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20/01/2005 | FRANCE | N°276475

France | France, Conseil d'État, Juge des referes, 20 janvier 2005, 276475


Vu la requête, enregistrée le 12 janvier 2005 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour la COMMUNE DE SAINT-CYPRIEN (66750), représentée par son maire, domicilié en cette qualité, en mairie, Place Desnoyer ; la COMMUNE DE SAINT-CYPRIEN demande au juge des référés du Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance en date du 24 décembre 2004 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Montpellier, statuant sur le fondement de l'article L. 521 ;2 du code de justice administrative a, d'une part, suspendu l'exécution des décisions prise

s par son maire visant à l'expulsion de M. Bruno X du bâtiment dit « Dis...

Vu la requête, enregistrée le 12 janvier 2005 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour la COMMUNE DE SAINT-CYPRIEN (66750), représentée par son maire, domicilié en cette qualité, en mairie, Place Desnoyer ; la COMMUNE DE SAINT-CYPRIEN demande au juge des référés du Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance en date du 24 décembre 2004 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Montpellier, statuant sur le fondement de l'article L. 521 ;2 du code de justice administrative a, d'une part, suspendu l'exécution des décisions prises par son maire visant à l'expulsion de M. Bruno X du bâtiment dit « Discothèque Le Bill Board » et à la démolition de celui-ci et, d'autre part, l'a condamnée à verser au demandeur en première instance la somme de 1 000 euros par application des dispositions de l'article L. 761-1 du code précité ;

2°) de rejeter la requête présentée en premier ressort par M. X ;

3°) de condamner M. X à lui verser la somme de 4 000 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

