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10/09/2004 | FRANCE | N°271140

France | France, Conseil d'État, Juge des referes, 10 septembre 2004, 271140


Vu la requête, enregistrée le 12 août 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Patrick X, demeurant ... ; M. X demande au Conseil d'Etat de faire application de l'article L. 521-1 du code de justice administrative et de suspendre l'exécution de la décision, en date du 3 juin 2004, par laquelle la commission de la carte d'identité des journalistes professionnels a refusé de lui attribuer une carte d'identité de journaliste professionnel ;

il soutient qu'il édite depuis 1988 un bulletin périodique dont il tire l'essentiel de ses revenus ; que l'a

bsence de la carte réclamée lui interdit de couvrir divers événeme...

Vu la requête, enregistrée le 12 août 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Patrick X, demeurant ... ; M. X demande au Conseil d'Etat de faire application de l'article L. 521-1 du code de justice administrative et de suspendre l'exécution de la décision, en date du 3 juin 2004, par laquelle la commission de la carte d'identité des journalistes professionnels a refusé de lui attribuer une carte d'identité de journaliste professionnel ;

il soutient qu'il édite depuis 1988 un bulletin périodique dont il tire l'essentiel de ses revenus ; que l'absence de la carte réclamée lui interdit de couvrir divers événements officiels, notamment sur la commune de Dinard ; que cette circonstance, qui a d'ores et déjà des répercussions sur son lectorat, menace l'existence même de la publication dont s'agit, qui, distribuée gratuitement, tire ses ressources de la publicité ; qu'ainsi est caractérisée une situation d'urgence ; qu'il remplit par ailleurs toutes les conditions mises par l'article L. 761-2 du code du travail à la délivrance de cette carte, son activité de journaliste-photographe étant prépondérante au sein de l'entreprise unipersonnelle qu'il anime ;

Vu la décision dont la suspension est demandée ;

Vu, enregistrées le 30 août 2004, les observations présentées pour la commission de la carte d'identité des journalistes professionnels (CCIJP), dont le siège est 221, rue Lafayette à Paris (75010), par Me Gatineau, avocat au Conseil d'Etat ; la CCIJP demande au Conseil d'Etat de rejeter la requête susvisée et de condamner M. X à lui payer 3 500 euros au titre des frais non compris dans les dépens ; elle soutient en premier lieu que l'octroi de la suspension demandée aurait le même effet qu'une annulation, ce qui rend irrecevable la requête ; elle soutient en deuxième lieu que l'existence du recours préalable formé devant la commission supérieure, laquelle ne s'est pas prononcée depuis plus de deux mois, a pour effet qu'est intervenue une décision de rejet de ce recours, laquelle s'est substituée à la décision contestée de la CCIJP ; que ce rejet n'ayant pas encore fait l'objet d'un recours pour excès de pouvoir, la demande de suspension est irrecevable ; elle soutient en troisième lieu que la condition d'urgence n'est pas remplie et qu'enfin aucun doute sérieux ne saurait exister quant à la légalité de la décision attaquée, la qualité de directeur de la publication que détient M. X faisant obstacle à ce que lui soit simultanément reconnue celle de journaliste ;

Vu, enregistré le 7 septembre 2004, le mémoire en réplique présenté par M. X, qui tend aux mêmes fins que sa requête et en outre demande que la CCIJP soit condamnée à lui payer 150 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; il maintient les moyens précédemment exposés ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code du travail ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir convoqué à une audience publique, d'une part, M. X, d'autre part, la commission de la carte d'identité des journalistes professionnels ;

Vu le procès verbal de l'audience publique du 10 septembre 2004 à 14 heures au cours de laquelle ont été entendus :

- Me Georges, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat de M. X ;

- M. X ;

- Me GATINEAU, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat de la commission de la carte d'identité des journalistes professionnels ;

Sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de non-recevoir opposées par la commission de la carte d'identité des journalistes professionnels ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision ;

Considérant que M. X, directeur d'une publication périodique qu'il nourrit de ses photographies d'événements d'actualité et de quelques commentaires de certains de ces événements, a demandé à la commission de la carte d'identité de journaliste professionnel de lui délivrer ladite carte ; qu'au soutien de sa demande tendant à ce que soit ordonnée la suspension du refus qui lui a été opposé et qu'il a par ailleurs déféré à la commission supérieure de la carte d'identité des journalistes professionnels, dans les conditions prévues par l'article R. 761-16 du code du travail, il soutient que si l'absence de cette carte ne lui interdit pas de faire paraître son périodique, elle fait obstacle à ce qu'il puisse rendre compte de nombreux événements officiels auxquels il ne peut, faute de cette carte, assister, cette circonstance mettant en cause à brève échéance la survie même de son entreprise ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment des exemplaires de la revue datés de juillet et d'août 2004, éclairés par les débats s'étant déroulés lors de l'audience publique du 10 septembre 2004, que si l'absence de la carte dont s'agit est de nature à rendre parfois difficile l'exercice par M. X de son métier, les obstacles ainsi créés n'apparaissent pas, en premier lieu, comme devant avoir pour effet l'impossibilité de publier, aux échéances habituelles, le bulletin en cause, dans son volume traditionnel et avec les rubriques auxquelles les lecteurs sont accoutumés, même si certaines manifestations, et plus précisément certaines de celles se déroulant à Dinard, ne peuvent être qu'imparfaitement présentées ; que dans ces conditions, il n'apparaît pas que le délai qui sera mis par le Conseil d'Etat statuant au contentieux à se prononcer sur la légalité du refus contesté - à supposer que la commission supérieure ne l'infirme pas - doive avoir pour effet de conduire à une paralysie de l'activité éditoriale de M. X, ou à tout le moins à une diminution de cette activité de nature à provoquer une réduction sensible et durable de son lectorat ; qu'en second lieu, les éventuelles réactions des lecteurs, s'agissant d'une publication distribuée gratuitement, n'auraient qu'une influence très indirecte sur le chiffre d'affaires de l'entreprise, qui provient de recettes publicitaires dont une part majeure est liée à des contrats conclus pour une durée au moins annuelle ;

Considérant que dans ces conditions, M. X n'établit pas que l'exécution de la décision qu'il conteste, laquelle ne menace aucun intérêt public, porte à sa situation une atteinte suffisamment grave et immédiate pour caractériser une situation d'urgence ; que par suite sa demande de suspension ne peut être accueillie ;

Sur les conclusions tendant à l'allocation de frais non compris dans les dépens :

Considérant d'une part que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative fait obstacle à ce que la CCIJP, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, soit condamnée à verser à M. X quelque somme que ce soit au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

Considérant d'autre part qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner M. X à verser une somme à la CCIJP au titre des mêmes frais ;

O R D O N N E :

--------------

Article 1er : La requête susvisée de M. X est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la commission de la carte d'identité des journalistes professionnels tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. Patrick X, à la commission de la carte d'identité des journalistes professionnels et au Premier ministre.

Copie en sera adressée pour information à la commission supérieure de la carte d'identité des journalistes professionnels.


Synthèse
Formation : Juge des referes
Numéro d'arrêt : 271140
Date de la décision : 10/09/2004
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 10 sep. 2004, n° 271140
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Chabanol
Avocat(s) : SCP GATINEAU

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2004:271140.20040910
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