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05/11/2004 | FRANCE | N°257878

France | France, Conseil d'État, Assemblee, 05 novembre 2004, 257878


Vu la requête, enregistrée le 20 juin 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour l'UNION NATIONALE DES SYNDICATS AUTONOMES, dont le siège est ... ; l'UNION NATIONALE DES SYNDICATS AUTONOMES demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision implicite de rejet résultant du silence gardé par le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité sur sa demande en date du 16 janvier 2003 tendant, d'une part, à sa reconnaissance comme l'une des organisations syndicales de salariés les plus représentatives au niveau

national et, en conséquence, à la modification de l'arrêté du 31 ma...

Vu la requête, enregistrée le 20 juin 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour l'UNION NATIONALE DES SYNDICATS AUTONOMES, dont le siège est ... ; l'UNION NATIONALE DES SYNDICATS AUTONOMES demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision implicite de rejet résultant du silence gardé par le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité sur sa demande en date du 16 janvier 2003 tendant, d'une part, à sa reconnaissance comme l'une des organisations syndicales de salariés les plus représentatives au niveau national et, en conséquence, à la modification de l'arrêté du 31 mars 1966 déterminant la liste de ces organisations et, d'autre part, à la modification des dispositions des articles R. 136-1 et R. 136-2 du code du travail afin de lui attribuer deux sièges au sein de la commission nationale de la négociation collective ;

2°) d'enjoindre au ministre, dans un délai de deux mois à compter de la notification de la décision à intervenir, de prendre toutes les mesures nécessaires à la reconnaissance de la représentativité du syndicat exposant et de procéder à la modification des dispositions précitées ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 6 000 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la note en délibéré, produite pour l'UNION NATIONALE DES SYNDICATS AUTONOMES ;

Vu le code du travail ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Josseline de Clausade, Conseiller d'Etat,

- les observations de la SCP Peignot, Garreau, avocat de l'UNION NATIONALE DES SYNDICATS AUTONOMES,

- les conclusions de M. Jacques-Henri Stahl, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 133-1 du code du travail : La convention de branche ou l'accord professionnel ou interprofessionnel, leurs avenants ou annexes doivent, pour pouvoir être étendus, avoir été négociés et conclus en commission composée des représentants des organisations syndicales d'employeurs et de salariés représentatives dans le champ d'application considéré. / A la demande de l'une des organisations susvisées, ou de sa propre initiative, le ministre chargé du travail peut provoquer la réunion d'une commission mixte, composée comme il est dit à l'alinéa précédent, et présidée par son représentant. Il doit convoquer cette commission lorsque deux des organisations susmentionnées en font la demande ; que, selon l'article L. 133-2 du même code : La représentativité des organisations syndicales est déterminée d'après les critères suivants : /- les effectifs ; /- l'indépendance ; / - les cotisations ; /- l'expérience et l'ancienneté du syndicat ; /- l'attitude patriotique pendant l'occupation ; qu'en vertu de l'article L. 136-1 du même code relatif à la composition de la commission nationale de la négociation collective, celle-ci comprend notamment en nombre égal, des représentants des organisations syndicales de salariés les plus représentatives au plan national, d'une part, et des représentants des organisations d'employeurs les plus représentatives au plan national, dont les représentants des agriculteurs et des artisans, et des entreprises publiques, d'autre part ; que, par un arrêté du 31 mars 1966, modifiant une précédente décision du 8 avril 1948, le Premier ministre et le ministre chargé du travail ont établi une liste de cinq organisations syndicales nationales de salariés regardées comme les plus représentatives au sens des dispositions précitées de l'article L. 133-2, ces cinq mêmes organisations disposant de sièges à la commission nationale de la négociation collective en vertu des dispositions de l'article R. 136-2 ;

Considérant que l'UNION NATIONALE DES SYNDICATS AUTONOMES (U.N.S.A.), constituée en 1993 par le regroupement de la Fédération de l'éducation nationale, de la Fédération générale autonome des fonctionnaires, de la Fédération maîtrise, cadres techniciens et agents de maîtrise de la SNCF et de la Fédération générale des salariés des organisations professionnelles de l'agriculture et de l'industrie agro-alimentaire, a demandé le 16 janvier 2003 au ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité de figurer au nombre des organisations syndicales de salariés les plus représentatives au plan national ; que, pour justifier le refus implicitement opposé à cette demande, le ministre fait valoir que les effectifs et l'audience de cette organisation ne sont pas suffisamment importants dans le secteur privé, notamment dans l'industrie et le commerce ;