elle expose qu'en bordure de plage se trouve un bâtiment, exploité jusqu'en 1995 par M. X, en tant que bar-discothèque et dénommé « Le Bill Board » ; que des poursuites en contravention de grande voirie ont été engagées à l'encontre de M. X tendant à ce que soit ordonnée la démolition de ce bâtiment, sans aboutir au motif que, comme l'a jugé la Cour administrative d'appel de Marseille par un arrêt du 10 février 1998, le terrain d'assiette de la discothèque avait cessé d'appartenir au domaine public maritime naturel et que l'ordonnance sur la marine d'août 1681 ne pouvait ainsi fonder la poursuite non plus qu'aucun autre texte ; que le pourvoi en cassation formé contre cet arrêt a été rejeté par une décision du Conseil d'Etat statuant au contentieux du 27 mars 2000 ; qu'entre-temps, un arrêté municipal en date du 27 mars 1995 avait ordonné la fermeture de la discothèque sur le fondement de la réglementation des établissements recevant du public ; que la commune exposante est devenue propriétaire du terrain d'assiette par acte de cession passé avec l'Etat le 27 août 2004 ; qu'estimant être légalement propriétaire du bâtiment qui y est édifié, le maire a par lettre du 6 décembre 2004 fait savoir à M. X que ce bâtiment serait démoli d'ici le 15 janvier 2005 et a enjoint à l'intéressé de procéder à l'enlèvement des meubles lui appartenant, tout en spécifiant qu'il serait procédé à « une expertise par huissier » ; que, saisi par M. X le juge des référés du tribunal administratif de Montpellier, qui a interprété la lettre du 6 décembre 2004 comme visant à l'expulsion de M. X et à la démolition du bâtiment, a par une ordonnance du 24 décembre 2004, suspendu cette double décision ; que, contrairement à ce qu'a estimé le premier juge, la juridiction administrative n'est pas compétente pour connaître d'une contestation relative à la gestion du domaine privé de la commune ; que subsidiairement, le magistrat délégué qui a rendu l'ordonnance attaquée ne remplissait pas les conditions exigées par l'article L. 511-2 du code de justice administrative pour remplir les fonctions de juge des référés dès lors qu'il n'a pas le grade de premier conseiller et qu'il n'est pas établi que les magistrats remplissant les conditions de grade et d'ancienneté requises par la loi, ayant été désignés comme juge des référés, étaient empêchés ; qu'à titre très subsidiaire, il y a lieu de relever que le juge des référés a excédé ses pouvoirs en fondant la mesure de suspension sur l'atteinte à la liberté fondamentale que serait « le droit d'accès au juge », alors que ce moyen n'avait pas été invoqué devant lui ; que l'ordonnance est insuffisamment motivée dès lors, que le juge des référés s'est abstenu d'une part, d'apprécier l'urgence au regard de la décision « d'expulsion » dont l'exécution a été suspendue et, d'autre part, de statuer sur les arguments invoqués en défense pour critiquer l'urgence ; qu'en tout état de cause, la mesure de suspension ordonnée en vertu de l'article L. 521-2 du code de justice administrative n'est pas fondée ; que, tout d'abord, il n'est pas satisfait à la condition d'urgence eu égard à la double circonstance que la discothèque est fermée depuis 1995 et que le bâtiment n'est plus à la disposition de M. X depuis, au plus tard, le mois de juin 2004 ; que la lettre du 6 décembre 2004 ne porte atteinte à aucune liberté fondamentale ; que le juge des référés a écarté toute atteinte grave et manifestement illégale au droit de propriété et à la liberté du commerce et de l'industrie ; que le droit d'accès au juge n'est pas une liberté fondamentale sauf à ériger toutes les garanties formelles ou processuelles en droit ou liberté fondamentale ; qu'en admettant même que la loi n° 91-650 du 9 juillet 1991 portant réforme des procédures civiles d'exécution limite l'action d'office de l'administration, les règles posées par la loi organisent la protection de la propriété sans constituer pour autant une liberté fondamentale ; que c'est de toute façon à tort que le premier juge a estimé que la lettre du 6 décembre 2004 portait atteinte aux intérêts de M. X ; que ce n'est qu'au prix d'une dénaturation des pièces du dossier que la situation de ce dernier a été assimilée à celle d'un occupant exploitant un établissement qu'il conviendrait d'expulser ; que, s'agissant du bâtiment, l'intéressé n'a versé au débat aucun titre établissant son droit de propriété ; que l'atteinte supposée au droit de propriété ne revêt pas un caractère de gravité en raison du fait que l'intéressé occupe les lieux sans titre et compte tenu du faible nombre, de la vétusté et de l'état d'abandon des biens meubles restant dans le local ; qu'enfin, aucune « illégalité manifeste » ne peut être retenue ; qu'en effet, n'est pas manifestement illégale la décision d'une personne publique de démolir un bâtiment qui lui appartient ; que, la circonstance qu'un tiers y a stocké quelques matériels pourrait tout au plus faire naître un doute quant à la légalité de la décision de démolition sans pour autant la rendre « manifestement » illégale ;

Vu l'ordonnance attaquée ;

