La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

27/10/2004 | FRANCE | N°256032

France | France, Conseil d'État, 4eme sous-section jugeant seule, 27 octobre 2004, 256032


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 14 avril et 18 août 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Jean-Michel X, demeurant ... ; M. X demande que le Conseil d'Etat annule la décision du 11 février 2003 par laquelle la section des assurances sociales du conseil national de l'ordre des médecins a confirmé la sanction de l'interdiction du droit de donner des soins aux assurés sociaux pendant une durée de trois mois, avec le bénéfice du sursis, prise le 6 février 2002 par la section des assurances sociales du conseil r

égional de l'ordre des médecins d'Ile-de-France ;

Vu les autres...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 14 avril et 18 août 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Jean-Michel X, demeurant ... ; M. X demande que le Conseil d'Etat annule la décision du 11 février 2003 par laquelle la section des assurances sociales du conseil national de l'ordre des médecins a confirmé la sanction de l'interdiction du droit de donner des soins aux assurés sociaux pendant une durée de trois mois, avec le bénéfice du sursis, prise le 6 février 2002 par la section des assurances sociales du conseil régional de l'ordre des médecins d'Ile-de-France ;

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu la loi n° 2002-1062 du 6 août 2002 ;

Vu le décret n° 95-1000 du 6 septembre 1995 ;

Vu l'arrêté du 27 mars 1972 modifié fixant la nomenclature générale des actes professionnels des médecins, des chirurgiens-dentistes, des sages-femmes et des auxiliaires médicaux ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Hervé Cassagnabère, Auditeur,

- les observations de la SCP Bachellier, Potier de la Varde, avocat de M. X et de la SCP Gatineau, avocat de la caisse primaire d'assurance maladie de l'Essone,

- les conclusions de M. Rémi Keller, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que, par une décision du 11 février 2003, la section des assurances sociales du conseil national de l'ordre des médecins a infligé à M. X, psychiatre et directeur médical de la clinique Château du Bel Air à Crosne (Essonne), la sanction de l'interdiction du droit de donner des soins aux assurés sociaux pendant une durée de trois mois ; que l'intéressé se pourvoit en cassation contre cette décision ;

Sur les moyens tirés de l'inexacte application de la nomenclature générale des actes professionnels des médecins, des chirurgiens dentistes, des sages-femmes et des auxiliaires médicaux :

Considérant qu'aux termes de l'article R. 161-40 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction alors en vigueur : La constatation des soins et l'ouverture du droit au remboursement par les organismes servant les prestations en nature de l'assurance maladie sont subordonnées à la production, d'une part, de documents électroniques ou sur support papier, appelés feuilles de soins, constatant les actes effectués et les prestations servies, d'autre part, de l'ordonnance du prescripteur. Les feuilles de soins nécessaires aux actes effectués et aux prestations servies, directement liées à une hospitalisation dans un établissement de santé privé régi par les dispositions de l'article L. 710-16-2 du code de la santé publique, sont appelées bordereaux de facturation ; qu'aux termes de l'article R. 161-42 du même code alors applicable : Les rubriques de renseignements des feuilles de soins dont l'indication conditionne la constatation des soins et le droit à remboursement de l'assuré font apparaître : (...) 2° Selon que la feuille de soins est électronique ou utilise un support papier (...) pour le professionnel et, le cas échéant, l'organisme ou l'établissement ayant effectué les actes ou servi les prestations : (...) b) Lorsqu'elle utilise un support papier, les noms, prénom, adresse, identifiant et situation d'exercice (...) ; qu'aux termes de l'article 5 de la nomenclature générale des actes professionnels des médecins, des chirurgiens-dentistes, des sages-femmes et des auxiliaires médicaux annexée à l'arrêté du 27 mars 1972 : Seuls peuvent être pris en charge ou remboursés par les caisses d'assurance maladie ... a) les actes effectués personnellement par un médecin (...) ;

