La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

01/12/2004 | FRANCE | N°250344

France | France, Conseil d'État, 8eme et 3eme sous-sections reunies, 01 décembre 2004, 250344


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 16 septembre 2002 et 16 janvier 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SOCIETE FRANCE TELECOM TRANSPAC, dont le siège est Tour Maine-Montparnasse (B.P. 13), ... (75755 cedex 15), représentée par son président-directeur général en exercice ; la SOCIETE FRANCE TELECOM TRANSPAC demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'article 2 de l'arrêt du 9 juillet 2002 par lequel la cour administrative d'appel de Paris, statuant sur son appel dirigé contre le jugement du 3 juillet 1

997 du tribunal administratif de Paris, en tant que celui-ci n'avait ...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 16 septembre 2002 et 16 janvier 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SOCIETE FRANCE TELECOM TRANSPAC, dont le siège est Tour Maine-Montparnasse (B.P. 13), ... (75755 cedex 15), représentée par son président-directeur général en exercice ; la SOCIETE FRANCE TELECOM TRANSPAC demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'article 2 de l'arrêt du 9 juillet 2002 par lequel la cour administrative d'appel de Paris, statuant sur son appel dirigé contre le jugement du 3 juillet 1997 du tribunal administratif de Paris, en tant que celui-ci n'avait que partiellement fait droit à sa demande en décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 1988 et 1989 ainsi que des pénalités pour abus de droit dont la cotisation de l'exercice 1989 a été assortie, et après avoir décidé qu'il n'y avait plus lieu de statuer à concurrence de la totalité des droits au titre de l'exercice 1988 et des sommes de 131 131,92 euros en droits et 691,36 euros en intérêts de retard au titre de l'exercice 1989, a rejeté le surplus des conclusions de sa requête ;

2°) statuant au fond, de lui accorder la décharge des droits et intérêts restant en litige ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 7 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, notamment son article 6 § 1 ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu la loi n° 79-594 du 13 juillet 1979 relative aux fonds communs de placement et le décret n° 83-357 du 2 mai 1983 pris pour son application ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Yohann Bénard, Auditeur,

- les observations de la SCP Delaporte, Briard, Trichet, avocat de la SOCIETE FRANCE TELECOM TRANSPAC,

- les conclusions de M. Pierre Collin, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la SOCIETE FRANCE TELECOM TRANSPAC a fait l'objet de deux vérifications de comptabilité portant respectivement, en matière d'impôt sur les sociétés, sur l'exercice clos le 31 décembre 1988 et sur les exercices clos de 1989 à 1991, à l'issue desquelles les services fiscaux lui ont notifié qu'ils réintégreraient, dans les bases de son imposition au titre des exercices 1988 et 1989 et sur le fondement de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales, d'une part, la moins-value nette dégagée par l'intéressée lors de l'achat et de la revente de parts de certains fonds communs de placement, d'autre part, le montant des crédits d'impôts détenus par la société, à la clôture de chacun de ces exercices, du fait de sa participation au capital desdits fonds ; que, s'agissant de l'exercice 1989, la SOCIETE FRANCE TELECOM TRANSPAC a ultérieurement été assujettie, du chef de ces redressements, à une cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés assortie de la majoration pour abus de droit et des intérêts de retard ; que toutefois, s'agissant de l'exercice 1988, l'administration fiscale n'a mis en recouvrement que les droits résultant de la réintégration de la moins-value susmentionnée, qu'elle n'a assortis d'aucune pénalité ni d'aucun intérêt ; que ses réclamations dirigées contre l'ensemble de ces droits et pénalités ayant été rejetées, la SOCIETE FRANCE TELECOM TRANSPAC a saisi le tribunal administratif de Paris d'une demande en décharge de la totalité des sommes ainsi mises à sa charge ; que, par un jugement du 3 juillet 1997, le tribunal a, d'une part, substitué les intérêts de retard aux pénalités établies au titre de l'exercice 1989, d'autre part, rejeté le surplus des conclusions dont il était saisi ; que la SOCIETE FRANCE TELECOM TRANSPAC a interjeté appel de ce jugement, en tant qu'il lui était défavorable, devant la cour administrative d'appel de Paris ; que cette société se pourvoit en cassation contre l'arrêt rendu le 9 juillet 2002 par la cour en tant que celle-ci, après avoir décidé n'y avoir plus lieu de statuer à concurrence des dégrèvements prononcés en cours d'instance et portant, d'une part, sur la totalité des droits supplémentaires établis au titre de l'exercice 1988, d'autre part, sur une fraction des droits et intérêts de retard que le jugement de première instance avait maintenus à sa charge au titre de l'exercice 1989, a accueilli le moyen de l'administration fiscale tiré de ce qu'une nouvelle base légale pouvait être substituée à celle initialement retenue pour fonder l'imposition restant en litige et rejeté, pour ce motif, le surplus de ses conclusions d'appel ;

