La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

15/12/2004 | FRANCE | N°235069

France | France, Conseil d'État, 10ème et 9ème sous-sections réunies, 15 décembre 2004, 235069


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 25 juin et 25 octobre 2001 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SOCIETE DENKAVIT INTERNATIONAL BV, dont le siège social est situé 65, 3781 PV Voorthuizen (Pays-Bas), représentée par son gérant M. H-R Buys, et la SARL DENKAVIT FRANCE, dont le siège social est situé Zone industrielle de Méron, BP 9, Montreuil (49260), représentée par son gérant M. H-R Buys ; la SOCIETE DENKAVIT INTERNATIONAL BV et la SARL DENKAVIT FRANCE demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt

du 13 mars 2001 par lequel la cour administrative d'appel de Nantes, apr...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 25 juin et 25 octobre 2001 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SOCIETE DENKAVIT INTERNATIONAL BV, dont le siège social est situé 65, 3781 PV Voorthuizen (Pays-Bas), représentée par son gérant M. H-R Buys, et la SARL DENKAVIT FRANCE, dont le siège social est situé Zone industrielle de Méron, BP 9, Montreuil (49260), représentée par son gérant M. H-R Buys ; la SOCIETE DENKAVIT INTERNATIONAL BV et la SARL DENKAVIT FRANCE demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 13 mars 2001 par lequel la cour administrative d'appel de Nantes, après avoir annulé l'article 1er du jugement du 10 avril 1997 du tribunal administratif de Nantes, a remis à la charge de la SOCIETE DENKAVIT INTERNATIONAL BV la somme de 725 000 F (110 525,54 euros) dont la restitution lui avait été accordée par l'article 1er du jugement du tribunal administratif de Nantes du 10 avril 1997 ;

2°) statuant au fond, de rejeter l'appel présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie devant la cour administrative d'appel de Nantes ;

3°) d'annuler l'article 2 du jugement du tribunal administratif de Nantes rejetant leur demande tendant au paiement des intérêts moratoires ;

4°) de leur accorder le paiement des intérêts moratoires ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 20 000 F (3 049 euros) en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le traité instituant la Communauté européenne ;

Vu la convention fiscale conclue entre la France et les Pays-Bas le 16 mars 1973 ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Guillaume Larrivé, Auditeur,

- les observations de la SCP Peignot, Garreau, avocat de la SOCIETE DENKAVIT INTERNATIONAL BV et la SARL DENKAVIT FRANCE,

- les conclusions de M. Francis Donnat, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes du 2 de l'article 119 bis du code général des impôts : (...) les produits visés aux articles 108 à 117 bis donnent lieu à l'application d'une retenue à la source dont le taux est fixé par le 1 de l'article 187 lorsqu'ils bénéficient à des personnes qui n'ont pas leur domicile fiscal ou leur siège en France (...) ; qu'en vertu du 1 de l'article 187 du même code, ce taux est fixé à 25 % pour les dividendes ;