Considérant, en premier lieu, qu'en jugeant que le bordereau de facturation 615 transmis à la caisse primaire d'assurance maladie, lequel constitue une feuille de soins au sens des dispositions des articles R. 161-40 et R. 161-42 du code de la sécurité sociale, devait comporter les indications permettant d'identifier les noms des praticiens ayant personnellement effectués les actes médicaux susceptibles d'ouvrir droit à remboursement pour les assurés sociaux, la section des assurances sociales du conseil national de l'ordre des médecins n'a pas fait une inexacte interprétation des dispositions rappelées ci-dessus et n'a pas dénaturé les faits qui lui étaient soumis ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'en estimant que M. X avait apposé sa signature de façon systématique sur tous les bordereaux de facturation 615 concernant les patients hospitalisés, en vue de les valider sans porter aucune des indications, prévues pour ce type de document et permettant d'identifier les cas dans lesquels les actes avaient été réalisés par des praticiens autres que le signataire du bordereau, dans le but d'induire en erreur les organismes d'assurance maladie sur l'identification du praticien ayant accompli les actes, la section des assurances sociales du conseil national de l'ordre des médecins, qui a suffisamment motivé sa décision, a souverainement apprécié les faits qui lui étaient soumis, sans entacher sa décision d'inexactitude matérielle ou de dénaturation des faits ;

Considérant, enfin, que la section des assurances sociales a pu déduire de ces constatations, sans entacher sa décision d'erreur de qualification, que M. X avait méconnu les dispositions de l'article 5 de l'arrêté du 27 mars 1972 ;

Sur les moyens tirés de la méconnaissance des règles prévues par les articles 22, 83 et 87 du code de déontologie médicale :

Considérant qu'aux termes de l'article 22 du code de déontologie médicale : Tout partage d'honoraires entre médecins est interdit sous quelque forme que ce soit, hormis le cas prévu à l'article 94 (...) ; qu'aux termes de l'article 83 de ce code : (...) l'exercice habituel de la médecine, sous quelque forme que ce soit, au sein d'une entreprise, d'une collectivité ou d'une institution ressortissant au droit privé doit, dans tous les cas, faire l'objet d'un contrat écrit. (...) ; qu'aux termes de l'article 87 de ce même code : Il est interdit à un médecin d'employer pour son compte, dans l'exercice de sa profession, un autre médecin ou un étudiant en médecine./ Toutefois, le médecin peut être assisté en cas d'afflux exceptionnel de population dans une région déterminée./ Dans cette éventualité, si l'assistant est un docteur en médecine, l'autorisation fait l'objet d'une décision du conseil national de l'ordre ; s'il s'agit d'un étudiant, l'autorisation est donnée par le préfet (...) ; qu'aux termes de l'article 94 de ce code : Dans les associations de médecins et les cabinets de groupe, tout versement, acceptation ou partage de sommes d'argent entre praticiens est interdit, sauf si les médecins associés pratiquent la médecine générale, ou s'ils sont tous spécialistes de la même discipline (...) ;

Considérant que, par une appréciation souveraine qui ne repose pas sur des faits matériellement inexacts et qui est suffisamment motivée, la section des assurances sociales du conseil national de l'ordre des médecins a estimé, d'une part, que M. X avait attesté avoir personnellement accompli des actes qui avaient été effectués par d'autres praticiens et, d'autre part, qu'il avait procédé avec ces derniers à un partage d'honoraires alors qu'ils n'étaient pas associés dans les conditions prévues aux articles 83 et 94 du code de déontologie et qu'ils ne pouvaient être employés pour son compte en l'absence d'une dérogation ; qu'en déduisant de ces constatations que M. X avait méconnu les règles énoncées par les articles 22, 83 et 87 du code de déontologie rappelées ci-dessus, la section des assurances sociales n'a pas commis d'erreur de droit ;

Sur le moyen tiré de l'inexacte application de la loi d'amnistie du 6 août 2002 :

Considérant qu'en jugeant que les faits reprochés à M. X constituaient, en raison de leur gravité et de leur répétition, un manquement à la probité et à l'honneur et devaient, par suite, être exclus de la l'amnistie, la section des assurances sociales du conseil national de l'ordre des médecins a fait une exacte application des dispositions de la loi du 6 août 2002 ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu de mettre à la charge de M. X la somme de 3 050 euros demandée par la caisse primaire d'assurance maladie de l'Essonne au titre de l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de M. X est rejetée.

Article 2 : M. X versera la somme de 3 050 euros à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Essonne au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. Jean-Michel X, à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Essonne, au conseil national de l'ordre des médecins et au ministre de la santé et de la protection sociale.


Synthèse
Formation : 4eme sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 256032
Date de la décision : 27/10/2004
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 27 oct. 2004, n° 256032
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Silicani
Rapporteur ?: M. Hervé Cassagnabère
Rapporteur public ?: M. Keller
Avocat(s) : SCP BACHELLIER, POTIER DE LA VARDE ; SCP GATINEAU

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2004:256032.20041027
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award