Sur la régularité de l'arrêt :

Considérant, en premier lieu, que si la SOCIETE FRANCE TELECOM TRANSPAC soutient ne pas avoir été mise en mesure, au cours du débat contentieux suscité par la demande de substitution de base légale formée par l'administration, de contester les éléments d'information recueillis par les services fiscaux auprès de tiers et relatifs au montant des acomptes distribués et revenus nets encaissés par les fonds de placement susmentionnés ni d'en obtenir communication, il ressort toutefois des pièces du dossier soumis aux juges d'appel, notamment des termes mêmes du mémoire présenté par la société et enregistré le 11 mars 2002, soit avant la clôture de l'instruction, qu'à cette date, la société était informée, d'une part, de la nature et de la teneur des éléments de fait avancés par l'administration pour prouver le fonctionnement irrégulier de ces fonds, d'autre part, de ce que ces éléments avaient été recueillis auprès de tiers dans le cadre du droit de communication ; qu'ainsi, le moyen de cassation susmentionné doit être écarté comme manquant en fait ;

Considérant, en second lieu, qu'il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué que, pour juger irrégulier le fonctionnement des fonds communs de placement dont s'agit, la cour a cité les dispositions de l'article 7 du décret du 2 mai 1983 pris pour l'application de la loi du 13 juillet 1979 relative aux fonds communs de placement, aux termes desquelles les acomptes éventuellement distribués en avance des produits des actifs de l'exercice ne peuvent excéder les revenus nets encaissés, puis jugé qu'il n'était pas contesté, en l'espèce, que les acomptes distribués par les fonds en cause au titre de l'exercice 1989, étaient supérieurs aux revenus encaissés par ces fonds au cours du même exercice, du fait notamment de l'intégration, dans ces acomptes, du solde du compte de régularisation ouvert dans la comptabilité desdits fonds ; qu'en statuant ainsi, alors que la SOCIETE FRANCE TELECOM TRANSPAC s'était abstenue de contester tant les montants que les modes de calcul des acomptes et revenus nets dont l'administration fiscale soutenait qu'ils avaient été versés ou perçus par les fonds en cause et alors, au demeurant, qu'il ressortait expressément des écritures de l'administration que celle-ci avait entendu se conformer, sur ce point, aux modes de calculs retenus par la jurisprudence, la cour a suffisamment motivé son arrêt, eu égard à l'argumentation dont elle était saisie ;

Sur le bien-fondé de l'arrêt :

En ce qui concerne la substitution de base légale :

Considérant, en premier lieu, que par un motif non contesté de son arrêt, la cour a jugé que la SOCIETE FRANCE TELECOM TRANSPAC entendait notamment faire valoir, pour s'opposer à la demande de substitution de base légale formée par l'administration, qu'aucun des actes de la procédure d'imposition diligentée à son encontre ne lui avait permis de prendre connaissance, avant que les services fiscaux ne saisissent le juge de cette demande, de ce que ces services avaient exercé le droit de communication qui leur est ouvert par l'article R. 87-1 du livre des procédures fiscales ;

