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15/10/2004 | FRANCE | N°248289

France | France, Conseil d'État, 5eme et 4eme sous-sections reunies, 15 octobre 2004, 248289


Vu 1°), sous le n° 248289 la requête, enregistrée le 1er juillet 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le GROUPEMENT AGRICOLE D'EXPLOITATION EN COMMUN DU COLOMBIER, dont le siège est au lieu-dit ..., Mme Yvette Y, demeurant ..., et Mme Nadège Y, demeurant au lieu-dit ... ; le GROUPEMENT AGRICOLE D'EXPLOITATION EN COMMUN DU COLOMBIER et autres demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision du 23 novembre 2001 de la commission nationale d'aménagement foncier relative au remembrement de la commune de Villerbon (Loir-et-Cher) et concernant

les biens du groupement foncier agricole de la Pierre Percée, de ...

Vu 1°), sous le n° 248289 la requête, enregistrée le 1er juillet 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le GROUPEMENT AGRICOLE D'EXPLOITATION EN COMMUN DU COLOMBIER, dont le siège est au lieu-dit ..., Mme Yvette Y, demeurant ..., et Mme Nadège Y, demeurant au lieu-dit ... ; le GROUPEMENT AGRICOLE D'EXPLOITATION EN COMMUN DU COLOMBIER et autres demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision du 23 novembre 2001 de la commission nationale d'aménagement foncier relative au remembrement de la commune de Villerbon (Loir-et-Cher) et concernant les biens du groupement foncier agricole de la Pierre Percée, de M. et Mme Jean Y et des consorts BY ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat les sommes de 1 500 euros chacun au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu 2°), sous le n° 248568 la requête, enregistrée le 11 juillet 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le GROUPEMENT AGRICOLE D'EXPLOITATION EN COMMUN DU COLOMBIER, dont le siège est au lieu-dit ..., Mme Yvette Y, demeurant ..., et Mme Nadège Y, demeurant au lieu-dit ..., tendant aux mêmes fins que la requête n° 248289 par les mêmes moyens ;

....................................................................................

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu la note en délibéré présentée le 20 septembre 2004 par le GROUPEMENT AGRICOLE D'EXPLOITATION EN COMMUN DU COLOMBIER et autres ;

Vu le code rural ;

Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Thomas Campeaux, Auditeur,

- les conclusions de M. Terry Olson, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que les deux requêtes du GROUPEMENT AGRICOLE D'EXPLOITATION EN COMMUN DU COLOMBIER, de Mme Y et de Mme Y, enregistrées sous les numéros 248289 et 248568, présentent à juger les mêmes questions ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;

Sur la recevabilité des requêtes :

Considérant que le GROUPEMENT AGRICOLE D'EXPLOITATION EN COMMUN DU COLOMBIER, locataire de terres appartenant aux consorts BY sur le territoire de la commune de Villerbon (Loir-et-Cher), ne justifie pas à ce titre d'un intérêt lui donnant qualité pour contester devant le juge administratif la décision de la commission nationale d'aménagement foncier du 23 novembre 2001 en ce qu'elle concerne le remembrement des terres des consorts BY ; que, par suite, les requêtes ne sont pas recevables en tant qu'elles émanent du GROUPEMENT AGRICOLE D'EXPLOITATION EN COMMUN DU COLOMBIER et sont relatives aux comptes des consorts BY ;

Sur la légalité externe :

Considérant qu'aucune disposition du code rural n'impose que les décisions de la commission nationale d'aménagement foncier, qui n'est pas une juridiction, comportent la mention des membres de la commission ayant participé à la délibération ; que si le second alinéa de l'article 4 de la loi du 12 avril 2000 dispose que : Toute décision prise par l'une des autorités administratives mentionnées à l'article 1er comporte, outre la signature de son auteur, la mention, en caractères lisibles, du prénom, du nom et de la qualité de celui-ci, il est satisfait aux exigences découlant de ces dispositions, lorsqu'il s'agit d'une autorité de caractère collégial, dès lors que les décisions que prend celle-ci portent la signature de son président, accompagnée des mentions, en caractère lisible, prévues par cet article ; qu'il ressort des pièces du dossier que la décision attaquée répond à ces exigences ; que, par suite, le moyen tiré de leur méconnaissance doit être écarté ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la commission nationale d'aménagement foncier, dans sa composition issue de l'arrêté du 11 avril 2000 du ministre de l'agriculture et de la pêche, a intégralement examiné les réclamations dont elle était saisie et pris la décision attaquée lors de la séance du 23 novembre 2001 ; que, dès lors, le moyen selon lequel la commission aurait statué sur la situation des requérants lors de deux séances, les 3 décembre 1999 et 23 novembre 2001, entre lesquelles sa composition a varié, manque en fait ;