Considérant qu'aux termes de l'article 10 de la convention fiscale en date du 16 mars 1973 conclue entre la France et les Pays-Bas : 1- Les dividendes payés par une société qui est un résident de l'un des Etats à un résident de l'autre Etat sont imposables dans cet autre Etat. 2- Toutefois, ces dividendes peuvent être imposés dans l'Etat dont la société qui paie les dividendes est un résident selon la législation de cet Etat, mais l'impôt ainsi établi ne peut excéder : a) 5 % du montant brut des dividendes si le bénéficiaire est une société par actions ou à responsabilité limitée qui dispose directement d'au moins 25 % du capital de la société qui paie les dividendes (...); qu'aux termes de l'article 24 de la même convention : Il est entendu que la double imposition sera évitée de la façon suivante : A - En ce qui concerne les Pays-Bas : 1. Pour déterminer les impôts dus par leurs résidents, les Pays-Bas pourront comprendre dans la base sur laquelle ces impôts sont prélevés les éléments du revenu ou de la fortune qui, conformément aux dispositions de la présente convention, sont imposables en France (...) 3. En ce qui concerne les éléments du revenu compris dans la base imposable visée au paragraphe 1 et qui sont imposables en France en vertu des articles 10 paragraphe 2, 11 paragraphe 2, 16 et 17, les Pays-Bas accordent, sur l'impôt néerlandais ainsi calculé, une réduction égale au moins élevé des montants suivants : a) Un montant égal à l'impôt prélevé en France soit en vertu des articles 16 et 17, soit dans la limite des taux prévus aux articles 10 paragraphe 2 et 11 paragraphe 2 ; b) Un montant égal à la fraction de l'impôt néerlandais calculé suivant le paragraphe 1 du présent article, qui correspond au rapport existant entre le montant desdits éléments du revenu et le montant total du revenu qui constitue la base imposable visée audit paragraphe 1 ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société Agro Finances et la SARL DENKAVIT FRANCE, ultérieurement fusionnées au sein de la SARL DENKAVIT FRANCE, dont le capital était respectivement détenu à hauteur de 99,99 % et 50 % par la société néerlandaise DENKAVIT INTERNATIONAL BV, ont versé à celle-ci au cours des années 1987 à 1989 des dividendes d'un montant total de 14 500 000 F ; qu'en application des dispositions combinées du 2 de l'article 119 bis du code général des impôts et du paragraphe 2 de l'article 10 de la convention fiscale franco-néerlandaise, ont été prélevés, par voie de retenue à la source, 5 % du montant de ces dividendes, soit la somme totale de 725 000 F ; que les sociétés DENKAVIT FRANCE et DENKAVIT INTERNATIONAL BV se pourvoient régulièrement en cassation contre l'arrêt en date du 13 mars 2001 par lequel la cour administrative d'appel de Nantes, après avoir annulé l'article 1er du jugement du 10 avril 1997 du tribunal administratif de Nantes accordant à la SOCIETE DENKAVIT INTERNATIONAL BV la restitution du montant d'impôt retenu à la source, a remis la somme de 725 000 F à la charge de cette société ;

Considérant qu'en vertu de l'article 52 du traité CE (devenu, après modification, article 43 CE), invoqué par les sociétés requérantes, sont interdites les restrictions à la liberté d'établissement des ressortissants d'un Etat membre dans le territoire d'un autre Etat membre, cette interdiction s'étendant aux restrictions à la création d'agences, de succursales ou de filiales par les ressortissants d'un Etat membre sur le territoire d'un autre Etat membre ;

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 216 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable à la présente affaire : I. Les produits nets des participations, ouvrant droit à l'application du régime des sociétés mères et visées à l'article 145, touchés au cours d'un exercice par une société mère, sont retranchés du bénéfice net total de celle-ci, défalcation faite d'une quote-part de frais et charges. II. La quote-part de frais et charges visée au I est fixée uniformément à 5 % du produit total des participations, crédit d'impôt compris... ; qu'aux termes du 1 de l'article 145 du code général des impôts : Le régime fiscal des sociétés mères, tel qu'il est défini aux articles 146 et 216, est applicable aux sociétés et autres organismes soumis à l'impôt sur les sociétés au taux normal qui détiennent des participations satisfaisant aux conditions ci-après... ; que sont ainsi visées les sociétés qui, soit ont leur siège en France, soit, leur siège étant situé dans un autre Etat, ont en France un établissement au titre duquel elles sont soumises à l'impôt sur les sociétés ;

