédération française de football, relatif aux modalités pour purger une suspension : 1. La suspension doit être purgée dans les rencontres officielles, quelles qu'elles soient, effectivement jouées dans la même catégorie d'équipe (première, réserve, seconde, football d'entreprise, etc.), étant précisé qu'entre temps le joueur ne peut prendre part à aucune autre rencontre officielle... ; qu'il résulte de ces dispositions que seul un joueur en mesure de participer à des rencontres officielles peut exécuter une sanction de suspension qui lui a été infligée ;

Considérant que M. qui, du fait de la résiliation à compter du 14 mars 2003 du contrat qui le liait au club Nîmes Olympique, était privé du droit de participer aux compétitions depuis cette date, n'avait pas exécuté la sanction de trois matchs de suspension lorsqu'il a disputé les trois premières rencontres du Championnat National 2003/2004 avec le Stade brestois, qui l'avait recruté à compter du début du mois d'août 2003, et ce alors même qu'il n'avait pas participé aux quatre matchs joués par le club Nîmes Olympique dans le Championnat National les 22 et 28 mars et 5 et 12 avril 2003, durant la période pendant laquelle la résiliation de son contrat de travail n'était pas encore homologuée ; que la Fédération française de football a, par suite, commis une erreur de droit en considérant que M. pouvait régulièrement participer aux trois premières rencontres du mois d'août 2003 ;

Considérant toutefois qu'aux termes de l'article 150 des règlements généraux de la Fédération française de football : Pour l'ensemble de la Fédération, des Ligues et des Districts, tout joueur suspendu ne peut disputer aucun match officiel ; qu'aux termes du paragraphe 1 de l'article 187 des mêmes règlements : En cas d'infraction à l'une des dispositions prévues aux articles 148 à 170, et indépendamment des éventuelles pénalités prévues au titre 4, le club fautif a match perdu par pénalité (...) ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le Stade brestois a fait participer M. aux rencontres qu'il a disputées contre l'UNION SPORTIVE DE RAON L'ETAPE, le 2 août 2003, le FOOTBALL CLUB LIBOURNE - SAINT-SEURIN, le 9 août 2003, et l'ASSOCIATION SPORTIVE DE CANNES, le 13 août 2003, alors que l'intéressé ne figurait pas sur la liste des joueurs suspendus au début de la saison 2003/2004 diffusée par la Fédération française de football sur son site Internet ; que M. ne figurait pas non plus sur la note adressée aux clubs au début de la saison 2003/2004 relative aux suspensions restant à purger ; qu'aucun autre élément du dossier ne permet d'établir que ni M. , ni le Club brestois n'était en mesure de penser que le joueur se trouvait encore sous le coup d'une mesure de suspension ; qu'ainsi, dans les circonstances de l'espèce, le Stade brestois, dont l'erreur est entièrement imputable aux informations qui lui ont été fournies par la fédération, ne peut être regardé comme fautif au sens des dispositions précitées et se voir infliger la sanction de match perdu pour chacun des trois matchs en cause ; que, par suite, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que les décisions du 3 octobre 2003 seraient entachées d'illégalité ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la requête doit être rejetée ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la Fédération française de football et le Stade brestois soient condamnés à payer aux clubs requérants les sommes qu'ils demandent à ce titre ; qu'il n'y a pas lieu de condamner lesdits clubs à verser à la Fédération française de football et au Stade brestois les frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de l'ASSOCIATION SPORTIVE DE CANNES, de l'UNION SPORTIVE DE RAON L'ETAPE et du FOOTBALL CLUB LIBOURNE - SAINT-SEURIN est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la Fédération française de football et le Stade brestois sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à l'ASSOCIATION SPORTIVE DE CANNES, à l'UNION SPORTIVE DE RAON L'ETAPE, au FOOTBALL CLUB LIBOURNE - SAINT-SEURIN, à la Fédération française de football, au Stade brestois et au ministre de la jeunesse, des sports et de la vie associative.


Synthèse
Formation : 2eme et 7eme sous-sections reunies
Numéro d'arrêt : 268728
Date de la décision : 15/07/2004
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

SPECTACLES - SPORTS ET JEUX - SPORTS - FÉDÉRATIONS SPORTIVES - EXERCICE DU POUVOIR DISCIPLINAIRE - COMPÉTITIONS DE FOOTBALL PROFESSIONNEL - SANCTION DE MATCH PERDU INFLIGÉ À UN CLUB POUR AVOIR FAIT JOUER UN JOUEUR SUSPENDU - CONDITION - CLUB EN MESURE DE PENSER QUE LE JOUEUR EST SUSPENDU.

63-05-01-02 Pour se voir infliger la sanction de match perdu pour avoir fait jouer un joueur sous le coup d'une suspension, un club doit être en mesure de penser que le joueur intéressé se trouvait encore sous le coup de la suspension. Tel n'est pas le cas lorsque cette suspension n'est répertoriée ni dans la liste diffusée par la fédération française de footbal sur son site internet en début de saison ni dans la note adressée par elle aux clubs au même moment.

SPECTACLES - SPORTS ET JEUX - SPORTS - FÉDÉRATIONS SPORTIVES - ORGANISATION DES COMPÉTITIONS - ORGANISATION DES COMPÉTITIONS DE FOOTBALL PROFESSIONNEL - ENTRÉE EN VIGUEUR DES CONTRATS DE JOUEURS - HOMOLOGATION - NATURE - CONDITION SUSPENSIVE [RJ1].

63-05-01-04 Il résulte des stipulations des articles 254, 255 et 261 de la charte du football professionnel que l'homologation des contrats de travail des joueurs et de leurs avenants par la ligue de football professionnel est une condition de l'entrée en vigueur de ces contrats et non une condition de validité de ceux-ci. En conséquence, si l'homologation est nécessaire pour permettre à ces contrats de produire leurs effets, elle ne fait pas obstacle à ce qu'ils rétroagissent à la date prévue par les parties.


Références :

[RJ1]

Rappr., s'agissant des contrats soumis au contrôle de légalité préfectoral, 2 octobre 2002, Gross, T. p. 811.


Publications
Proposition de citation : CE, 15 jui. 2004, n° 268728
Publié au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Robineau
Rapporteur ?: Mme Christine Maugüé
Rapporteur public ?: Mme Prada Bordenave
Avocat(s) : FOUSSARD ; SCP MASSE-DESSEN, THOUVENIN ; SCP VIER, BARTHELEMY

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2004:268728.20040715
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