Sur la légalité interne :

Considérant que par deux jugements en date des 8 et 22 novembre 1994, le tribunal administratif d'Orléans a annulé la décision de la commission départementale d'aménagement foncier de Loir-et-Cher du 7 novembre 1991 en tant qu'elle concernait le remembrement des terres appartenant respectivement au groupement foncier agricole de la Pierre Percée ainsi qu'à Mme Jeanne CY, et aux consorts BY ainsi qu'à M. et Mme Y ; que la commission nationale d'aménagement foncier, saisie en application de l'article L. 121-11 du code rural pour statuer à la place de la commission départementale qui n'avait pas pris de nouvelle décision dans le délai d'un an prescrit par l'article L. 121-10 du même code, s'est trouvée, du fait de cette annulation contentieuse, saisie à nouveau de l'ensemble des réclamations des propriétaires ayant obtenu l'annulation des décisions les concernant ; qu'ainsi les requérants ne sont pas fondés à soutenir que la commission nationale d'aménagement foncier aurait méconnu l'autorité de la chose jugée par le tribunal administratif en statuant sur ces réclamations et en apportant au remembrement de la commune de Villerbon les modifications nécessaires ;

En ce qui concerne la situation de Mme Y :

Considérant qu'aux termes des deux premiers alinéas de l'article L. 123-1 du code rural : Le remembrement, applicable aux propriétés rurales non bâties, se fait au moyen d'une nouvelle distribution des parcelles morcelées et dispersées./ Il a principalement pour but, par la constitution d'exploitations rurales d'un seul tenant ou à grandes parcelles bien groupées, d'améliorer l'exploitation agricole des biens qui y sont soumis. Il doit également avoir pour objet l'aménagement rural du périmètre dans lequel il est mis en oeuvre (...) ; qu'il ressort des pièces du dossier qu'en échange d'apports constitués de cinq parcelles dont l'une située au lieu-dit Les Madeleines, d'une superficie de 1,249 hectare, Mme Y s'est vue attribuer par la décision attaquée trois parcelles dont deux sont situées aux Madeleines, d'une superficie respective de 0,61 hectare et de 6,2725 hectares ; qu'ainsi le moyen selon lequel la commission aurait procédé au démembrement d'une parcelle d'un seul tenant aux Madeleines, en méconnaissance de l'article L. 123-1 du code rural, manque en fait ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 123-6 du code rural : Sauf exception justifiée, il n'est créé qu'une seule parcelle par propriétaire dans une masse de répartition ; que si les requérants soutiennent que la commission nationale d'aménagement foncier aurait méconnu ces dispositions en attribuant à Mme Y deux parcelles au lieu-dit Les Madeleines, l'attribution d'une seconde parcelle ZO 15 est justifiée, dans les circonstances de l'espèce, par la nécessité de rétablir l'équilibre de son compte après l'annulation prononcée par le tribunal administratif d'Orléans ;

Considérant que le périmètre des opérations de remembrement de la commune de Villerbon, fixé par l'arrêté du préfet du Loir-et-Cher du 24 juillet 1990 prescrivant ledit remembrement, a été modifié par deux arrêtés des 6 mai et 17 octobre 1991 ; qu'il ressort des pièces du dossier que la parcelle cadastrée A 132, appartenant à Mme Y, a été incluse dans le périmètre de remembrement à l'occasion de ces modifications ; que si les requérants invoquent le caractère irrégulier de cette inclusion dès lors que les arrêtés modificatifs du périmètre sont intervenus à une date à laquelle M. Y, chargé des opérations de remembrement, avait perdu la qualité de géomètre-expert du fait de son admission à la retraite, ils ne sont en tout état de cause pas recevables à exciper de l'illégalité de ces arrêtés, qui sont devenus définitifs et ne présentent pas de caractère réglementaire, au soutien de leurs conclusions dirigées contre la décision de la commission nationale d'aménagement foncier relative aux opérations de remembrement ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à demander l'annulation de la décision de la commission nationale d'aménagement foncier en date du 23 novembre 2001 en tant qu'elle concerne le compte de Mme Y ;

En ce qui concerne la situation de Mme Y :

Considérant qu'à la suite de l'annulation contentieuse de sa décision, la commission départementale d'aménagement foncier, à laquelle est éventuellement substituée la commission nationale dans les conditions de l'article L. 121-11 du code rural, est tenue de procéder à un nouvel examen de l'ensemble des réclamations des propriétaires concernés par l'annulation et de n'apporter au remembrement que les modifications nécessaires à l'exécution de la chose jugée ;