Considérant qu'eu égard à l'objet des dispositions précitées du code du travail d'après lesquelles l'administration détermine si une organisation syndicale figure au nombre des organisations les plus représentatives au niveau national, il lui appartient d'apprécier cette représentativité en tenant compte du champ d'application des conventions collectives, tel qu'il est défini par ce code ; que, dans ces conditions, si le ministre soutient à bon droit que les effectifs et l'audience d'une organisation syndicale dans la fonction publique ne peuvent permettre de la regarder comme répondant à l'exigence de représentativité pour l'application des dispositions précitées du code du travail, il appartient en revanche à l'administration de prendre en compte les effectifs et l'audience de l'organisation en cause, non seulement dans le secteur privé, mais également parmi les salariés du secteur public relevant du code du travail ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que si l'U.N.S.A. revendique plus de 300 000 adhérents et si elle soutient que sa représentativité a été établie dans vingt quatre branches d'activité et serait en voie de l'être dans quatre autres branches, celles qui sont couvertes par les conventions collectives sont au nombre de 300 et l'essentiel de son implantation se situe encore dans la fonction publique ; que la progression récente de ses effectifs, marquée par les 260 000 suffrages obtenus lors des élections prud'homales du 7 décembre 2002 - contre 35 000 en 1997, soit 0,7 % - se caractérise par une audience encore trop réduite dans la majeure partie du champ ci-dessus défini ; que, dans ces conditions, le ministre n'a pas fait une inexacte application des dispositions précitées du code du travail en estimant que l'U.N.S.A. ne pouvait pas être regardée comme étant au nombre des organisations syndicales les plus représentatives au niveau national ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la requérante n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par la décision attaquée, le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité a refusé de faire droit à sa demande tendant à ce que soient modifiés l'arrêté du 31 mars 1966 déterminant la liste des organisations syndicales de salariés les plus représentatives au niveau national, ainsi que l'article R. 136-2 du code du travail relatif à la répartition des sièges au sein de la commission nationale de la négociation collective ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les conclusions à fin d'injonction ainsi que celles que la requérante a présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ;

D E C I D E :

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Article 1er : La requête de l'UNION NATIONALE DES SYNDICATS AUTONOMES est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à l'UNION NATIONALE DES SYNDICATS AUTONOMES et au ministre de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale.


Synthèse
Formation : Assemblee
Numéro d'arrêt : 257878
Date de la décision : 05/11/2004
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

PROCÉDURE - POUVOIRS ET DEVOIRS DU JUGE - CONTRÔLE DU JUGE DE L'EXCÈS DE POUVOIR - APPRÉCIATIONS SOUMISES À UN CONTRÔLE NORMAL - CARACTÈRE REPRÉSENTATIF D'UNE ORGANISATION SYNDICALE [RJ1].

54-07-02-03 Le juge exerce un contrôle normal sur l'appréciation portée par l'administration quant au caractère représentatif d'une organisation syndicale.

TRAVAIL ET EMPLOI - SYNDICATS - REPRÉSENTATIVITÉ - ORGANISATIONS SYNDICALES DE SALARIÉS LES PLUS REPRÉSENTATIVES - FIGURANT SUR LA LISTE DRESSÉE PAR L'ARRÊTÉ DU 31 MARS 1966 ET APPELÉES À SIÉGER À LA COMMISSION NATIONALE DE LA NÉGOCIATION COLLECTIVE - A) NOTION - 1) APPRÉCIATION DANS LE CHAMP D'APPLICATION DES CONVENTIONS COLLECTIVES - 2) CONTRÔLE DU JUGE - CONTRÔLE NORMAL [RJ1] - B) INCLUSION - ABSENCE - UNION NATIONALE DES SYNDICATS AUTONOMES.

66-05-01 a) 1) Eu égard à l'objet des dispositions des articles L. 133-1 et L. 133-2 du code du travail d'après lesquelles l'administration détermine si une organisation syndicale figure au nombre des organisations les plus représentatives au niveau national, il lui appartient d'apprécier cette représentativité en tenant compte du champ d'application des conventions collectives, tel qu'il est défini par ce code. Dans ces conditions, il appartient à l'administration d'apprécier le respect des critères de représentativité, et notamment de prendre en compte les effectifs et l'audience de l'organisation syndicale en cause dans le secteur privé et dans le secteur public relevant du code du travail. En revanche, les effectifs et l'audience de cette organisation dans la fonction publique ne peuvent permettre de la regarder comme répondant à l'exigence de représentativité pour l'application des dispositions du code du travail.,,2) Le juge exerce un contrôle normal sur l'appréciation portée par l'administration quant au caractère représentatif d'une organisation syndicale.,,b) Si l'U.N.S.A. revendique plus de 300 000 adhérents et si elle soutient que sa représentativité a été établie dans vingt quatre branches d'activité et serait en voie de l'être dans quatre autres branches, celles qui sont couvertes par les conventions collectives sont au nombre de 300 et l'essentiel de son implantation se situe encore dans la fonction publique. La progression récente de ses effectifs, marquée par les 260 000 suffrages obtenus lors des élections prud'homales du 7 décembre 2002 - contre 35 000 en 1997, soit 0,7 % - se caractérise par ailleurs par une audience encore trop réduite dans la majeure partie du champ ci-dessus défini. Dans ces conditions, le ministre n'a pas fait une inexacte application des dispositions des articles L. 133-1 et L. 133-2 du code du travail en estimant que l'U.N.S.A. ne pouvait être regardée comme étant au nombre des organisations syndicales les plus représentatives au niveau national.


Références :

[RJ1]

Cf. Assemblée, 17 avril 1970, Confédération française démocratique du travail et Confédération générale des syndicats indépendants, p. 263 ;

Assemblée, 21 janvier 1977, Confédération française démocratique du travail et Confédération générale du travail, p. 39.


Publications
Proposition de citation : CE, 05 nov. 2004, n° 257878
Publié au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Denoix de Saint Marc
Rapporteur ?: Mme Josseline de Clausade
Rapporteur public ?: M. Stahl
Avocat(s) : SCP PEIGNOT, GARREAU

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2004:257878.20041105
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