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25/10/2004 | FRANCE | N°254883

France | France, Conseil d'État, 3eme et 8eme sous-sections reunies, 25 octobre 2004, 254883


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 10 mars 2003 et 9 juillet 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour le COMITE REGIONAL DES PECHES MARITIMES ET DES ELEVAGES MARINS DE BASSE-NORMANDIE, représenté par son président en exercice, domicilié en cette qualité au siège du comité, 9, quai du Général Laxton Collins à Cherbourg (50104) ; le COMITE REGIONAL DES PECHES MARITIMES ET DES ELEVAGES MARINS DE BASSE-NORMANDIE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 3 décembre 2002 par lequel la cour administrat

ive d'appel de Nantes a, à la demande de M. Philippe X, annulé le jugemen...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 10 mars 2003 et 9 juillet 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour le COMITE REGIONAL DES PECHES MARITIMES ET DES ELEVAGES MARINS DE BASSE-NORMANDIE, représenté par son président en exercice, domicilié en cette qualité au siège du comité, 9, quai du Général Laxton Collins à Cherbourg (50104) ; le COMITE REGIONAL DES PECHES MARITIMES ET DES ELEVAGES MARINS DE BASSE-NORMANDIE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 3 décembre 2002 par lequel la cour administrative d'appel de Nantes a, à la demande de M. Philippe X, annulé le jugement du 5 juin 2001 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à l'annulation pour excès de pouvoir de la décision des 7 août et 1er septembre 2000 par laquelle le président du COMITE REGIONAL DES PECHES MARITIMES ET DES ELEVAGES MARINS DE BASSE- NORMANDIE a refusé de lui attribuer une licence de pêche de la coquille Saint-Jacques dans la baie de Seine au titre de la campagne 2000-2001 ;

2°) statuant au fond, de rejeter les conclusions présentées par M. X devant la cour administrative d'appel de Nantes ;

3°) de mettre à la charge de M. X une somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 91-411 du 2 mai 1991 modifiée ;

Vu le décret du 9 janvier 1852 modifié sur l'exercice de la pêche maritime ;

Vu le décret n° 90-94 du 25 janvier 1990 modifié ;

Vu le décret n° 92-335 du 30 mars 1992 modifié ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Edouard Crépey, Auditeur,

- les observations de la SCP Bachellier, Potier de la Varde, avocat du COMITE REGIONAL DES PECHES MARITIMES ET DES ELEVAGES MARINS DE BASSE-NORMANDIE et de Me Foussard, avocat de M. X,

- les conclusions de M. Emmanuel Glaser, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que les missions du comité national, des comités régionaux et des comités locaux institués par la loi du 2 mai 1991 relative à l'organisation interprofessionnelle des pêches maritimes et des élevages marins comprennent notamment, en vertu de l'article 2 de la même loi, la participation à l'organisation d'une gestion équilibrée des ressources (...) ; que l'article 22 du décret du 30 mars 1992 précise que les délibérations des comités régionaux peuvent être rendues obligatoires par l'autorité administrative lorsqu'elles sont nécessaires à la mise en oeuvre, dans leur ressort territorial, des dispositions internationales, communautaires ou nationales relatives, en particulier, à l'adaptation de l'outil de pêche à la ressource disponible par l'institution et le contingentement de licences de pêches ; qu'au nombre de ces dispositions figure l'arrêté du 13 septembre 1993 du ministre de l'agriculture et de la pêche dont l'article 1er, dans sa rédaction issue de l'arrêté du 1er août 1996, énonce que : Il peut être institué par délibération du Comité national des pêches maritimes et des élevages marins une licence pour la pêche des coquillages dans les eaux sous souveraineté ou juridiction française (...)./ La licence peut être délivrée pour une ou plusieurs espèces de coquillages./ Lorsqu'elle a été rendue obligatoire selon la procédure définie ci-après, seuls les propriétaires des navires qui en sont détenteurs sont autorisés à pratiquer la pêche des coquillages ; qu'aux termes de l'article 2 du même arrêté : Le nombre de licences, ainsi que leurs conditions d'attribution et d'utilisation (...) sont fixés par délibération du comité national des pêches maritimes et des élevages marins./ Celui-ci peut déléguer aux comités régionaux des pêches maritimes et des espaces marins l'exercice de tout ou partie de ces attributions pour les seules eaux territoriales ; que, par une délibération n° 4/98 du 17 février 1998, le Comité national des pêches maritimes et des élevages marins a créé une licence de pêche de la coquille Saint-Jacques sur les gisements classés du littoral français ; qu'aux termes de l'article 2 de cette délibération : La licence est délivrée par chaque comité régional des pêches maritimes et des élevages marins pour les gisements de sa circonscription. La licence est valable pour la durée de la campagne de pêche pour laquelle elle est délivrée, ceci dans la limite des dates d'ouverture et de fermeture propres à chacun des gisements classés ; qu'aux termes enfin de l'article 3 de la même délibération : Les comités régionaux fixent chaque année et pour chaque gisement un contingent de licences, les critères d'attribution de ces licences et les modalités pratiques d'organisation de la campagne (...) ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu'en application des dispositions précitées, le COMITE REGIONAL DES PECHES MARITIMES ET DES ELEVAGES MARINS DE BASSE-NORMANDIE a, par une délibération du 10 novembre 1999, rendue obligatoire par arrêté du préfet de la région Haute-Normandie en date du 22 novembre 1999, fixé les conditions d'attribution de la licence de pêche de la coquille Saint-Jacques dans le gisement de la baie de Seine ;

