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10/01/2005 | FRANCE | N°260217

France | France, Conseil d'État, 6eme et 1ere sous-sections reunies, 10 janvier 2005, 260217


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 12 septembre 2003 et 9 janvier 2004 au secrétariat du contentieux du conseil d'Etat, présentés pour la SCP MILLON et ROBERT, dont le siège est ... ; la SCP MILLON et ROBERT demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision du 9 juillet 2003 par laquelle la Commission nationale d'indemnisation des commissaires priseurs lui a attribué une somme de 1 018 582,62 euros, au titre de l'indemnisation de la dépréciation de la valeur pécuniaire du droit de présentation des commissaires-priseurs prévue par la

loi du 10 juillet 2000 ;

2°) de fixer le montant de cette indemnité ...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 12 septembre 2003 et 9 janvier 2004 au secrétariat du contentieux du conseil d'Etat, présentés pour la SCP MILLON et ROBERT, dont le siège est ... ; la SCP MILLON et ROBERT demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision du 9 juillet 2003 par laquelle la Commission nationale d'indemnisation des commissaires priseurs lui a attribué une somme de 1 018 582,62 euros, au titre de l'indemnisation de la dépréciation de la valeur pécuniaire du droit de présentation des commissaires-priseurs prévue par la loi du 10 juillet 2000 ;

2°) de fixer le montant de cette indemnité à 1 341 606,84 euros, assortis des intérêts légaux ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 2000-642 du 10 juillet 2000 ;

Vu le décret n° 2001-652 du 19 juillet 2001 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Olivier Henrard, Auditeur,

- les observations de la SCP de Chaisemartin, Courjon, avocat de la SCP MILLON ET ROBERT,

- les conclusions de M. Yann Aguila, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que la loi du 10 juillet 2000 a supprimé le monopole des commissaires-priseurs dans le domaine des ventes volontaires de meubles aux enchères publiques ; qu'elle a prévu d'indemniser les commissaires-priseurs du préjudice subi à raison de la dépréciation de la valeur pécuniaire de leur droit, garanti par l'article 91 de la loi du 28 avril 1816 sur les finances, de présenter leur successeur au garde des sceaux ; que le montant de l'indemnité due à ce titre au commissaire-priseur qui en fait la demande est fixé à partir de la valeur de son office limitée à l'activité des ventes volontaires, calculée en vertu de l'article 39 de la loi - en prenant pour base la somme de la recette nette moyenne au cours des cinq derniers exercices dont les résultats seraient connus de l'administration fiscale à la date de la promulgation de la loi et de trois fois le solde moyen d'exploitation de l'office au cours des mêmes exercices ;/ - en affectant cette somme d'un coefficient de 0,5 pour les offices du ressort des compagnies de commissaires-priseurs autres que celle de Paris et de 0,6 pour les offices du ressort de la compagnie des commissaires-priseurs de Paris ;/ - en ajoutant à ce résultat la valeur nette des immobilisations corporelles, autres que les immeubles, inscrite au bilan du dernier exercice clos à la date d'entrée en vigueur de la présente loi ;/ - en multipliant le total ainsi obtenu par le rapport du chiffre d'affaires moyen de l'office correspondant aux ventes volontaires au cours des cinq derniers exercices dont les résultats seraient connus de l'administration fiscale à la date de la promulgation de la présente loi sur le chiffre d'affaires global moyen de l'office au cours des mêmes exercices./ La recette nette est égale à la recette encaissée par l'office, retenue pour le calcul de l'imposition des bénéfices, diminuée des débours payés pour le compte des clients et des honoraires rétrocédés./ Le solde d'exploitation est égal aux recettes totales retenues pour le calcul de l'imposition des bénéfices, augmentées des frais financiers et des pertes diverses et diminuées du montant des produits financiers, des gains divers et de l'ensemble des dépenses nécessitées pour l'exercice de la profession, telles que retenues pour le calcul de l'imposition des bénéfices en application des articles 93 et 93 A du code général des impôts./ Les données utilisées sont celles qui figurent sur la déclaration fiscale annuelle et dans la comptabilité de l'office ; que le préjudice subi du fait de la dépréciation de la valeur pécuniaire du droit de présentation est fixé à 50 % de la valeur ainsi déterminée ; que toutefois, l'indemnisation correspondante peut être augmentée ou diminuée de 20 % au plus par la commission prévue à l'article 45 de la loi, en fonction de la situation particulière de chaque office et de son titulaire ;

Considérant que la Commission nationale d'indemnisation des commissaires priseurs a attribué une indemnité de 1 018 582,62 euros à la SCP MILLON ET ROBERT, par une décision du 9 juillet 2003 dont celle-ci demande la réformation au Conseil d'Etat ;

Sur la régularité de la décision attaquée :

Considérant que la procédure suivie devant la Commission nationale d'indemnisation des commissaires-priseurs a respecté l'article 6 du décret du 19 juillet 2001 qui prévoit, d'une part, que les personnes ayant présenté une demande d'indemnisation sont avisées de la date à laquelle il est prévu d'examiner leur dossier, d'autre part, que la Commission les entend à leur demande ou d'office ; qu'aucune autre disposition ni aucun principe général de procédure n'obligeait la Commission, contrairement à ce que soutient la SCP MILLON ET ROBERT, à élaborer, avant cette audition, un projet de décision destiné à faire l'objet d'une communication préalable aux intéressés ; qu'il suit de là que la SCP MILLON ET ROBERT n'est pas fondée à soutenir que la Commission aurait ainsi méconnu le principe du caractère contradictoire de la procédure et entaché sa décision d'un vice de procédure de nature à en affecter la légalité ;