Considérant qu'il ressort, toutefois, des énonciations de l'arrêt attaqué que, pour écarter comme inopérant le moyen susmentionné de la SOCIETE FRANCE TELECOM TRANSPAC, la cour a notamment jugé, en premier lieu, que la base légale dont l'administration se prévalait en appel pour demander le maintien des impositions litigieuses était exclusivement constituée par l'article 199 ter A du code général des impôts, dont les dispositions s'opposent à ce que le porteur de parts d'un fonds commun de placement impute sur ses bénéfices imposables des crédits d'impôt excédant ceux auquel l'intéressé pourrait prétendre s'il percevait directement sa quote-part du produit des actifs compris dans ce fonds, et en second lieu, que les éléments d'information effectivement recueillis par l'administration fiscale auprès des gérants et dépositaires des fonds communs de placement litigieux n'étaient produits devant le juge que pour contester à la SOCIETE FRANCE TELECOM TRANSPAC le droit d'opposer aux prévisions de l'article 199 ter A les dispositions contraires contenues dans l'instruction 4-K-I-83 susmentionnée ; qu'en statuant ainsi, la cour n'a, en tout état de cause, pas commis d'erreur de droit ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'en jugeant que la SOCIETE FRANCE TELECOM TRANSPAC ne pouvait utilement invoquer l'article 6 § 1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales pour faire obstacle au maintien, sur le fondement d'une nouvelle base légale, des droits supplémentaires et intérêts de retard restant en litige, la cour n'a pas commis d'erreur de droit ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes des énonciations de l'arrêt attaqué, la SOCIETE FRANCE TELECOM TRANSPAC a également fait valoir, aux mêmes fins que les précédents moyens d'appel, qu'elle avait été privée de la possibilité de saisir la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires ; que, toutefois, en vertu de l'article L. 59 A du livre des procédures fiscales, la commission susmentionnée ne peut compétemment connaître, en matière d'impôt sur les sociétés, que des désaccords portant sur le montant du bénéfice industriel et commercial ; que, dès lors, en jugeant que le litige opposant la SOCIETE FRANCE TELECOM TRANSPAC au service et portant sur le droit à imputation, sur ce bénéfice, de certains crédits d'impôts n'entrait pas dans le champ de cet article et en jugeant, par suite, que la substitution, en cours d'instance contentieuse, de la procédure de redressement contradictoire à la procédure de répression des abus de droit initialement diligentée à l'encontre de cette société n'avait pas privé l'intéressée, dans les circonstances de l'espèce, de la possibilité de saisir ladite commission, la cour n'a pas commis d'erreur de droit ;

Considérant, en quatrième lieu, que contrairement à ce que soutient la SOCIETE FRANCE TELECOM TRANSPAC, il ne ressort pas des énonciations de l'arrêt attaqué que la cour se serait refusée à rechercher d'office si la mise en oeuvre de la procédure contradictoire nouvellement invoquée par l'administration imposait à cette dernière le respect d'autres garanties de procédure que celles dont la société contribuable soutenait expressément avoir été privée ;

En ce qui concerne la légalité du décret du 2 mai 1983 :

Considérant qu'en ne recherchant pas si l'article 7 du décret du 2 mai 1983 méconnaissait les dispositions de la loi du 13 juillet 1979, alors que la société n'avait pas excipé devant elle de cette illégalité, la cour n'a pas manqué à son office ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la requête de la SOCIETE FRANCE TELECOM TRANSPAC doit être rejetée ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que la somme que la SOCIETE FRANCE TELECOM TRANSPAC demande, au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens, soit mise à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de la SOCIETE FRANCE TELECOM TRANSPAC est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE FRANCE TELECOM TRANSPAC et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.


Synthèse
Formation : 8eme et 3eme sous-sections reunies
Numéro d'arrêt : 250344
Date de la décision : 01/12/2004
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 01 déc. 2004, n° 250344
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : Mme Hagelsteen
Rapporteur ?: M. Yohann Bénard
Rapporteur public ?: M. Collin
Avocat(s) : SCP DELAPORTE, BRIARD, TRICHET

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2004:250344.20041201
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award