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10/12/2004 | FRANCE | N°273330

France | France, Conseil d'État, 10eme et 9eme sous-sections reunies, 10 décembre 2004, 273330


Vu l'ordonnance en date du 19 octobre 2004, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 20 octobre 2004, par laquelle le président du tribunal administratif de la Polynésie française a transmis la demande présentée devant ce tribunal par M. Oscar YX ;

Vu la demande, enregistrée au greffe du tribunal administratif de la Polynésie française le 19 octobre 2004, présentée par M. Oscar YX en qualité de président de la Polynésie française démissionnaire et qui tend à l'annulation de la délibération du 9 octobre 2004 par laquelle l'assemblée de la Polyn

sie française a voté la censure du gouvernement de la Polynésie française ...

Vu l'ordonnance en date du 19 octobre 2004, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 20 octobre 2004, par laquelle le président du tribunal administratif de la Polynésie française a transmis la demande présentée devant ce tribunal par M. Oscar YX ;

Vu la demande, enregistrée au greffe du tribunal administratif de la Polynésie française le 19 octobre 2004, présentée par M. Oscar YX en qualité de président de la Polynésie française démissionnaire et qui tend à l'annulation de la délibération du 9 octobre 2004 par laquelle l'assemblée de la Polynésie française a voté la censure du gouvernement de la Polynésie française ; il soutient que la motion de censure présentée par le groupe Te Ara et adoptée par l'assemblée, qui n'était signée que par 6 représentants à l'assemblée, ne remplissait pas les conditions de recevabilité fixées par l'article 156 de la loi organique du 27 février 2004 ; que le déroulement du vote a été vicié d'une part par l'exploitation, par le groupe Tahoeraa Huiraatira, d'un incident de séance, d'autre part par l'intervention du haut-commissaire de la République ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la Constitution, notamment son article 74 ;

Vu la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 portant statut d'autonomie de la Polynésie française ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Agnès Daussun, Conseiller d'Etat,

- les observations de la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat de M. YX et de la SCP Piwnica, Molinié, avocat de M. ZY et de M. Y,

- les conclusions de M. Francis Donnat, Commissaire du gouvernement ;

Sur les conclusions aux fins de désistement de la requête présentées par M. Y en qualité de président de la Polynésie française :

Considérant que la présente requête est présentée par M. YX en qualité d'ancien président de la Polynésie française dont les fonctions ont pris fin par l'adoption d'une motion de censure et dirigée contre la délibération de l'assemblée de la Polynésie française prononçant cette censure ; qu'ainsi il n'y a pas lieu pour le Conseil d'Etat de donner acte d'un désistement de cette requête présenté par M. Y en qualité de nouveau président de la Polynésie française ;

Sur la compétence du Conseil d'Etat :

Considérant, d'une part, qu'il résulte de l'article 74 de la Constitution et des dispositions de la loi organique du 27 février 2004 que les délibérations de l'assemblée de la Polynésie française, au nombre desquelles figure celle par laquelle cette assemblée adopte, en application de l'article 156 de cette loi, une motion de censure, ont le caractère d'actes administratifs soumis au contrôle de la juridiction administrative ;

Considérant, d'autre part, que le Conseil d'Etat, compétent, en vertu de l'article 70 de la loi organique du 27 février 2004, pour connaître en premier et dernier ressort des résultats de l'élection par l'assemblée de la Polynésie française du président de la Polynésie française, est également compétent pour connaître directement de la régularité d'une motion de censure par laquelle cette assemblée met fin aux fonctions du président ;

Sur la légalité de la délibération attaquée :

Considérant que l'article 104 de la loi organique du 27 février 2004 prévoit que l'assemblée de la Polynésie française est composée de cinquante-sept membres ; que l'article 156 de cette loi dispose : L'assemblée de la Polynésie française peut mettre en cause la responsabilité du gouvernement de la Polynésie française par le vote d'une motion de censure. Celle-ci n'est recevable que si elle est signée par au moins le cinquième des représentants à l'assemblée de la Polynésie française... / Seuls sont recensés les votes favorables à la motion de censure, qui ne peut être adoptée qu'à la majorité absolue des représentants à l'assemblée de la Polynésie française... / L'adoption de la motion de censure met fin aux fonctions du gouvernement de la Polynésie française ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que deux motions de censure, rédigées en termes exactement identiques, ont été, en application de ces dispositions, présentées devant l'assemblée de la Polynésie française le 5 octobre 2004 ; que la première de ces motions, déposée à seize heures vingt-cinq par le groupe Tahoeraa Huiraatira, était signée par vingt-trois représentants à l'assemblée de la Polynésie française ; que la seconde, déposée à seize heures vingt-huit par le groupe Te Ara, n'était signée que par six représentants ; que lors de la séance du 9 octobre 2004, l'assemblée a débattu simultanément de ces deux motions ; qu'un seul vote a eu lieu, par lequel vingt-neuf représentants se sont prononcés en faveur de la motion de censure ; que, si ce vote a été présenté comme portant sur la motion déposée par le groupe Te Ara, le président de la séance a indiqué que l'adoption de cette motion rendait sans objet le vote de la motion présentée par le groupe Tahoeraa Huiraatira ; que dans ces conditions, le vote de l'assemblée, intervenu à l'issue de délibérations qui portaient sur les deux motions déposées, doit être regardé comme l'adoption d'une censure qui résultait des deux motions prises ensemble ; que, par suite, le moyen tiré de ce que l'assemblée aurait adopté une motion qui, présentée par le seul groupe Te Ara, n'aurait pas comporté le nombre minimum de signatures requis pour être recevable, doit être écarté ;

Considérant que, si la séance de l'assemblée du 8 octobre au cours de laquelle a débuté le débat sur la motion de censure a été interrompue par un incident qui a été abondamment commenté dans les médias par certains membres de l'assemblée, il ne résulte pas de l'instruction que la sincérité du scrutin, qui a eu lieu près de 24 heures après cet incident, en aurait été altérée ;

Considérant que la circonstance que le haut-commissaire de la République en Polynésie française a rappelé au président de l'assemblée de la Polynésie française par lettre du 9 octobre que le vote de la motion de censure devait avoir lieu ce jour avant minuit n'est pas de nature à entacher d'irrégularité le vote de la motion de censure ;

Considérant qu'il suit de là que M. YX n'est pas fondé, sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de la requête, à demander l'annulation de la délibération du 9 octobre 2004 par laquelle l'assemblée de la Polynésie française a adopté une motion de censure du gouvernement de la Polynésie française ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative présentées par M. ZY :

Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. YX la somme demandée par M. ZY au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de M. YX et les conclusions de M. ZY tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Oscar YX, à M. Edouard ZY, à M. Gaston Y et à la ministre de l'outre-mer.


Synthèse
Formation : 10eme et 9eme sous-sections reunies
Numéro d'arrêt : 273330
Date de la décision : 10/12/2004
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 10 déc. 2004, n° 273330
Publié au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Martin
Rapporteur ?: Mme Agnès Daussun
Rapporteur public ?: M. Donnat
Avocat(s) : SCP WAQUET, FARGE, HAZAN ; SCP PIWNICA, MOLINIE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2004:273330.20041210
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