Considérant que la retenue à la source prévue par les dispositions précitées du 2 de l'article 119 bis du code général des impôts est supportée non par la société qui a sa résidence en France et qui procède au versement de dividendes à une société mère qui a sa résidence dans un autre Etat, mais par cette dernière ; que celle-ci supporte ainsi une retenue à la source alors qu'une société mère résidant en France peut, si elle remplit les conditions posées par l'article 145 du code général des impôts, bénéficier d'une exonération presque totale des dividendes distribués par ses filiales ; que cette différence de traitement pose notamment la question de savoir si une société mère résidant en France et une société mère résidant dans un autre Etat membre sont dans une situation objectivement comparable au regard d'un mécanisme de retenue à la source sur les dividendes ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'en vertu des stipulations précitées de l'article 24 de la convention fiscale en date du 16 mars 1973 conclue entre la France et les Pays-Bas, une société mère qui réside aux Pays-Bas et qui bénéficie de versements de dividendes de la part d'une société qui réside en France peut, en principe, procéder, dans les conditions que ces stipulations précisent, à une imputation de l'impôt supporté en application des dispositions du 2 de l'article 119 bis du code général des impôts sur le montant de l'impôt à acquitter aux Pays-Bas ; que se pose ainsi la question de savoir si le mécanisme de retenue à la source autorisé par le paragraphe 2 de l'article 10 de cette convention moyennant la fixation d'un taux plafond et l'imputation de cette retenue sur l'imposition de l'actionnaire néerlandais recevant ces dividendes peut être analysé comme un simple mode de répartition de l'imposition des dividendes entre la France et les Pays-Bas sans incidence sur la charge fiscale globale de la société mère néerlandaise et, par suite, sur la liberté d'établissement de cette société ;

Considérant, en troisième lieu, que la société qui réside aux Pays-Bas ne peut bénéficier d'une telle imputation que si l'impôt dû par elle aux Pays-Bas est supérieur à la réduction d'impôt dont elle peut se prévaloir en vertu de l'article 24 de la convention fiscale franco-néerlandaise ; qu'il y a lieu de s'interroger sur la nécessité de prendre en compte cette situation dans l'appréciation de la compatibilité de la retenue à la source avec la liberté d'établissement ;

Considérant que ces questions sont déterminantes pour la solution du litige et qu'elles présentent une difficulté sérieuse ; qu'il y a lieu, par suite, d'en saisir la Cour de justice des Communautés européennes en application de l'article 234 CE et, jusqu'à ce que celle-ci se soit prononcée, de surseoir à statuer sur la requête de la SOCIETE DENKAVIT INTERNATIONAL BV et de la SARL DENKAVIT FRANCE ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Il est sursis à statuer sur la requête de la SOCIETE DENKAVIT INTERNATIONAL BV et de la SARL DENKAVIT FRANCE jusqu'à ce que la Cour de justice des Communautés européennes se soit prononcée sur les questions préjudicielles suivantes :

1. Un dispositif qui fait supporter le poids d'une imposition à une société mère, bénéficiaire du versement de dividendes, qui ne réside pas en France, en en dispensant les sociétés mères qui résident en France, est-il susceptible d'être critiqué au regard du principe de la liberté d'établissement '

2. Un tel dispositif de retenue à la source est-il en lui-même critiquable au regard du principe de la liberté d'établissement, ou, dès lors qu'une convention fiscale entre la France et un autre Etat membre, autorisant cette retenue à la source, prévoit la possibilité d'imputer sur l'impôt dû dans cet autre Etat la charge supportée en application du dispositif critiqué, y-a-t-il lieu de tenir compte de cette convention pour apprécier la compatibilité de ce dispositif avec le principe de la liberté d'établissement '

3. Dans l'hypothèse où est retenue la seconde branche de l'alternative présentée au 2, l'existence de la convention susmentionnée suffit-elle à faire regarder le dispositif critiqué comme un simple mécanisme de répartition de la matière imposable entre les deux Etats concernés, sans incidence pour les entreprises, ou la circonstance qu'une société mère qui ne réside pas en France peut être dans l'impossibilité de procéder à l'imputation prévue par la convention doit-elle conduire à regarder ce dispositif comme méconnaissant le principe de la liberté d'établissement '

Article 2 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE DENKAVIT INTERNATIONAL BV, à la SARL DENKAVIT France, au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie et au ministre des affaires étrangères, ainsi qu'au président de la Cour de justice des Communautés européennes.