Considérant que si le COMITE REGIONAL DES PECHES MARITIMES ET DES ELEVAGES MARINS DE BASSE-NORMANDIE doit, en vertu de l'article 3 de la délibération précitée du comité national, délibérer chaque année du contingent et des critères d'attribution des licences ainsi que des modalités pratiques d'organisation de la campagne, il n'en résulte pas qu'une délibération ayant cet objet et prise avant le début d'une campagne de pêche ne puisse, lorsque le comité régional ne l'a pas modifiée, continuer à s'appliquer pour l'examen des demandes présentées au titre de la campagne suivante ;

Considérant que si les dispositions de la délibération du 10 novembre 1999 relatives à la date d'ouverture de la campagne, aux jours d'interdiction de la pêche et aux contingents accordés à chaque région s'appliquaient uniquement à la campagne 1999-2000, il en va différemment des autres dispositions de cette délibération qui sont susceptibles de recevoir application aussi longtemps qu'il n'a pas été procédé à leur abrogation ; qu'au nombre de celles-ci figure l'article 6 relatif aux conditions d'attribution des licences de pêche ;

Considérant qu'il suit de là que le président du COMITE REGIONAL DES PECHES MARITIMES ET DES ELEVAGES MARINS DE BASSE-NORMANDIE pouvait légalement se fonder sur l'article 6 de la délibération du 10 novembre 1999 pour opposer un refus à la demande d'attribution d'une licence de pêche présentée le 29 juin 2000 par M. X au titre de la campagne 2000-2001 ; que, dès lors, la cour administrative d'appel de Nantes a méconnu le champ d'application de la loi en jugeant, par l'arrêt attaqué, que la décision des 7 août et 1er septembre 2000 du comité régional par laquelle il a rejeté la demande de M. X était privée de base légale faute d'avoir été prise sur le fondement d'une délibération adoptée en 2000 ; que, par suite, et sans qu'il soit besoin d'examiner les moyens de la requête, cet arrêt doit être annulé ;

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, de régler l'affaire au fond ;

Considérant qu'aux termes du 2 de l'article 6 de la délibération du COMITE REGIONAL DES PECHES MARITIMES ET DES ELEVAGES MARINS DE BASSE-NORMANDIE en date du 10 novembre 1999 qui, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, était applicable aux faits de l'espèce : La licence de pêche de la coquille Saint-Jacques est attribuée conjointement au propriétaire titulaire d'un rôle armé à la pêche et à son navire./ Seuls sont admis les navires dont la longueur hors-tout est inférieure ou égale à 16 mètres et dont la puissance motrice est inférieure ou égale à 330 KW (450 CV) (...) ;

