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22/10/2004 | FRANCE | N°260916

France | France, Conseil d'État, President de la section du contentieux, 22 octobre 2004, 260916


Vu la requête, enregistrée le 9 octobre 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE POLICE ; le PREFET DE POLICE demande au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement en date du 18 juin 2003 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé l'arrêté du 4 avril 2003 ordonnant la reconduite à la frontière de M. ;

2°) de rejeter la demande d'annulation de cet arrêté que M. a présenté devant le tribunal administratif de Paris ;

Vu le m

moire en défense enregistré le 19 mars 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d...

Vu la requête, enregistrée le 9 octobre 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE POLICE ; le PREFET DE POLICE demande au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement en date du 18 juin 2003 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé l'arrêté du 4 avril 2003 ordonnant la reconduite à la frontière de M. ;

2°) de rejeter la demande d'annulation de cet arrêté que M. a présenté devant le tribunal administratif de Paris ;

Vu le mémoire en défense enregistré le 19 mars 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par M. Quetuca X... demeurant chez ... ; M. X... conclut :

1°) au rejet de la requête du préfet et à la confirmation du jugement attaqué ;

2°) à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

....................................................................................

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;

Vu le décret n° 46-1574 du 30 juin 1946 modifié réglementant les conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- les conclusions de M. Pierre Collin, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que les requêtes n°s 260916 et 260933 du préfet de police sont dirigées contre le même jugement ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;

Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (...) 3° Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait (...) ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X..., de nationalité guinéenne, s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 24 juin 2002, de la décision du PREFET DE POLICE du 20 juin 2002 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire ; qu'il entrait ainsi dans le champ d'application de la disposition précitée ;

Considérant que si M. X... soutient qu'il vit habituellement en France depuis de nombreuses années, qu'une grande partie de sa famille y réside et qu'il n'a plus de liens familiaux avec la Guinée-Bissau et qu'en outre, il connaît des risques sérieux en cas de retour dans ce pays, il ne ressort pas des pièces du dossier que ses allégations soient étayées par des éléments suffisamment probants ; qu'ainsi, le préfet de police est fondé à soutenir que c'est à tort que le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé, comme entaché d'une erreur manifeste d'appréciation, son arrêté du 4 avril 2003 ordonnant la reconduite à la frontière de l'intéressé BX ;

Considérant toutefois qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les moyens soulevés par M. Y... devant le tribunal administratif de Paris et devant le Conseil d'Etat ;

Considérant qu'aux termes de l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit : (...) 3° L'étranger qui justifie, par tous moyens, résider en France habituellement depuis plus de quinze ans ainsi que l'étranger qui réside régulièrement en France depuis plus de dix ans, sauf s'il a été, pendant toute cette période, titulaire d'une carte de séjour temporaire portant la mention étudiant ;

Considérant, ainsi qu'il vient d'être dit, que si M. X... fait valoir qu'il réside habituellement sur le territoire français depuis 1990, il ne ressort pas des pièces produites que sa présence habituelle en France, à la date de l'arrêté attaqué, soit établie depuis plus de dix ans, notamment s'agissant des années 1993, 1995, 1996, 1999 et 2000 ; que par suite, le préfet n'a pas méconnu les dispositions du 3° de l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée ;

Considérant qu'aux termes de l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 susvisée : Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger, ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) ;

Considérant que si M. X... soutient que toutes ses attaches personnelles et familiales sont en France, il n'établit pas la réalité de ses allégations ; qu'ainsi, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, et eu égard aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière, l'arrêté du préfet de police en date du 4 avril 2003 n'a pas porté au droit de celui-ci au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; que, par suite, le préfet de police pouvait légalement prendre à son encontre l'arrêté attaqué sans méconnaître ni les dispositions du 7° de l'article 12 bis de l'ordonnance précitée, ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'il n'a pas non plus commis d'erreur manifeste d'appréciation des conséquences de son arrêté sur la situation personnelle de l'intéressé ;

Considérant que si l'article 12 quater de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée impose au préfet de consulter la commission du titre de séjour lorsqu'il envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour à un étranger relevant de l'une des catégories mentionnées aux articles 12 bis et 15 de cette ordonnance, il ne ressort pas des pièces du dossier que M. X... appartienne à l'une de ces catégories ; qu'il en résulte que le moyen tiré de ce que la décision du préfet de police serait irrégulière faute d'avoir été précédée de la consultation de la commission du titre de séjour, doit être écarté ;

Sur la décision distincte fixant le pays de renvoi :

Considérant que si M. X... fait état de ce qu'il est membre d'un parti politique d'opposition et qu'il craint d'être persécuté en cas de retour en Guinée-Bissau, il ne ressort toutefois pas des pièces du dossier que la réalité des risques allégués par l'intéressé soit établie ; que, par suite, le préfet de police n'a pas méconnu les dispositions de l'article 27 bis précitées ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le préfet de police est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté en date du 4 avril 2003 ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. X... et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

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Article 1er : Le jugement du président du tribunal administratif de Paris en date du 18 juin 2003 est annulé .

Article 2 : La demande présentée par M. Y... devant le tribunal administratif de Paris est rejetée.

Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DE POLICE, à M. Quetuca X... et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.


Synthèse
Formation : President de la section du contentieux
Numéro d'arrêt : 260916
Date de la décision : 22/10/2004
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 22 oct. 2004, n° 260916
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Vidal
Rapporteur public ?: M. Collin

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2004:260916.20041022
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