Vu le mémoire en défense enregistré le 14 janvier 2005 présenté par M. Bruno X ; il tend au rejet de la requête et à ce que la COMMUNE DE SAINT-CYPRIEN soit condamnée à lui verser la somme de 3 000 euros par application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et, subsidiairement, à ce que soit maintenue la suspension de la décision l'informant qu'il sera procédé à la démolition de la construction à usage de discothèque dont il est propriétaire ; il soutient tout d'abord que la juridiction administrative est compétente pour connaître du litige dans la mesure où le terrain d'assiette de la construction appartient au domaine public ; que le magistrat délégué auteur de l'ordonnance avait compétence pour exercer les fonctions de juge des référés du fait de l'empêchement de ceux des magistrats du tribunal administratif remplissant les conditions de grade et d'ancienneté exigées par l'article L. 511-2 du code de justice administrative ; que le premier juge n'a pas excédé sa compétence en retenant l'atteinte à la liberté fondamentale que constitue le droit d'accès au juge dès lors que celle-ci a été soulevée oralement lors de l'audience publique de référé ; que l'ordonnance attaquée est suffisamment motivée ; que la décision contestée est en outre constitutive d'une atteinte grave et manifestement illégale aux droits de l'exposant, lequel est propriétaire du bâtiment dont la démolition est prévue ; que le maire de Saint-Cyprien était incompétent pour prendre une mesure relevant de la compétence de l'Etat, dans la mesure où le terrain d'assiette de la construction fait partie du domaine public et relève pour sa gestion de l'Etat ; que la décision du 6 décembre 2004 n'est pas motivée en la forme contrairement à ce qu'exige la loi du 11 juillet 1979 ; qu'elle aurait dû être précédée de la procédure contradictoire prévue par l'article 24 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ; qu'il y a atteinte à l'autorité absolue de la chose jugée par l'arrêt de la Cour administrative d'appel de Marseille, devenu irrévocable par suite du rejet par la décision du Conseil d'Etat du 27 mars 2000 du pourvoi en cassation formé à son encontre ; qu'il résulte en effet de cet arrêt qu'une action en démolition ne peut être engagée à l'encontre du bâtiment qu'exploite l'exposant, faute d'appartenance du terrain d'assiette au domaine public maritime défini par application de l'ordonnance d'août 1681 ; qu'il y a atteinte illégale à un fonds de commerce en méconnaissance de l'article 17 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, de l'article 545 du code civil et de l'article 1er du premier protocole additionnel à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'en réalité, la commune a commis une voie de fait ; que conformément à la jurisprudence du Tribunal des conflits, la nullité de l'acte du 6 décembre 2004 peut être constatée non seulement par le juge judiciaire mais également par le juge administratif ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la Constitution, notamment son préambule ;

Vu la loi n° 73-1227 du 31 décembre 1973 autorisant la ratification de la convention européenne de sauvegarde des droits et des libertés fondamentales et de ses protocoles additionnels n°s 1, 3, 4 et 5, ensemble le décret n° 74-360 du 3 mai 1974 portant publication de la convention et des protocoles précités ;

Vu le code du domaine de l'Etat ;

Vu l'ordonnance de la marine d'août 1681 ;

Vu la loi n° 63-1178 du 28 novembre 1963 relative au domaine public maritime modifiée par le décret n° 72-879 du 19 septembre 1972 ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu la loi n° 91-650 du 9 juillet 1991 modifiée portant réforme des procédures civiles d'exécution ;

Vu la loi n° 2000-311 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations ;

Vu le code de justice administrative, notamment ses articles L. 511-2, L. 521-2 et L. 761-1 ;

Après avoir convoqué à une audience publique, d'une part, le maire de la COMMUNE DE SAINT-CYPRIEN, d'autre part, M. Bruno X ;

Vu le procès-verbal de l'audience publique du samedi 15 janvier 2005 à 10 heures 30, au cours de laquelle il a été décidé, après audition de Me NICOLAY, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat de la COMMUNE DE SAINT-CYPRIEN et de Me ROGER, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat de M. X, de prolonger l'instruction jusqu'au jeudi 20 janvier 2005 à 12 heures ;

Vu enregistré, le 20 janvier 2005 le nouveau mémoire présenté pour M. X qui tend aux mêmes fins que son mémoire en défense par les mêmes moyens ;