Considérant que la décision attaquée, qui comporte l'énoncé des considérations de fait et de droit sur lesquelles elle est fondée et, notamment, le contenu donné par la Commission nationale d'indemnisation à la notion de débours au sens de l'article 39 de la loi du 10 juillet 2000, est suffisamment motivée et que le moyen doit être écarté ;

Sur le montant de la recette nette :

Considérant qu'il résulte de l'article 39 précité de la loi du 10 juillet 2000 que la recette nette prise en compte dans le calcul de la valeur de l'office est obtenue en déduisant des recettes encaissées, notamment, les débours payés pour le compte de ses clients ;

Considérant que lorsqu'elle détermine la valeur d'un office de commissaire-priseur au sens et pour l'application de la loi du 10 juillet 2000, la Commission nationale d'indemnisation des commissaires-priseurs n'est pas tenue par la définition donnée, dans le cadre d'autres législations, des termes employés à l'article 39 de cette loi ; qu'il suit de là que la SCP MILLON ET ROBERT n'est pas fondée à soutenir que la seule définition des débours à prendre en compte serait celle donnée pour l'application de la loi fiscale ; qu'ont le caractère de débours, au sens de l'article 39 de la loi du 10 juillet 2000, les frais exposés par un commissaire-priseur pour le compte de ses clients et qui font, de leur part, l'objet d'un reversement, que celui-ci soit ou non forfaitaire ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que les sommes exposées par la SCP MILLON ET ROBERT, entre 1995 et 1999, en matière de publicité, de transport, de manutention, de magasinage et de frais divers de vente, qui n'ont pas été mentionnées dans ses déclarations à l'administration fiscale au titre des exercices concernés, ont fait l'objet d'un remboursement à l'office de la part de ses clients acheteurs ou vendeurs ; que, dès lors, la Commission nationale d'indemnisation des commissaires-priseurs a exactement appliqué la loi en qualifiant ces frais de débours et en refusant, par voie de conséquence, de faire droit à la demande de la SCP MILLON ET ROBERT tendant à réintégrer dans le calcul de la recette nette les sommes remboursées par les clients de l'office après que celui-ci les eût exposées dans leur intérêt ;

Considérant que, dès lors que la définition conférée par la Commission nationale d'indemnisation à la notion de débours est conforme à l'article 39 de la loi du 10 juillet 2000, la SCP MILLON ET ROBERT ne peut utilement exciper, à l'encontre de la décision contestée, de la rupture d'égalité entre offices de commissaires-priseurs qu'entraînerait la mise en oeuvre de cette définition ;

Sur l'application de la majoration prévue à l'article 40 de la loi :

Considérant que la SCP MILLON ET ROBERT n'apporte, à l'appui de ses allégations, aucun élément de nature à établir qu'elle se trouverait dans une situation particulière au sens de l'article 40 de la loi, de nature à justifier une majoration de l'indemnité attribuée ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SCP MILLON ET ROBERT n'est pas fondée à contester le montant de l'indemnité fixé par la décision du 9 juillet 2003 de la Commission nationale d'indemnisation des commissaires-priseurs ;

Sur l'octroi d'intérêts au taux légal sur l'indemnité accordée par la commission :

Considérant qu'en vertu de l'article 43 de la loi du 10 juillet 2000 : La demande d'indemnité doit être présentée par les commissaires-priseurs dans le délai de deux ans à compter de la publication du décret en Conseil d'Etat prévu à l'article 66. L'indemnité est versée dans les six mois suivant le dépôt de la demande ; qu'il résulte de l'instruction que la SCP MILLON ET ROBERT a déposé sa demande d'indemnisation le 9 décembre 2002 et que la Commission nationale d'indemnisation des commissaires-priseurs était tenue par la loi de statuer et de procéder au versement de l'indemnité allouée avant le 9 juin 2003 ; que l'indemnité n'a été versée à la requérante que le 23 juillet 2003 ; qu'il suit de là qu'il y a lieu de faire droit aux conclusions de la requête, tendant à ce que l'indemnité fixée par la Commission nationale porte intérêts au taux légal pour la période comprise entre le 10 juin et le 23 juillet 2003 ;

D E C I D E :

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Article 1er : L'indemnité de 1 018 582,62 euros attribuée par la Commission nationale d'indemnisation des commissaires-priseurs à la SCP MILLON ET ROBERT portera intérêts au taux légal pour la période comprise entre le 10 juin et le 23 juillet 2003.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de la SCP MILLON ET ROBERT est rejeté.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à la SCP MILLON ET ROBERT, à la Commission nationale d'indemnisation des commissaires-priseurs, au garde des sceaux, ministre de la justice et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.


Synthèse
Formation : 6eme et 1ere sous-sections reunies
Numéro d'arrêt : 260217
Date de la décision : 10/01/2005
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 10 jan. 2005, n° 260217
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Martin
Rapporteur ?: M. Olivier Henrard
Rapporteur public ?: M. Aguila
Avocat(s) : SCP DE CHAISEMARTIN, COURJON

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2005:260217.20050110
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