Synthèse
Formation : 10ème et 9ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 235069
Date de la décision : 15/12/2004
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES ET UNION EUROPÉENNE - APPLICATION DU DROIT COMMUNAUTAIRE PAR LE JUGE ADMINISTRATIF FRANÇAIS - RENVOI PRÉJUDICIEL À LA COUR DE JUSTICE DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES - RETENUE À LA SOURCE SUR LES DIVIDENDES VERSÉS À UNE SOCIÉTÉ MÈRE N'AYANT PAS SON SIÈGE EN FRANCE (2 DE L'ART - 119 BIS DU CGI) - COMPATIBILITÉ AVEC LA LIBERTÉ D'ÉTABLISSEMENT DÈS LORS QU'UNE SOCIÉTÉ MÈRE RÉSIDANT EN FRANCE PEUT BÉNÉFICIER D'UNE EXONÉRATION PRESQUE TOTALE DES DIVIDENDES PERÇUS - INCIDENCE SUR L'ATTEINTE ÉVENTUELLE À LA LIBERTÉ D'ÉTABLISSEMENT DE L'EXISTENCE D'UNE CONVENTION BILATÉRALE PRÉVOYANT QUE LA SOCIÉTÉ MÈRE AYANT FAIT L'OBJET DE LA RETENUE À LA SOURCE PEUT IMPUTER CET IMPÔT SUR LE MONTANT DE L'IMPÔT À ACQUITTER DANS SON PAYS DE RÉSIDENCE - INCIDENCE D'UNE ÉVENTUELLE IMPOSSIBILITÉ POUR LA SOCIÉTÉ DE PROCÉDER À CETTE IMPUTATION - QUESTIONS POSANT UNE DIFFICULTÉ SÉRIEUSE - RENVOI PRÉJUDICIEL À LA COUR DE JUSTICE DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES.

15-03-02 La retenue à la source prévue par les dispositions du 2 de l'article 119 bis du code général des impôts est supportée non par la société qui a sa résidence en France et qui procède au versement de dividendes à une société mère résidente d'un autre Etat, mais par cette dernière. Celle-ci supporte ainsi une retenue à la source alors qu'une société mère résidant en France peut, si elle remplit les conditions posées par l'article 145 du code général des impôts, bénéficier d'une exonération presque totale des dividendes distribués par ses filiales. Cette différence de traitement pose notamment la question de savoir si une société mère résidant en France et une société mère résidant dans un autre Etat membre sont dans une situation objectivement comparable au regard d'un mécanisme de retenue à la source sur les dividendes.,,En vertu des stipulations précitées de l'article 24 de la convention fiscale en date du 16 mars 1973 conclue entre la France et les Pays-Bas, une société mère résidant aux Pays-Bas et qui bénéficie de versements de dividendes de la part d'une société qui réside en France peut, en principe, procéder, dans les conditions que ces stipulations précisent, à une imputation de l'impôt supporté en application des dispositions du 2 de l'article 119 bis du code général des impôts sur le montant de l'impôt à acquitter aux Pays-Bas. Se pose ainsi la question de savoir si le mécanisme de retenue à la source autorisé par le paragraphe 2 de l'article 10 de cette convention moyennant la fixation d'un taux plafond et l'imputation de cette retenue sur l'imposition de l'actionnaire néerlandais recevant ces dividendes peut être analysé comme un simple mode de répartition de l'imposition des dividendes entre la France et les Pays-Bas sans incidence sur la charge fiscale globale de la société mère néerlandaise et, par suite, sur la liberté d'établissement de cette société.,,La société qui réside aux Pays-Bas ne peut bénéficier d'une telle imputation que si l'impôt dû par elle aux Pays-Bas est supérieur à la réduction d'impôt dont elle peut se prévaloir en vertu de l'article 24 de la convention fiscale franco-néerlandaise. Il y a lieu dès lors de s'interroger sur la nécessité de prendre en compte cette situation dans l'appréciation de la compatibilité de la retenue à la source avec la liberté d'établissement.,,Ces questions étant déterminantes pour la solution du litige et présentant une difficulté sérieuse, il y a lieu d'en saisir la Cour de justice des Communautés européennes en application de l'article 234 CE.

CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPÔTS SUR LES REVENUS ET BÉNÉFICES - RÈGLES GÉNÉRALES - IMPÔT SUR LE REVENU - COTISATIONS D'IRPP MISES À LA CHARGE DE PERSONNES MORALES OU DE TIERS - RETENUES À LA SOURCE - RETENUE À LA SOURCE SUR LES DIVIDENDES VERSÉS À UNE SOCIÉTÉ MÈRE N'AYANT PAS SON SIÈGE EN FRANCE (2 DE L'ART - 119 BIS DU CGI) - QUESTIONS POSANT UNE DIFFICULTÉ SÉRIEUSE ET JUSTIFIANT UN RENVOI PRÉJUDICIEL À LA COUR DE JUSTICES DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES - A) COMPATIBILITÉ AVEC LA LIBERTÉ D'ÉTABLISSEMENT DÈS LORS QU'UNE SOCIÉTÉ MÈRE RÉSIDANT EN FRANCE PEUT BÉNÉFICIER D'UNE EXONÉRATION PRESQUE TOTALE DES DIVIDENDES PERÇUS - B) INCIDENCE - SUR L'ATTEINTE ÉVENTUELLE À LA LIBERTÉ D'ÉTABLISSEMENT - DE L'EXISTENCE D'UNE CONVENTION BILATÉRALE PRÉVOYANT QUE LA SOCIÉTÉ MÈRE AYANT FAIT L'OBJET DE LA RETENUE À LA SOURCE PEUT IMPUTER CET IMPÔT SUR LE MONTANT DE L'IMPÔT À ACQUITTER DANS SON PAYS DE RÉSIDENCE - C) INCIDENCE D'UNE ÉVENTUELLE IMPOSSIBILITÉ POUR LA SOCIÉTÉ DE PROCÉDER À CETTE IMPUTATION.

19-04-01-02-06-01 a) La retenue à la source prévue par les dispositions du 2 de l'article 119 bis du code général des impôts est supportée non par la société qui a sa résidence en France et qui procède au versement de dividendes à une société mère résidente d'un autre Etat, mais par cette dernière. Celle-ci supporte ainsi une retenue à la source alors qu'une société mère résidant en France peut, si elle remplit les conditions posées par l'article 145 du code général des impôts, bénéficier d'une exonération presque totale des dividendes distribués par ses filiales. Cette différence de traitement pose notamment la question de savoir si une société mère résidant en France et une société mère résidant dans un autre Etat membre sont dans une situation objectivement comparable au regard d'un mécanisme de retenue à la source sur les dividendes.,,b) En vertu des stipulations précitées de l'article 24 de la convention fiscale en date du 16 mars 1973 conclue entre la France et les Pays-Bas, une société mère qui réside aux Pays-Bas et qui bénéficie de versements de dividendes de la part d'une société résidant en France peut, en principe, procéder, dans les conditions que ces stipulations précisent, à une imputation de l'impôt supporté en application des dispositions du 2 de l'article 119 bis du code général des impôts sur le montant de l'impôt à acquitter aux Pays-Bas. Se pose ainsi la question de savoir si le mécanisme de retenue à la source autorisé par le paragraphe 2 de l'article 10 de cette convention moyennant la fixation d'un taux plafond et l'imputation de cette retenue sur l'imposition de l'actionnaire néerlandais recevant ces dividendes peut être analysé comme un simple mode de répartition de l'imposition des dividendes entre la France et les Pays-Bas sans incidence sur la charge fiscale globale de la société mère néerlandaise et, par suite, sur la liberté d'établissement de cette société.,,c) La société qui réside aux Pays-Bas ne peut bénéficier d'une telle imputation que si l'impôt dû par elle aux Pays-Bas est supérieur à la réduction d'impôt dont elle peut se prévaloir en vertu de l'article 24 de la convention fiscale franco-néerlandaise. Il y a lieu dès lors de s'interroger sur la nécessité de prendre en compte cette situation dans l'appréciation de la compatibilité de la retenue à la source avec la liberté d'établissement.,,Ces questions étant déterminantes pour la solution du litige et présentant une difficulté sérieuse, il y a lieu d'en saisir la Cour de justice des Communautés européennes en application de l'article 234 CE.


Publications
Proposition de citation : CE, 15 déc. 2004, n° 235069
Publié au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Martin
Rapporteur ?: M. Guillaume Larrivé
Rapporteur public ?: Mme Boissard Sophie
Avocat(s) : SCP PEIGNOT, GARREAU

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2004:235069.20041215
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award