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15/09/2004 | FRANCE | N°230901

France | France, Conseil d'État, 7eme et 2eme sous-sections reunies, 15 septembre 2004, 230901


Vu le recours, enregistré le 2 mars 2001 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, du MINISTRE DE L'AMENAGEMENT DU TERRITOIRE ET DE L'ENVIRONNEMENT ; le MINISTRE DE L'AMENAGEMENT DU TERRITOIRE ET DE L'ENVIRONNEMENT demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt en date du 21 décembre 2000 par lequel la cour administrative d'appel de Douai a rejeté sa requête tendant à l'annulation des jugements en date du 3 avril 1997 par lesquels le tribunal administratif de Lille a, d'une part, rejeté comme porté devant une juridiction incompétente pour en connaître le déféré du préfet du

Pas-de-Calais dirigé contre le contrat conclu le 13 mai 1996 e...

Vu le recours, enregistré le 2 mars 2001 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, du MINISTRE DE L'AMENAGEMENT DU TERRITOIRE ET DE L'ENVIRONNEMENT ; le MINISTRE DE L'AMENAGEMENT DU TERRITOIRE ET DE L'ENVIRONNEMENT demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt en date du 21 décembre 2000 par lequel la cour administrative d'appel de Douai a rejeté sa requête tendant à l'annulation des jugements en date du 3 avril 1997 par lesquels le tribunal administratif de Lille a, d'une part, rejeté comme porté devant une juridiction incompétente pour en connaître le déféré du préfet du Pas-de-Calais dirigé contre le contrat conclu le 13 mai 1996 entre le syndicat intercommunal de distribution d'eau du Nord et la société Intercommunale Waterleidingsmaatsschappij Van Veurne-Ambacht (IWVA), personne morale de droit public belge, et d'autre part, rejeté pour tardiveté le déféré du préfet du Pas-de-Calais dirigé contre la délibération du 21 mars 1996 autorisant le président du syndicat à signer ce contrat ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mlle Sibyle Petitjean, Auditeur,

- les observations de la SCP Parmentier, Didier, avocat du syndicat intercommunal de distribution d'eau du Nord,

- les conclusions de M. Denis Piveteau, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par délibération en date du 21 mars 1996, le bureau du syndicat intercommunal de distribution d'eau du Nord a décidé de conclure un contrat de fourniture d'eau avec la société Intercommunale Waterleidingsmaatschappij Van Veurne-Ambacht (IWVA), personne morale de droit belge ; que le contrat a été signé le 13 mai 1996 ; que le préfet du Nord a déféré la délibération au tribunal administratif de Lille le 22 octobre 1996, puis le contrat le 3 février 1997 ; que par jugement rendu le 3 avril 1997, le tribunal administratif de Lille a rejeté le déféré dirigé contre la délibération pour tardiveté et rejeté comme porté devant une juridiction incompétente pour en connaître le déféré dirigé contre le contrat de fourniture d'eau ; que le ministre chargé de l'environnement se pourvoit en cassation contre l'arrêt par lequel la cour a rejeté l'appel dirigé par le préfet du Nord contre ce jugement ;

En ce qui concerne l'arrêt de la cour en tant qu'il statue sur le déféré relatif à la délibération du 21 mars 1996 :

Considérant qu'en estimant, après avoir souverainement apprécié sans dénaturer les pièces du dossier que le préfet du Nord n'avait pas demandé dans le délai de deux mois dans lequel l'article L. 2131-6 du code général des collectivités territoriales enferme l'exercice du déféré préfectoral que soit complétée la transmission initiale incomplète de la délibération litigieuse, qu'en l'absence d'une telle initiative, le déféré enregistré le 22 octobre 1996 au greffe du tribunal administratif alors que la délibération était parvenue aux services de la préfecture le 7 mai 1996 était tardif, la cour administrative d'appel de Douai n'a pas commis d'erreur de droit ;

En ce qui concerne l'arrêt de la cour en tant qu'il statue sur le déféré relatif au contrat de fourniture d'eau conclu entre le syndicat intercommunal de distribution d'eau du Nord et la société IWVA :

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que le contrat litigieux prévoit que le syndicat intercommunal de distribution d'eau du Nord s'engage à fournir à la société IWVA au minimum deux millions de m3 d'eau potable par an et que cette société s'engage à fournir les quantités d'eau nécessaires pour satisfaire les besoins urgents du syndicat intercommunal de distribution d'eau du Nord en cas de défaillance des installations de ce dernier et pendant le temps nécessaire à leur remise en état ;

Considérant qu'après avoir relevé que ce contrat n'avait pas pour objet l'organisation du service public, qu'il ne faisait pas participer la société à l'exécution même de ce service et qu'il ne comportait aucune clause exorbitante du droit commun, la cour a pu légalement en déduire qu'un tel contrat ne faisait naître entre les parties que des rapports de droit privé ; qu'elle n'a dès lors pas commis d'erreur de droit en estimant que le déféré du préfet du Nord dirigé contre ce contrat ne ressortissait pas à la compétence de la juridiction administrative ;

Considérant que le moyen tiré de ce que l'impossibilité pour le préfet d'exercer un déféré préfectoral devant le juge administratif contre un contrat de droit privé serait contraire aux dispositions de l'article 72 de la Constitution est nouveau en cassation ; qu'il doit ainsi être écarté comme irrecevable ; que les moyens tirés de ce que le district serait sorti de sa spécialité en concluant un contrat de fourniture d'eau avec une personne publique alors que ses statuts ne lui permettent pas ce type d'opération, de ce que la déclaration d'utilité publique qui a permis de réaliser les infrastructures qu'exploite le syndicat intercommunal de distribution d'eau du Nord ne permettait pas davantage ce type d'opération commerciale, de ce que le contrat porte atteinte au principe de continuité du service public et méconnaîtrait des directives communautaires postérieures à sa signature ainsi que les dispositions de l'article L. 211-1 du code de l'environnement, qui ne critiquent ni la régularité externe de l'arrêt attaqué, ni le bien-fondé de ses motifs, sont inopérants et ne peuvent dès lors qu'être écartés ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le MINISTRE DE L'AMENAGEMENT DU TERRITOIRE ET DE L'ENVIRONNEMENT n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêt attaqué ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros que le syndicat intercommunal de distribution d'eau du Nord demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le recours du MINISTRE DE L'AMENAGEMENT DU TERRITOIRE ET DE L'ENVIRONNEMENT est rejeté.

