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14/01/2005 | FRANCE | N°268366

France | France, Conseil d'État, 2eme et 7eme sous-sections reunies, 14 janvier 2005, 268366


Vu la requête, enregistrée le 4 juin 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Noël Y, demeurant ... ; M. Y demande que le Conseil d'Etat :

1°) annule le jugement du 6 mai 2004 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a, sur la protestation de M. Philippe X, annulé son élection en qualité de conseiller général lors des opérations électorales qui se sont déroulées le 28 mars 2004 dans le canton de Craonne (Aisne) ;

2°) rejette la protestation de M. X ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code électoral ;
>Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport...

Vu la requête, enregistrée le 4 juin 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Noël Y, demeurant ... ; M. Y demande que le Conseil d'Etat :

1°) annule le jugement du 6 mai 2004 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a, sur la protestation de M. Philippe X, annulé son élection en qualité de conseiller général lors des opérations électorales qui se sont déroulées le 28 mars 2004 dans le canton de Craonne (Aisne) ;

2°) rejette la protestation de M. X ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code électoral ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mlle Sophie Liéber, Auditeur,

- les observations de la SCP Vier, Barthélemy, avocat de M. X,

- les conclusions de Mme Isabelle de Silva, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que la diffusion, l'avant-veille du scrutin, auprès d'un nombre limité d'électeurs du canton, d'une lettre du député de la circonscription invitant à voter pour M. Y et indiquant notamment que son adversaire, M. Philippe X, proposait de faciliter le recrutement de tous ceux qui espèrent travailler au Center Parcs, alors que cette responsabilité est de la compétence du président du conseil général qui soutient Noël Y , qui se bornait ainsi à répondre à un argument développé par M. X au cours de la campagne électorale et qui n'excédait ni par son ton ni par son contenu les limites de la polémique électorale, n'a pas constitué une manoeuvre de nature à altérer la sincérité du scrutin, malgré l'écart d'une voix séparant M. Y de son concurrent ; qu'ainsi, c'est à tort que le tribunal administratif d'Amiens s'est fondé sur ce grief pour annuler les opérations électorales du 28 mars 2004 ;

Considérant qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres griefs invoqués dans la protestation de M. X ;

Considérant que, si dans la commune de Saint-Thomas, qui comporte 69 électeurs inscrits, les bureaux de vote des élections cantonales et régionales se trouvaient dans la même pièce avec un seul isoloir, alors que la mairie disposait d'une pièce supplémentaire inoccupée, et si les tables sur lesquelles étaient posées les urnes se trouvaient face à face et n'étaient séparées que de 1,5 mètre, il n'est pas établi que ces circonstances aient porté atteinte à la sincérité du scrutin ;

Considérant que, si M. X soutient, sans être contredit, que dans cette même commune, les clés sont restées toute la matinée du scrutin sur les urnes, puis, suite à ses remarques, ont été posées sur les tables sans que les urnes soient fermées à clé, cette irrégularité, en l'absence de fraude ou d'atteinte au secret du vote, qui ne sont pas même alléguées, n'est pas de nature à entraîner l'annulation de l'élection ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 62 du code électoral : Sans quitter la salle de scrutin, l'électeur doit se rendre isolément dans la partie de la salle aménagée pour le soustraire aux regards pendant qu'il met son bulletin dans l'enveloppe (...) ; que l'article L. 64 du même code dispose : Tout électeur atteint d'infirmité certaine et le mettant dans l'impossibilité d'introduire son bulletin dans l'enveloppe et de glisser celle-ci dans l'urne, ou de faire fonctionner la machine à voter, est autorisé à se faire assister par un électeur de son choix (...) ;

Considérant qu'il n'est pas contesté que, dans la commune de Corbeny, une électrice a pris part au vote sans passer par l'isoloir ; que, si cette dernière fait valoir que le passage par l'isoloir lui est pénible compte tenu du handicap dont elle souffre, il n'est pas établi ni même allégué qu'elle aurait été dans l'impossibilité de respecter cette formalité ; que, par ailleurs, elle n'a pas recouru, comme elle en avait la possibilité, à l'assistance d'un autre électeur ; que, dès lors, et alors même qu'elle a pris soin de ne pas faire apparaître le sens de son vote avant de déposer le bulletin dans l'urne, ce vote présente un caractère irrégulier ; qu'il doit être annulé et retranché des voix obtenues par le candidat proclamé élu, M. Y, lequel obtient ainsi le même nombre de voix que M. X ; que cette déduction demeure toutefois sans effet sur le résultat de l'élection, dès lors que M. Y, plus âgé que M. X, demeure élu en vertu du deuxième alinéa de l'article L. 193 du code électoral ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. Y est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a annulé son élection en qualité de conseiller général du canton de Craonne ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de M. Y la somme de 2 000 euros que demande M. X au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif d'Amiens en date du 6 mai 2004 est annulé.

Article 2 : La protestation de M. X devant le tribunal administratif d'Amiens est rejetée.

Article 3 : Les conclusions présentées par M. X devant le Conseil d'Etat et tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. Noël Y, à M. Philippe X et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.


Sens de l'arrêt : Satisfaction totale
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 14 jan. 2005, n° 268366
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : Mme Hagelsteen
Rapporteur ?: Mlle Sophie Liéber
Rapporteur public ?: Mme de Silva
Avocat(s) : SCP VIER, BARTHELEMY

Origine de la décision
Formation : 2eme et 7eme sous-sections reunies
Date de la décision : 14/01/2005
Date de l'import : 04/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 268366
Numéro NOR : CETATEXT000008160183 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2005-01-14;268366 ?
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