Vu enregistré, le 20 janvier 2005 le mémoire en réplique présenté pour la COMMUNE DE SAINT CYPRIEN qui conclut aux mêmes fins que sa requête par les mêmes moyens ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 521-2 du code de justice administrative : « Saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public (…) aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs une atteinte grave et manifestement illégale… » ; que le respect de ces conditions revêt un caractère cumulatif ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que par un acte authentique en date du 20 décembre 1978, M. X a acquis un fonds de commerce de bar-restaurant dancing, sur une parcelle de terrain dont il était attesté qu'elle faisait alors partie du domaine public maritime, sur le territoire de la Commune de Saint-Cyprien (Pyrénées-Orientales) ; que, dans un premier temps, la commune, à laquelle l'Etat avait accordé une concession de plage naturelle approuvée par arrêté préfectoral du 8 juillet 1974, avait consenti à M. X une concession d'occupation du domaine public valable en principe jusqu'au 31 décembre 2008 ; que la possibilité d'une révocation anticipée était cependant réservée dans le cas où l'Etat viendrait à résilier la concession conclue avec la commune ; que, dans un deuxième temps, M. X n'a été autorisé par le préfet des Pyrénées-Orientales à occuper le domaine public que pour une durée plus limitée ; qu'en dernier lieu, un arrêté du 13 mai 1992 a fixé au 31 décembre 1992, la date limite de l'occupation autorisée ; qu'il était spécifié à l'article 6 de cet arrêté que la permission de voirie était accordée à titre précaire et révocable et que le permissionnaire était « tenu de vider les lieux » et de « les rétablir dans leur état primitif sans avoir droit à aucune indemnité » sur la simple notification d'une décision de l'administration mettant un terme à l'autorisation ; que faute pour l'intéressé de se conformer à ces prescriptions, des poursuites pour contravention de grande voirie ont été engagées ; que, par un arrêt rendu le 10 février 1998, la Cour administrative d'appel de Marseille a annulé le jugement du tribunal administratif de Montpellier qui avait enjoint à M. de démolir le bâtiment à usage de restaurant-discothèque au motif que le terrain d'assiette de ce bâtiment avait cessé de faire partie du domaine public maritime tel qu'il est défini par l'ordonnance d'août 1681, et qu'en admettant même qu'il puisse être regardé comme étant incorporé au domaine public à un autre titre, aucun texte ne prévoit en pareil cas la mise en oeuvre de la procédure de contravention de grande voirie ; que, saisi d'un pourvoi en cassation formé contre cet arrêt, le Conseil d'Etat statuant au contentieux en a prononcé le rejet par une décision du 27 mars 2000, non sans relever que le ministre chargé de l'équipement n'était pas fondé à en demander l'annulation « par les moyens qu'il invoque » ;

Considérant que par une délibération en date du 24 mars 2004 le conseil municipal de Saint-Cyprien a autorisé le maire à acquérir auprès de l'Etat le terrain servant d'assiette au bâtiment litigieux, lequel était inexploité depuis 1995 ; que par lettre recommandée avec demande d'avis de réception M. X a été invité à assister le 17 juin 2004 à l'établissement d'un constat destiné à vérifier l'état de l'immeuble ; que l'intéressé s'est abstenu de déférer à cette invitation et a fait établir, par voie d'huissier, un constat de l'état des lieux le 28 juin 2004 ; qu'après signature de l'acte de cession le 27 août 2004 par le maire, ce dernier a adressé à M. X une lettre datée du 6 décembre 2004 par laquelle il a porté à sa connaissance que la commune se proposait de démolir « le bâtiment érigé sur le domaine public maritime » qui avait été antérieurement exploité comme discothèque « d'ici le 15 janvier 2005 » ; qu'il était demandé à l'ancien exploitant de « faire procéder à l'enlèvement des éventuels meubles » qui lui appartiendraient, ceux-ci devant faire l'objet d'une « expertise par huissier » ;

Considérant que par l'ordonnance attaquée le juge des référés du tribunal administratif de Montpellier, qui avait été saisi par M. X sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, a ordonné la suspension de la décision du 6 décembre 2004 ; qu'il a analysé celle-ci comme comportant deux décisions, l'une d'expulsion de l'occupant du bâtiment, l'autre prescrivant sa démolition ; qu'il a estimé que cette double décision portait une atteinte grave et manifestement illégale à la liberté fondamentale que constitue le droit d'accès au juge ; que la commune de Saint-Cyprien a régulièrement interjeté appel de cette ordonnance ;

Sur le moyen tiré de l'incompétence de la juridiction administrative :

Considérant que le juge administratif ne peut être saisi d'un pourvoi tendant à la mise en oeuvre de l'une des procédures régies par le livre V du code de justice administrative que pour autant que le litige principal auquel se rattache ou est susceptible de se rattacher la mesure d'urgence qu'il lui est demandé de prescrire n'échappe pas de façon manifeste à la compétence de la juridiction administrative ; que si l'arrêt de la Cour administrative d'appel de Marseille du 10 février 1998 a jugé que le terrain d'assiette de la discothèque qu'exploitait M. X n'appartenait pas au domaine public maritime tel qu'il est défini par l'ordonnance de la marine d'août 1681, il n'en résulte pas pour autant que ledit terrain n'appartiendrait pas au domaine public pour d'autres motifs ; qu'ainsi le moyen tiré de ce que le juge des référés aurait dû décliner sa compétence, motif pris de ce que le litige toucherait à la gestion du domaine privé de la commune, ne peut être accueilli ;