Considérant qu'ainsi qu'il a été dit précédemment, les jugements du tribunal administratif d'Orléans des 8 et 22 novembre 1994, pour l'exécution desquels la commission nationale d'aménagement foncier a pris la décision attaquée, n'ont prononcé l'annulation de la décision de la commission départementale d'aménagement foncier de Loir-et-Cher du 7 novembre 1991 qu'en tant qu'elle concernait le remembrement des terres appartenant respectivement au groupement foncier agricole de la Pierre Percée ainsi qu'à Mme CY, et aux consorts BY ainsi qu'à M. et Mme Y, à l'exclusion de celles inscrites au compte de propriété de Mme Y ; qu'en revanche la décision du 9 mai 1996 par laquelle la commission départementale a attribué à Mme Y la parcelle ZO 70, issue de la suppression partielle du chemin rural de la Poulaillère décidée par le conseil municipal de Villerbon dans sa délibération du 11 mars 1996, de même que l'arrêté du préfet de Loir-et-Cher du 25 juillet 1996 ordonnant le dépôt en mairie des modifications apportées au remembrement de la commune par cette décision, n'ont pas été contestés devant le juge administratif et ont acquis de ce fait un caractère définitif ; qu'il s'ensuit qu'en retirant, par la décision attaquée, la parcelle ZO 70 du compte de Mme Y pour l'attribuer à la commune de Villerbon, afin de tirer les conséquences du jugement du 16 novembre 1999 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a partiellement annulé la délibération susmentionnée du conseil municipal de Villerbon, la commission nationale d'aménagement foncier a méconnu l'étendue de sa compétence limitée à l'adoption des mesures nécessaires à l'exécution des annulations contentieuses de la décision de la commission départementale du 7 novembre 1991 ; que, par suite, les requérants sont fondés à demander l'annulation de l'article 11 de la décision de la commission nationale d'aménagement foncier du 23 novembre 2001, attribuant à la commune de Villerbon la parcelle ZO 70 ;

En ce qui concerne les travaux connexes au remembrement :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 123-8 du code rural, les commissions d'aménagement foncier ont qualité pour décider, à l'occasion des opérations de remembrement et dans leur périmètre : (...) 3° Tous travaux d'amélioration foncière connexes au remembrement, tels que ceux qui sont nécessaires à la sauvegarde des équilibres naturels ou qui ont pour objet, notamment, la protection des sols, l'écoulement des eaux nuisibles, la retenue et la distribution des eaux utiles (...) ; qu'il résulte de ces dispositions que les travaux connexes au remembrement sont des travaux d'intérêt collectif dont l'objet est d'assurer, selon les cas, la desserte, l'amélioration des conditions foncières d'exploitation ou la sauvegarde des équilibres naturels du nouvel aménagement parcellaire issu des opérations de remembrement ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier et de la motivation de la décision attaquée que la commission nationale d'aménagement foncier a décidé, au titre des travaux connexes au remembrement de la commune de Villerbon, la mise en place d'une canalisation destinée à l'irrigation des parcelles attribuées au groupement foncier agricole de la Pierre Percée au lieu-dit Les Madeleines ; que la réalisation de ces travaux d'amélioration des conditions foncières d'exploitation de ces parcelles, destinée à compenser l'apport par le groupement foncier agricole de la Pierre Percée de parcelles dotées d'un système d'irrigation, répond à la nécessité de préserver les conditions d'exploitation de ce dernier et de permettre ainsi l'échange des parcelles prévu au plan de remembrement ; que, par suite, la commission nationale d'aménagement foncier n'a pas méconnu les dispositions précitées de l'article L. 123-8 du code rural en décidant la réalisation, au titre des travaux connexes au remembrement, de la canalisation d'irrigation destinée au seul bénéfice du groupement foncier agricole de la Pierre Percée ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à demander l'annulation de la décision de la commission nationale d'aménagement foncier du 23 novembre 2001 en tant qu'elle concerne les travaux connexes au remembrement ;

Sur les conclusions du GROUPEMENT AGRICOLE D'EXPLOITATION EN COMMUN DU COLOMBIER et autres tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de l'Etat la somme que demandent les requérants au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

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Article 1er : L'article 11 de la décision de la commission nationale d'aménagement foncier du 23 novembre 2001 est annulé.

Article 2 : Le surplus des conclusions des requêtes est rejeté.

Article 3 : La présente décision sera notifiée au GROUPEMENT AGRICOLE D'EXPLOITATION EN COMMUN DU COLOMBIER, à Mme Yvette Y, à Mme Nadège Y, au ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales et à la commune de Villerbon.


Synthèse
Formation : 5eme et 4eme sous-sections reunies
Numéro d'arrêt : 248289
Date de la décision : 15/10/2004
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 15 oct. 2004, n° 248289
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Martin
Rapporteur ?: M. Thomas Campeaux
Rapporteur public ?: M. Olson

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2004:248289.20041015
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