Article 2 : L'Etat versera la somme de 3 000 euros au syndicat intercommunal de distribution d'eau du Nord en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente décision sera notifiée au MINISTRE DE L'ECOLOGIE ET DU DEVELOPPEMENT DURABLE, au syndicat intercommunal de distribution d'eau du Nord et à société Intercommunale Waterleidingsmaatschappij Van Veurne-Ambacht.


Synthèse
Formation : 7eme et 2eme sous-sections reunies
Numéro d'arrêt : 230901
Date de la décision : 15/09/2004
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

COLLECTIVITÉS TERRITORIALES - DISPOSITIONS GÉNÉRALES - CONTRÔLE DE LA LÉGALITÉ DES ACTES DES AUTORITÉS LOCALES - DÉFÉRÉ PRÉFECTORAL - COMPÉTENCE DU JUGE ADMINISTRATIF - ABSENCE - DÉFÉRÉ DIRIGÉ CONTRE UN CONTRAT DE FOURNITURE D'EAU - MÊME SIGNÉ ENTRE UNE PERSONNE MORALE DE DROIT PUBLIC FRANÇAISE ET UNE PERSONNE PUBLIQUE ÉTRANGÈRE.

135-01-015-02 Un contrat de fourniture d'eau qui n'a pas pour objet l'organisation du service public, qui ne fait pas participer le cocontractant de l'administration à l'exécution même de ce service et qui ne comporte aucune clause exorbitante du droit commun ne fait naître entre les parties, seraient-elles respectivement une personne morale de droit public française et une personne publique étrangère, que des rapports de droit privé. En conséquence, le juge administratif est incompétent pour connaître du déféré dirigé par le préfet contre un tel contrat.

COMPÉTENCE - RÉPARTITION DES COMPÉTENCES ENTRE LES DEUX ORDRES DE JURIDICTION - COMPÉTENCE DÉTERMINÉE PAR UN CRITÈRE JURISPRUDENTIEL - CONTRATS - CONTRATS DE DROIT PRIVÉ - CONTRATS DÉPOURVUS DE CLAUSES EXORBITANTES DU DROIT COMMUN ET DE PARTICIPATION AU SERVICE PUBLIC - CONTRAT DE FOURNITURE D'EAU - MÊME SIGNÉ ENTRE UNE PERSONNE MORALE DE DROIT PUBLIC FRANÇAISE ET UNE PERSONNE PUBLIQUE ÉTRANGÈRE - CONSÉQUENCE - ABSENCE - COMPÉTENCE DU JUGE ADMINISTRATIF POUR CONNAÎTRE DU DÉFÉRÉ PRÉFECTORAL DIRIGÉ CONTRE CE CONTRAT.

17-03-02-03-01-02 Un contrat de fourniture d'eau qui n'a pas pour objet l'organisation du service public, qui ne fait pas participer le cocontractant de l'administration à l'exécution même de ce service et qui ne comporte aucune clause exorbitante du droit commun ne fait naître entre les parties, seraient-elles respectivement une personne morale de droit public française et une personne publique étrangère, que des rapports de droit privé. En conséquence, le juge administratif est incompétent pour connaître du déféré dirigé par le préfet contre un tel contrat.

COMPÉTENCE - RÉPARTITION DES COMPÉTENCES ENTRE LES DEUX ORDRES DE JURIDICTION - COMPÉTENCE DÉTERMINÉE PAR UN CRITÈRE JURISPRUDENTIEL - PROBLÈMES PARTICULIERS POSÉS PAR CERTAINES CATÉGORIES DE SERVICES PUBLICS - SERVICE PUBLIC INDUSTRIEL ET COMMERCIAL - FOURNITURE D'EAU - CONTRAT SIGNÉ ENTRE UNE PERSONNE MORALE DE DROIT PUBLIC FRANÇAISE ET UNE PERSONNE PUBLIQUE DE DROIT ÉTRANGER - CONSÉQUENCE - ABSENCE - COMPÉTENCE DU JUGE ADMINISTRATIF POUR CONNAÎTRE DU DÉFÉRÉ PRÉFECTORAL DIRIGÉ CONTRE CE CONTRAT.

17-03-02-07-02 Un contrat de fourniture d'eau qui n'a pas pour objet l'organisation du service public, qui ne fait pas participer le cocontractant de l'administration à l'exécution même de ce service et qui ne comporte aucune clause exorbitante du droit commun ne fait naître entre les parties, seraient-elles respectivement une personne morale de droit public française et une personne publique étrangère, que des rapports de droit privé. En conséquence, le juge administratif est incompétent pour connaître du déféré dirigé par le préfet contre un tel contrat.


Références :



Publications
Proposition de citation : CE, 15 sep. 2004, n° 230901
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Robineau
Rapporteur ?: Mlle Sibyle Petitjean
Rapporteur public ?: M. Piveteau
Avocat(s) : SCP PARMENTIER, DIDIER

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2004:230901.20040915
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