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29/12/2004 | FRANCE | N°267094

France | France, Conseil d'État, 4eme sous-section jugeant seule, 29 décembre 2004, 267094


Vu l'ordonnance du 29 avril 2004, enregistrée le 30 avril 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, par laquelle le président du tribunal administratif de Grenoble transmet au Conseil d'Etat, en application des articles R. 351-3 et R. 331-1 du code de justice administrative, la demande présentée par M. Jean X ;

Vu la demande, enregistrée le 7 avril 2004 au greffe du tribunal administratif de Grenoble, présentée par M. Jean X, demeurant ... ; M. X demande au juge administratif :

1°) d'annuler la décision en date du 18 mars 2004 par laquelle le ministre de la

jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche a rejeté sa dem...

Vu l'ordonnance du 29 avril 2004, enregistrée le 30 avril 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, par laquelle le président du tribunal administratif de Grenoble transmet au Conseil d'Etat, en application des articles R. 351-3 et R. 331-1 du code de justice administrative, la demande présentée par M. Jean X ;

Vu la demande, enregistrée le 7 avril 2004 au greffe du tribunal administratif de Grenoble, présentée par M. Jean X, demeurant ... ; M. X demande au juge administratif :

1°) d'annuler la décision en date du 18 mars 2004 par laquelle le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche a rejeté sa demande d'admission à la retraite avec jouissance immédiate d'une pension à compter du 31 décembre 2004 au titre de l'article L. 24 du code des pensions civiles et militaires de retraite ;

2°) d'enjoindre au ministre de lui accorder le bénéfice du départ à la retraite anticipée avec jouissance immédiate à la date du 31 décembre 2004 ainsi que de lui accorder le bénéfice des bonifications d'ancienneté prévues à l'article L. 12 du code de pensions civiles et militaires de retraite ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le Traité de Rome instituant la Communauté économique européenne devenue la Communauté européenne ;

Vu le code des pensions civiles et militaires de retraite ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Yves Struillou, Maître des Requêtes,

- les conclusions de Mme Anne-Françoise Roul, Commissaire du gouvernement ;

Sur les conclusions relatives à la jouissance immédiate de la pension :

Considérant qu'aux termes de l'article 141 du traité instituant la Communauté européenne : 1. Chaque Etat membre assure l'application du principe de l'égalité des rémunérations entre travailleurs masculins et travailleurs féminins pour un même travail ou un travail de même valeur. 2. Aux fins du présent article, on entend par rémunération, le salaire ou traitement ordinaire de base ou minimum, et tous autres avantages payés directement ou indirectement, en espèces ou en nature, par l'employeur au travailleur en raison de l'emploi de ce dernier. L'égalité de rémunération, sans discrimination fondée sur le sexe, implique : a) que la rémunération accordée pour un même travail payé à la tâche soit établie sur la base d'une même unité de mesure ; b) que la rémunération accordée pour un travail payé au temps soit la même pour un même poste de travail ; que les pensions servies par le régime français de retraite des fonctionnaires entrent dans le champ d'application de ces stipulations ; que le principe de l'égalité des rémunérations s'oppose à ce que la jouissance immédiate d'une pension de retraite, accordée aux personnes qui ont assuré l'éducation de trois enfants au moins, soit réservée aux femmes, alors que les hommes ayant assuré l'éducation de trois enfants au moins seraient exclus du bénéfice de cette mesure ;

Considérant que le a) du 3° du I de l'article L. 24 du code des pensions civiles et militaires de retraite institue la jouissance immédiate de la pension et en réserve le bénéfice aux femmes fonctionnaires lorsqu'elles sont mères de trois enfants vivants ou décédés par faits de guerre ou les ont élevés pendant au moins neuf ans ; qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que de telles dispositions sont incompatibles avec le principe d'égalité des rémunérations tel qu'il est affirmé par le traité instituant la Communauté européenne ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la décision du 18 mars 2004 par laquelle le ministre de la jeunesse, de l'éducation et de la recherche a refusé à M. X le bénéfice de la jouissance immédiate de la pension, prévue par ces textes, à compter du 31 décembre 2004 alors même qu'il aurait assuré l'éducation de ses enfants, est entachée, sur ce point, d'illégalité ; que, dès lors, M. X est fondé à en demander l'annulation ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. X a assuré la charge de quatre enfants ; que, dans la mesure où sont maintenues des dispositions plus favorables aux fonctionnaires de sexe féminin ayant assuré l'éducation de leurs enfants, en ce qui concerne la jouissance immédiate de la pension, M. X a droit, ainsi qu'il a été dit plus haut, à la jouissance immédiate de sa pension, prévue au a) du 3º du I de l'article L. 24 du code des pensions civiles et militaires de retraite ; qu'il y a lieu, dès lors, de prescrire au ministre de la jeunesse, de l'éducation et de la recherche, en application de l'article L. 911-1 du code de justice administrative, d'admettre M. X, dans les deux mois suivant la notification de la présente décision, au bénéfice de la jouissance immédiate de sa pension à compter du 31 décembre 2004 ;

Considérant que la décision attaquée du ministre de la jeunesse, de l'éducation et de la recherche en date du 18 mars 2004, qui refuse à M. X le bénéfice d'un départ à la retraite à compter du 31 décembre 2004 avec entrée en jouissance immédiate, ne préjuge pas des bases sur lesquelles, le moment venu, la pension civile de retraite de l'intéressé sera liquidée ; que c'est seulement à l'occasion de cette liquidation que l'intéressé sera recevable à faire valoir les droits qu'il estimerait être les siens ; qu'ainsi, la demande de l'intéressé, tendant à ce que qu'il soit enjoint au ministre de prendre en compte dans les bases de liquidation de cette pension la bonification mentionnée au b) de l'article L. 12 du code des pensions civiles et militaires de retraite, est en tout état de cause prématurée et, par suite, irrecevable ; qu'elle ne peut, dès lors, qu'être rejetée ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La décision du ministre de la jeunesse, de l'éducation et de la recherche en date du 18 mars 2004 est annulée.

Article 2 : Le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche accordera à M. X, dans le délai de deux mois suivant la notification de la présente décision, le bénéfice d'une pension de retraite, à compter du 31 décembre 2004, avec jouissance immédiate.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. X est rejeté.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. Jean X et au ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.


Synthèse
Formation : 4eme sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 267094
Date de la décision : 29/12/2004
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 29 déc. 2004, n° 267094
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Silicani
Rapporteur ?: M. Yves Struillou
Rapporteur public ?: Mme Roul

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2004:267094.20041229
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