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06/09/2004 | FRANCE | N°264777

France | France, Conseil d'État, President de la section du contentieux, 06 septembre 2004, 264777


Vu la requête, enregistrée le 20 février 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Joa Baptista X, demeurant chez Mlle Bernarda Lando ... ; M. X demande au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 15 décembre 2003 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 11 septembre 2003 du préfet de police ordonnant sa reconduite à la frontière ;

2°)' d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;

3°)

d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour sous astreinte de 100...

Vu la requête, enregistrée le 20 février 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Joa Baptista X, demeurant chez Mlle Bernarda Lando ... ; M. X demande au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 15 décembre 2003 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 11 septembre 2003 du préfet de police ordonnant sa reconduite à la frontière ;

2°)' d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la notification de la décision du Conseil d'Etat ;

4°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 800 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ;

Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- les conclusions de M. Francis Lamy, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (...) 3° Si l'étranger, auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X, de nationalité angolaise, s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 30 juillet 2002, de la décision du préfet de la Seine-Saint-Denis du 24 juillet 2002, lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire ; qu'il entrait ainsi dans le champ d'application du 3° du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 précité ;

Considérant toutefois qu'il ressort des pièces du dossier que M. X vit en France depuis de très nombreuses années, qu'il s'est marié en France le 6 octobre 2001, que son épouse est titulaire d'une carte de résident et qu'il est le père de deux enfants nés en France ; qu'ainsi, compte tenu des circonstances de l'espèce, l'arrêté ordonnant la reconduite à la frontière de M. X a porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels cette mesure a été prise ; que le requérant est, dès lors, fondé à soutenir qu'il méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 11 septembre 2003 par lequel le préfet de police a ordonné sa reconduite à la frontière ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

Considérant qu'à la suite d'une annulation d'un arrêté de reconduite à la frontière, il incombe au préfet, en application des dispositions du III de l'article 22 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945, non seulement de munir l'intéressé d'une autorisation provisoire de séjour mais aussi, qu'il ait été ou non saisi d'une demande en ce sens, de se prononcer sur son droit à un titre de séjour ; que, dès lors, il appartient au juge administratif, lorsqu'il prononce l'annulation d'un arrêté de reconduite à la frontière et qu'il est saisi de conclusions en ce sens, d'user des pouvoirs qu'il tient de l'article L. 911-2 du code de justice administrative - lesquels peuvent être exercés tant par le juge unique de la reconduite à la frontière que par une formation collégiale - pour fixer le délai dans lequel la situation de l'intéressé doit être réexaminée au vu de l'ensemble de la situation de droit et de fait existant à la date de ce réexamen ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu de prescrire au préfet de police de se prononcer sur la situation de M. X dans le délai de deux mois suivant la notification de la présente décision ; qu'il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 800 euros que M. X demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le jugement du 15 décembre 2003 du magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris et l'arrêté du 11 septembre 2003 du préfet de police ordonnant la reconduite à la frontière de M. X sont annulés.

Article 2 : Le préfet de police statuera sur la situation de M. X dans le délai de deux mois suivant la notification de la présente décision.

Article 3 : L'Etat versera à M. X la somme de 800 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. X est rejeté.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. Joa Baptista X, au préfet de police et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.


Sens de l'arrêt : Satisfaction totale
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 06 sep. 2004, n° 264777
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : M. Chantepy
Rapporteur public ?: M. Lamy

Origine de la décision
Formation : President de la section du contentieux
Date de la décision : 06/09/2004
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 264777
Numéro NOR : CETATEXT000008168554 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2004-09-06;264777 ?
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