Sur le moyen tiré de ce que le magistrat délégué aurait été sans qualité pour remplir les fonctions de juge des référés :

Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 511-2 du code de justice administrative « Sont juges des référés les présidents des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, ainsi que les magistrats qu'ils désignent à cet effet et qui, sauf absence ou empêchement, ont une ancienneté minimale de deux ans et ont atteint au moins le grade de premier conseiller » ;

Considérant que si le magistrat qui a rendu l'ordonnance attaquée n'a pas atteint le grade de « premier conseiller », il a été cependant désigné comme juge des référés par le président du tribunal administratif de Montpellier en cas d'absence ou d'empêchement de ceux de ses collègues remplissant la double condition d'âge et d'ancienneté posée par l'article L. 511 ;2 du code précité ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que lesdits magistrats n'aient pas été absents ou empêchés à la date à laquelle a été rendue l'ordonnance attaquée ; qu'ainsi le moyen tiré de ce que cette ordonnance aurait été rendue par un magistrat n'ayant pas qualité pour exercer les fonctions de juge des référés doit être écarté ;

Sur les autres moyens relatifs à la régularité de l'ordonnance :

Considérant que, réserve faite de l'application de l'article L. 522-3 du code de justice administrative, l'instruction d'une demande de référé présentée sur le fondement de l'article L. 521-2 de ce code comporte une phase d'instruction écrite suivie d'une audience publique ; que lors de cette audience, il est loisible aux parties d'invoquer tout moyen de droit ou de fait ; qu'il appartient dans ce cas au juge des référés d'en faire mention, soit dans le procès-verbal de l'audience publique, soit dans le texte de son ordonnance ; qu'en l'espèce, il ressort des termes de l'ordonnance que le moyen tiré de ce que la lettre du maire du 6 décembre 2004 porterait atteinte au droit d'accès au juge avait été invoqué par M. X ;

Considérant que, contrairement à ce que soutient la commune requérante, l'ordonnance attaquée, n'est pas entachée d'une insuffisance de motivation ;

Sur le bien fondé de l'ordonnance :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. X avait, depuis le 31décembre 1992 la qualité d'occupant sans titre d'un terrain qu'il avait été autorisé à occuper de façon précaire, comme occupant du domaine public ; qu'il s'était engagé à libérer ce terrain au terme de l'occupation consentie libre de toute construction ; que le fonds de commerce dont il était propriétaire depuis 1978 avait perdu toute valeur compte tenu de la disparition depuis 1995 de la clientèle consécutive à la fermeture du restaurant-discothèque ; qu'il est constant qu'il n'occupait plus les lieux depuis cette même date ; que dans ces circonstances, la lettre par laquelle le maire de la commune de Saint-Cyprien lui a fait connaître son intention de procéder à la démolition d'un bâtiment qui était devenu la propriété de la commune par voie d'accession, n'a pas constitué une atteinte « grave » à une liberté fondamentale de nature à justifier la mise en oeuvre de la procédure de protection particulière instituée par l'article L. 521-2 du code de justice administrative ; que la commune est fondée à demander, pour ce motif, l'annulation de l'ordonnance attaquée ;

Sur les conclusions relatives à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, par application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative de condamner M. à payer à la COMMUNE DE SAINT-CYPRIEN une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'en revanche, les dispositions du même article font obstacle à ce que la commune, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, soit condamnée à verser la somme que réclame M. au titre des frais de même nature qu'il a exposés ;

O R D O N N E :

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Article 1er : L'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Montpellier est annulée.

Article 2 : La requête présentée par M. devant le juge des référés du tribunal administratif de Montpellier est rejetée.

Article 3 : M. versera à la COMMUNE DE SAINT-CYPRIEN la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de la COMMUNE DE SAINT-CYPRIEN est rejeté.

