La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

28/07/2004 | FRANCE | N°253177

France | France, Conseil d'État, 2eme sous-section jugeant seule, 28 juillet 2004, 253177


Vu la requête, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 8 janvier 2003, présentée par le PREFET DU VAL-D'OISE ; le PREFET DU VAL-D'OISE demande au Conseil d'Etat :

1') d'annuler le jugement du 10 décembre 2002 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé son arrêté du 4 décembre 2002 ordonnant la reconduite à la frontière de M. Tahar X ;

2') de rejeter la demande présentée par M. X devant le tribunal administratif de Cergy-Pontoise ;

Vu les autres pièces du dossier ;
>Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondament...

Vu la requête, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 8 janvier 2003, présentée par le PREFET DU VAL-D'OISE ; le PREFET DU VAL-D'OISE demande au Conseil d'Etat :

1') d'annuler le jugement du 10 décembre 2002 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé son arrêté du 4 décembre 2002 ordonnant la reconduite à la frontière de M. Tahar X ;

2') de rejeter la demande présentée par M. X devant le tribunal administratif de Cergy-Pontoise ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles ;

Vu la convention internationale des droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ;

Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Jean-François Mary, Maître des Requêtes,

- les conclusions de Mme Emmanuelle Prada Bordenave, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France : Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (...) 3° Si l'étranger, auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà d'un délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait... ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X, ressortissant de la République algérienne, s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 8 avril 2002, de la décision du PREFET DU VAL-D'OISE du 5 avril 2002, lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire ; qu'il se trouvait ainsi dans le cas où, en application du 3° du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;

Considérant qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant du 26 janvier 1990, publiée par décret du 8 octobre 1990 : Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ; qu'il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier que M. X et son épouse sont en situation irrégulière en France ; que rien ne s'oppose à ce que les enfants de M. X, scolarisés en France depuis 2000, repartent avec leurs parents et poursuivent leurs études en Algérie ; que, dès lors, l'arrêté attaqué n'a pas méconnu les stipulations précitées de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DU VAL-D'OISE est fondé à soutenir que c'est à tort que le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé son arrêté de reconduite à la frontière, au motif qu'il avait méconnu l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;

Considérant, toutefois, qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. X devant le tribunal administratif de Cergy-Pontoise ;

Considérant que M. Bousiges, secrétaire général de la préfecture du Val-d'Oise, signataire de l'arrêté attaqué, a été habilité par un arrêté du 14 novembre 2002, régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture, à signer notamment les arrêtés de reconduite à la frontière ; que, par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté litigieux doit être écarté ;

Considérant que l'arrêté ordonnant la reconduite à la frontière de M. X comporte l'indication des motifs de droit et de fait qui en constituent le fondement ; qu'il est ainsi suffisamment motivé ;

Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le PREFET DU VAL-D'OISE aurait omis de procéder à l'examen de la situation personnelle de M. X ; que, par suite, le moyen tiré de ce que l'arrêté serait intervenu au terme d'une procédure irrégulière doit être écarté ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X, entré en France en 1999 avec son épouse, qui est elle-même en situation irrégulière, et leurs enfants, n'allègue pas qu'il serait dépourvu de toute attache familiale dans son pays d'origine ; qu'ainsi, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce et notamment de la durée et des conditions du séjour en France de l'intéressé et eu égard aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière, l'arrêté attaqué n'a pas porté au droit de M. X au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris et n'a pas méconnu, par suite, les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DU VAL-D'OISE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé son arrêté du 4 décembre 2002 ordonnant la reconduite à la frontière de M. X ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le jugement du 10 décembre 2002 du magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Cergy-Pontoise est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. X devant le tribunal administratif de Cergy-Pontoise est rejetée.

Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DU VAL-D'OISE, à M. Tahar X et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.


Sens de l'arrêt : Satisfaction totale
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 28 jui. 2004, n° 253177
Inédit au recueil Lebon
RTFTélécharger au format RTF
Composition du Tribunal
Président : M. Honorat
Rapporteur ?: M. Jean-François Mary
Rapporteur public ?: Mme Prada Bordenave

Origine de la décision
Formation : 2eme sous-section jugeant seule
Date de la décision : 28/07/2004
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 253177
Numéro NOR : CETATEXT000008181184 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2004-07-28;253177 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award