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04/10/2004 | FRANCE | N°263769

France | France, Conseil d'État, 8eme et 3eme sous-sections reunies, 04 octobre 2004, 263769


Vu le recours, enregistré le 21 janvier 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, du GARDE DES SCEAUX, MINISTRE DE LA JUSTICE ; le GARDE DES SCEAUX, MINISTRE DE LA JUSTICE demande au Conseil d'Etat d'annuler l'ordonnance du 15 janvier 2004 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Marseille a, d'une part, suspendu l'exécution de la décision du 1er décembre 2003 par laquelle le ministre a muté M. Nicolas A, dans l'intérêt du service, de la Réunion à Marseille, et d'autre part, condamné l'Etat à verser à l'intéressé la somme de 1 500 euros au tit

re de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu le recours, enregistré le 21 janvier 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, du GARDE DES SCEAUX, MINISTRE DE LA JUSTICE ; le GARDE DES SCEAUX, MINISTRE DE LA JUSTICE demande au Conseil d'Etat d'annuler l'ordonnance du 15 janvier 2004 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Marseille a, d'une part, suspendu l'exécution de la décision du 1er décembre 2003 par laquelle le ministre a muté M. Nicolas A, dans l'intérêt du service, de la Réunion à Marseille, et d'autre part, condamné l'Etat à verser à l'intéressé la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Marc El Nouchi, Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Masse-Dessen, Thouvenin, avocat de M. A,

- les conclusions de M. Laurent Olléon, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du recours :

Considérant que l'urgence justifie que soit prononcée la suspension d'un acte administratif lorsque l'exécution de celui-ci porte atteinte, de manière suffisamment grave et immédiate, à un intérêt public, à la situation du requérant ou aux intérêts qu'il entend défendre ; qu'il appartient au juge des référés d'apprécier concrètement, compte tenu des justifications fournies par le requérant, si les effets de l'acte litigieux sont de nature à caractériser une urgence justifiant que, sans attendre le jugement de la requête au fond, l'exécution de la décision soit suspendue ; qu'il lui appartient également, l'urgence s'appréciant objectivement et compte tenu de l'ensemble des circonstances de chaque espèce, de faire apparaître dans sa décision tous les éléments qui, eu égard notamment à l'argumentation des deux parties, l'ont conduit à considérer que la suspension demandée revêtait un caractère d'urgence ;

Considérant que pour soutenir l'urgence de la suspension de l'arrêté du 1er décembre 2003, par lequel le ministre de la justice a prononcé sa mutation, du centre de placement immédiat du Brûlé à la Réunion où il était précédemment affecté et qui a été fermé dans l'intérêt du service, au foyer d'action éducative et centre de placement immédiat de Marseille, M. A a fait valoir devant le juge des référés que la décision contestée le priverait du bénéfice du sur-salaire versé à la Réunion aux fonctionnaires, entraînant ainsi d'importantes conséquences financières sur ses conditions de vie ; que le juge des référés du tribunal administratif de Marseille s'est borné à relever que le requérant justifiait ainsi de l'urgence de la mesure sollicitée par les modifications importantes dans ses conditions de vie, sans répondre à l'argumentation en défense, non inopérante, du ministre de la justice, lequel objectait que la décision de mutation n'aurait pas d'incidence sur le traitement et les indemnités versés à M. A et que ce dernier maintiendrait son pouvoir d'achat, dès lors que l'indemnité de cherté de vie invoquée par l'intéressé est seulement destinée à compenser le coût de la vie plus élevé à la Réunion qu'en métropole ; que l'ordonnance attaquée est ainsi entachée d'une insuffisance de motivation et doit, par suite, être annulée ;

Considérant qu'il y a lieu, par application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, de régler l'affaire au titre de la procédure de référé engagée par M. A ;

Sans qu'il soit besoin de statuer sur l'urgence :

Considérant que, si M. A soulève un moyen tiré de l'irrégularité de la composition et de la réunion de la commission administrative paritaire des éducateurs des services déconcentrés de la protection judiciaire de la jeunesse du 7 novembre 2003, ce moyen n'est pas assorti des précisions qui permettraient d'en apprécier la portée ;

Considérant que pour demander la suspension de la décision de mutation contestée, M. A soutient que la décision du 7 octobre 2003, par laquelle le ministre de la justice a procédé à la fermeture du centre de placement immédiat du Brûlé à la Réunion, est entachée d'illégalité ; que la décision attaquée est entachée d'une erreur de fait, en ce qu'elle mentionne l'absence de postes vacants à la Réunion, alors que deux éducateurs auraient été nommés sur des postes à Saint-Denis de la Réunion ; que cette décision constitue une sanction disciplinaire déguisée intervenue en dehors de toute garantie disciplinaire ; qu'elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation et d'une méconnaissance des dispositions de l'article 60 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat ; qu'elle méconnaît le principe d'égalité, dès lors qu'une discrimination a été créée entre agents du même corps postulant pour une affectation à la Réunion ; qu'aucun de ces moyens n'est de nature à faire naître, en l'état de l'instruction, un doute sérieux sur la légalité de la décision attaquée ;

Sur les conclusions de M. A tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de cet article font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le paiement de la somme que demande M. A au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'ordonnance du 15 janvier 2004 du juge des référés du tribunal administratif de Marseille est annulée.

Article 2 : La demande de M. A devant le juge des référés du tribunal administratif de Marseille est rejetée.

Article 3 : Les conclusions de M. A tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : La présente décision sera notifiée au GARDE DES SCEAUX, MINISTRE DE LA JUSTICE et à M. Nicolas A.


Sens de l'arrêt : Satisfaction totale
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 04 oct. 2004, n° 263769
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : M. Genevois
Rapporteur ?: M. Marc El Nouchi
Rapporteur public ?: M. Olléon
Avocat(s) : SCP MASSE-DESSEN, THOUVENIN

Origine de la décision
Formation : 8eme et 3eme sous-sections reunies
Date de la décision : 04/10/2004
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 263769
Numéro NOR : CETATEXT000008177121 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2004-10-04;263769 ?
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