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15/09/2004 | FRANCE | N°244713

France | France, Conseil d'État, 7eme et 2eme sous-sections reunies, 15 septembre 2004, 244713


Vu la requête, enregistrée le 2 avril 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE POLICE ; le PREFET DE POLICE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris en date du 5 février 2002 en tant qu'il a annulé la décision distincte contenue dans son arrêté du 10 octobre 2001 ordonnant la reconduite à la frontière de M. Mustapha Y et fixant l'Algérie comme pays à destination duquel ce dernier doit être reconduit ;

2°) de rejeter les conclusions dir

igées contre cette décision présentées par M. Y devant le tribunal administratif...

Vu la requête, enregistrée le 2 avril 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE POLICE ; le PREFET DE POLICE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris en date du 5 février 2002 en tant qu'il a annulé la décision distincte contenue dans son arrêté du 10 octobre 2001 ordonnant la reconduite à la frontière de M. Mustapha Y et fixant l'Algérie comme pays à destination duquel ce dernier doit être reconduit ;

2°) de rejeter les conclusions dirigées contre cette décision présentées par M. Y devant le tribunal administratif de Paris ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mlle Sibyle Petitjean, Auditeur,

- les conclusions de M. Denis Piveteau, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que, par un arrêté du 10 octobre 2001, le PREFET DE POLICE a ordonné la reconduite à la frontière de M. Mustapha Y, de nationalité algérienne ; que par une décision distincte contenue dans le même arrêté, il a fixé l'Algérie comme pays à destination duquel l'intéressé doit être reconduit ; que, par un jugement du 5 février 2002, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté les conclusions de M. Y tendant à l'annulation de la mesure de reconduite à la frontière prise à son encontre ; qu'il a en revanche fait droit à ses conclusions tendant à l'annulation de la décision distincte précitée ; que par une requête enregistrée le 2 avril 2002 le PREFET DE POLICE relève appel du jugement du 5 février 2002, qui lui a été notifié le 1er mars 2002, en tant qu'il a annulé cette décision ;

Considérant que le dernier alinéa de l'article 27 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France dispose qu' : un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que ce dernier texte énonce que nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ;

Considérant que ces dispositions combinées font obstacle à ce que puisse être légalement désigné comme pays de destination d'un étranger, faisant l'objet d'une mesure d'éloignement, un Etat pour lequel il existe des motifs sérieux et avérés de croire que l'intéressé s'y trouverait exposé à un risque réel pour sa personne, soit du fait des autorités de cet Etat, soit même du fait de personnes ou groupes de personnes ne relevant pas des autorités publiques, dès lors que, dans ce dernier cas, les autorités de l'Etat de destination ne sont pas en mesure de parer à un tel risque par une protection appropriée ;

Considérant que si M. YX, à qui le bénéfice de l'asile territorial a été refusé par une décision du ministre de l'intérieur en date du 24 mai 2000, soutient qu'il aurait fait l'objet, précédemment à sa venue en France, en juin 1999, d'une part, de menaces de la part de groupes armés en raison de sa parenté avec le fondateur du Mouvement national algérien et de son appartenance, prétendue, à un mouvement politique et, d'autre part, de menaces de racket à l'occasion de l'exercice de sa profession de transporteur, les éléments produits à l'appui de ses allégations ne suffisent pas à établir la réalité des risques auxquels il serait personnellement exposé en cas de retour dans son pays d'origine ; que, par suite, le PREFET DE POLICE est fondé à soutenir que c'est à tort que le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris s'est fondé, pour annuler la décision litigieuse, sur le moyen tiré de la méconnaissance par cette décision des dispositions et stipulations précitées de l'article 27 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 et de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède, en l'absence d'autre moyen soulevé par M. YX à l'encontre de la décision fixant l'Algérie comme pays à destination duquel il doit être reconduit, que le PREFET DE POLICE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'article 1er du jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé cette décision ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le jugement du magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris en date du 5 février 2002 est annulé en tant qu'il a annulé la décision distincte contenue dans l'arrêté du PREFET DE POLICE en date du 10 octobre 2001 ordonnant la reconduite à la frontière de M. Y et fixant l'Algérie comme pays à destination duquel ce dernier doit être reconduit.

Article 2 : Les conclusions de M. Y tendant, devant le tribunal administratif de Paris, à l'annulation de la décision distincte contenue dans l'arrêté du 10 octobre 2001 du PREFET DE POLICE ordonnant sa reconduite à la frontière et fixant l'Algérie comme pays à destination duquel il doit être reconduit sont rejetées.

Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DE POLICE, à M. Mustapha Y et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.


Sens de l'arrêt : Satisfaction totale
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03-03 Étrangers - Reconduite à la frontière - Règles de procédure contentieuse spéciales


Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 15 sep. 2004, n° 244713
Mentionné aux tables du recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : M. Robineau
Rapporteur ?: Mlle Sibyle Petitjean
Rapporteur public ?: M. Piveteau

Origine de la décision
Formation : 7eme et 2eme sous-sections reunies
Date de la décision : 15/09/2004
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 244713
Numéro NOR : CETATEXT000008197717 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2004-09-15;244713 ?
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