Considérant, d'une part, qu'il ressort des pièces du dossier et qu'il n'est pas contesté que la longueur du chalutier pour lequel M. X sollicitait une licence de pêche de la coquille Saint-Jacques atteignait 16,60 mètres ; qu'ainsi, le requérant n'est pas fondé, nonobstant la faiblesse de l'écart constaté, à soutenir que le président du COMITE REGIONAL DES PECHES MARITIMES ET DES ELEVAGES MARINS DE BASSE-NORMANDIE aurait entaché sa décision d'une erreur d'appréciation en refusant de lui attribuer une licence au motif, notamment, que la longueur de son navire excédait la limite fixée par l'article 6 précité de la délibération du 10 novembre 1999 ; que M. X ne peut utilement se prévaloir de la réglementation applicable à la date à laquelle il a acquis ledit navire ;

Considérant, d'autre part, que M. X soutient que, si les deux moteurs de son chalutier-catamaran développent une puissance théorique totale de 696 CV, leur puissance réelle devait être regardée comme inférieure au seuil de 450 CV fixé par l'article 6 de la délibération du 10 novembre 1999 du fait des particularités de ce type de navires, qui seraient nécessairement équipés de deux moteurs mais qui ne pourraient en faire usage simultanément à plein rendement ; que, toutefois, le président du COMITE REGIONAL DES PECHES MARITIMES ET DES ELEVAGES MARINS DE BASSE-NORMANDIE pouvait légalement, en l'absence de disposition spécifique applicable aux catamarans, se borner à appliquer le critère prévu à l'article 6 de ladite délibération et en déduire, sans erreur d'appréciation, que l'intéressé ne pouvait obtenir le bénéfice d'une licence de pêche ; que la circonstance, à la supposer établie, que des navires d'une puissance supérieure auraient été autorisés à participer à la pêche de la coquille Saint-Jacques dans la baie de Seine au titre de la campagne 1999-2000 est, en tout état de cause, sans incidence sur la légalité de la décision contestée ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à l'annulation pour excès de pouvoir de la décision des 7 août et 1er septembre 2000 par laquelle le président du COMITE REGIONAL DES PECHES MARITIMES ET DES ELEVAGES MARINS DE BASSE-NORMANDIE a refusé de lui attribuer une licence de pêche de la coquille Saint-Jacques dans le gisement de la baie de Seine au titre de la campagne 2000-2001 ;

Considérant enfin que M. X ne soulève aucun moyen à l'encontre du jugement attaqué en tant qu'il rejette ses conclusions subsidiaires tendant à ce que le tribunal lui accorde une telle licence à titre dérogatoire ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge du COMITE REGIONAL DES PECHES MARITIMES ET DES ELEVAGES MARINS DE BASSE-NORMANDIE, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que M. X demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. X une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par le COMITE REGIONAL DES PECHES MARITIMES ET DES ELEVAGES MARINS DE BASSE-NORMANDIE tant en appel qu'en cassation et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

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Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Nantes en date du 3 décembre 2002 est annulé.

Article 2 : Les conclusions présentées par M. X devant la cour administrative d'appel de Nantes sont rejetées.

Article 3 : M. X versera au COMITE REGIONAL DES PECHES MARITIMES ET DES ELEVAGES MARINS DE BASSE-NORMANDIE une somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions présentées par M. X au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : La présente décision sera notifiée au COMITE REGIONAL DES PECHES MARITIMES ET DES ELEVAGES MARINS DE BASSE-NORMANDIE, à M. Philippe X et au ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales.


Synthèse
Formation : 3eme et 8eme sous-sections reunies
Numéro d'arrêt : 254883
Date de la décision : 25/10/2004
Sens de l'arrêt : Satisfaction totale
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 25 oct. 2004, n° 254883
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Genevois
Rapporteur ?: M. Edouard Crépey
Rapporteur public ?: M. Glaser
Avocat(s) : SCP BACHELLIER, POTIER DE LA VARDE ; FOUSSARD

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2004:254883.20041025
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