Article 5 : Les conclusions de M. X tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 6 : La présente ordonnance sera notifiée à la COMMUNE DE SAINT-CYPRIEN et à M. Bruno .

Copie en sera transmise pour information au préfet des Pyrénées-Orientales.


Synthèse
Formation : Juge des referes
Numéro d'arrêt : 276475
Date de la décision : 20/01/2005
Sens de l'arrêt : Satisfaction totale
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

PROCÉDURE - PROCÉDURES INSTITUÉES PAR LA LOI DU 30 JUIN 2000 - QUESTIONS COMMUNES - QUALITÉ POUR REMPLIR LES FONCTIONS DE JUGE DES RÉFÉRÉS - MAGISTRATS DÉLÉGUÉS DEVANT - SAUF ABSENCE OU EMPÊCHEMENT - AVOIR UNE ANCIENNETÉ MINIMALE DE DEUX ANS ET AVOIR ATTEINT LE GRADE DE PREMIER CONSEILLER (ART - L - 511-2 DU CJA) - ABSENCE OU EMPÊCHEMENT NON DÉMENTIS PAR LES PIÈCES DU DOSSIER EN L'ESPÈCE - RÉGULARITÉ DE L'ORDONNANCE RENDUE PAR UN MAGISTRAT N'AYANT PAS ATTEINT LE GRADE DE PREMIER CONSEILLER.

54-035-01 Aux termes du premier alinéa de l'article L. 511-2 du code de justice administrative « Sont juges des référés les présidents des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, ainsi que les magistrats qu'ils désignent à cet effet et qui, sauf absence ou empêchement, ont une ancienneté minimale de deux ans et ont atteint au moins le grade de premier conseiller ». Si le magistrat qui a rendu l'ordonnance attaquée n'a pas atteint le grade de premier conseiller, il a été cependant désigné comme juge des référés par le président du tribunal administratif en cas d'absence ou d'empêchement de ceux de ses collègues remplissant la double condition d'âge et d'ancienneté posée par l'article L. 511-2 du code précité. Or il ne ressort pas des pièces du dossier que lesdits magistrats n'aient pas été absents ou empêchés à la date à laquelle a été rendue l'ordonnance attaquée. Ainsi le moyen tiré de ce que cette ordonnance aurait été rendue par un magistrat n'ayant pas qualité pour exercer les fonctions de juge des référés doit être écarté.

PROCÉDURE - PROCÉDURES INSTITUÉES PAR LA LOI DU 30 JUIN 2000 - RÉFÉRÉ TENDANT AU PRONONCÉ DE MESURES NÉCESSAIRES À LA SAUVEGARDE D'UNE LIBERTÉ FONDAMENTALE (ART - L - 521-2 DU CODE DE JUSTICE ADMINISTRATIVE) - POUVOIRS ET DEVOIRS DU JUGE - OBLIGATION DE MENTIONNER - DANS LE TEXTE DE L'ORDONNANCE OU DANS LE PROCÈS-VERBAL DE L'AUDIENCE PUBLIQUE - LES MOYENS INVOQUÉS AU COURS DE CETTE AUDIENCE [RJ1].

54-035-03-04 Réserve faite de l'application de l'article L. 522-3 du code de justice administrative, l'instruction d'une demande de référé présentée sur le fondement de l'article L. 521-2 de ce code comporte une phase d'instruction écrite suivie d'une audience publique. Lors de cette audience, il est loisible aux parties d'invoquer tout moyen de droit ou de fait. Il appartient dans ce cas au juge des référés d'en faire mention, soit dans le procès-verbal de l'audience publique, soit dans le texte de son ordonnance.


Références :

[RJ1]

Cf. 26 octobre 2001, M. et Mme Aiguebonne et autres, T. p. 1119.


Publications
Proposition de citation : CE, 20 jan. 2005, n° 276475
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Genevois
Avocat(s) : SCP ROGER, SEVAUX ; SCP NICOLAY, DE LANOUVELLE

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2005:276475.20050120
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