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26/01/2005 | FRANCE | N°269051

France | France, Conseil d'État, 8eme et 3eme sous-sections reunies, 26 janvier 2005, 269051


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 23 juin et 8 juillet 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour le DEPARTEMENT DES ALPES-MARITIMES, représenté par le président du conseil général domicilié en cette qualité au siège du conseil général à Nice (06201 Nice cedex 3) ; le DEPARTEMENT DES ALPES-MARITIMES demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance du 4 juin 2004 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Nice, à la demande de Mme Marie-Louise A, lui a enjoint d'effectuer à ses f

rais les travaux de sécurisation sur la parcelle de cette dernière ;

2°) de ...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 23 juin et 8 juillet 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour le DEPARTEMENT DES ALPES-MARITIMES, représenté par le président du conseil général domicilié en cette qualité au siège du conseil général à Nice (06201 Nice cedex 3) ; le DEPARTEMENT DES ALPES-MARITIMES demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance du 4 juin 2004 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Nice, à la demande de Mme Marie-Louise A, lui a enjoint d'effectuer à ses frais les travaux de sécurisation sur la parcelle de cette dernière ;

2°) de mettre à la charge de Mme A la somme de 3 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Marc El Nouchi, Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Peignot, Garreau, avocat du DEPARTEMENT DES ALPES-MARITIMES et de Me Le Prado, avocat de Mme A,

- les conclusions de M. Pierre Collin, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés qu'après des travaux d'élargissement de la route départementale n° 2225 sur la commune de Lantosque (Alpes-Maritimes), deux éboulements provenant du terrain de Mme A se sont déversés sur cette route départementale qu'il surplombe, les 11 décembre 2002 et 1er novembre 2003 ; que, saisi par Mme A, sur le fondement de l'article L. 521-3 du code de justice administrative, d'une demande tendant à ce qu'il soit enjoint au DEPARTEMENT DES ALPES-MARITIMES d'exécuter les travaux de réfection consécutifs aux dommages causés sur sa propriété par l'élargissement de la route départementale, le juge des référés du tribunal administratif de Nice a, par ordonnance du 4 juin 2004, sans se prononcer sur l'imputation des éboulements aux travaux d'élargissement de la route départementale, jugé que la demande de Mme A tendait à l'exécution sur sa parcelle de travaux nécessaires pour préserver la sécurité des usagers de la route départementale, qui incombaient au DEPARTEMENT DES ALPES-MARITIMES, et, par suite, enjoint à ce dernier d'y procéder, à ses frais ; que le DEPARTEMENT DES ALPES-MARITIMES se pourvoit en cassation contre cette ordonnance ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de justice administrative : Le juge des référés statue par des mesures qui présentent un caractère provisoire. Il n'est pas saisi du principal et se prononce dans les meilleurs délais ; qu'aux termes de l'article L. 521-3 du même code : En cas d'urgence et sur simple requête qui sera recevable même en l'absence de décision administrative préalable, le juge des référés peut ordonner toutes autres mesures utiles sans faire obstacle à l'exécution d'aucune décision administrative ; qu'il résulte de ces dispositions combinées, que saisi sur le fondement de l'article L. 521-3 susmentionné, le juge des référés peut prescrire à des fins conservatoires toutes mesures, notamment sous la forme d'injonctions à l'égard de l'administration, à condition que ces mesures soient utiles, justifiées par l'urgence, ne fassent obstacle à l'exécution d'aucune décision administrative et ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 3221-4 du code général des collectivités territoriales : Le président du conseil général gère le domaine du département. A ce titre, il exerce les pouvoirs de police afférents à cette gestion, notamment en ce qui concerne la circulation sur ce domaine, sous réserve des attributions dévolues aux maires par le présent code (...) ; qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés que, se fondant sur les dispositions de cet article, le DEPARTEMENT DES ALPES-MARITIMES a fait valoir qu'il ne tenait ni d'aucun texte ni des responsabilités qui s'attachent à la gestion de son domaine public routier l'obligation d'effectuer pour son propre compte et à ses frais, sur la parcelle d'un propriétaire privé, des travaux de purge incombant normalement pour la sécurité des tiers à ce propriétaire ; qu'en ne reconnaissant pas à cette contestation le caractère d'une contestation sérieuse alors que l'article L. 3221-4 limite les pouvoirs de gestion du président du conseil général au seul domaine départemental, ce qui exclut que de tels pouvoirs puissent s'exercer sur des parcelles appartenant à des personnes privées, le juge des référés a commis une erreur de droit ; qu'ainsi, le DEPARTEMENT DES ALPES-MARITIMES est fondé à demander l'annulation de l'ordonnance attaquée ;

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, en application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, de régler l'affaire au titre de la procédure de référé engagée ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les mesures que Mme A demande d'ordonner se heurtent à la contestation par le département de l'obligation qui lui incomberait de réaliser, pour son compte et à ses frais, des travaux de sécurisation sur la parcelle de l'intéressée ; que cette contestation présente, en l'état de l'instruction, le caractère d'une contestation sérieuse, faisant obstacle à ce que soit prononcée par le juge des référés l'injonction demandée par Mme A ; que, par suite, la demande de Mme A ne peut qu'être rejetée ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge du DEPARTEMENT DES ALPES-MARITIMES, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le paiement de la somme que demande Mme A au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'en revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des mêmes dispositions et de mettre à la charge de Mme A une somme de 2 500 euros au titre des frais exposés par le DEPARTEMENT DES ALPES-MARITIMES et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Nice en date du 4 juin 2004 est annulée.

Article 2 : La demande présentée par Mme A devant le juge des référés du tribunal administratif de Nice est rejetée, ainsi que ses conclusions présentées devant le Conseil d'Etat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Mme A versera au DEPARTEMENT DES ALPES-MARITIMES la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée au DEPARTEMENT DES ALPES-MARITIMES et à Mme Marie-Louise A.


Sens de l'arrêt : Satisfaction totale
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 26 jan. 2005, n° 269051
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : M. Martin
Rapporteur ?: M. Marc El Nouchi
Rapporteur public ?: M. Collin
Avocat(s) : SCP PEIGNOT, GARREAU ; LE PRADO

Origine de la décision
Formation : 8eme et 3eme sous-sections reunies
Date de la décision : 26/01/2005
Date de l'import : 05/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 269051
Numéro NOR : CETATEXT000008161848 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2005-01-26;269051 ?
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