Vu la requête, enregistrée le 21 avril 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Abderrahmane X, demeurant ... ; M. X demande au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat :
1°)' d'annuler le jugement du 19 mars 2004 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 10 mars 2004 du préfet du Puy-de-Dôme ordonnant sa reconduite à la frontière ;
2°)' d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- les conclusions de Mme Marie-Hélène Mitjavile, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : I. - Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (...) 3° Si l'étranger, auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait (...) ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X, de nationalité marocaine, s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 13 septembre 2003, de la décision du 5 septembre 2003 du préfet du Puy-de-Dôme lui refusant un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire ; qu'il était ainsi dans le cas prévu par les dispositions précitées de l'ordonnance du 2 novembre 1945 où le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X vit maritalement avec une personne de nationalité française, qu'il est le père d'un enfant français né le 20 janvier 2003, qu'il contribue effectivement à l'entretien et à l'éducation de cet enfant et que la présence de l'intéressé auprès de sa compagne est indispensable à l'équilibre familial, compte tenu de l'état de santé de cette dernière ; que, dans ces conditions, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, l'arrêté du préfet du Puy-de-Dôme en date du 10 mars 2004 ordonnant la reconduite à la frontière de M. X a porté à son droit au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; qu'il a par suite méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 10 mars 2004 par lequel le préfet du Puy-de-Dôme a ordonné sa reconduite à la frontière ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2000 euros que M. X demande au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
D E C I D E :
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Article 1er : Le jugement du 19 mars 2004 du magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Clermont-Ferrand et l'arrêté du 10 mars 2004 du préfet du Puy-de-Dôme ordonnant la reconduite à la frontière de M. X sont annulés.
Article 2 : L'Etat versera à M. X la somme de 2000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. Abderrahmane X, au préfet du Puy-de-Dôme et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.