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18/02/2005 | FRANCE | N°264014

France | France, Conseil d'État, 4ème et 5ème sous-sections réunies, 18 février 2005, 264014


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 28 janvier et 28 mai 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mme Michelle B, demeurant ... ; Mme B demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision du 18 décembre 2003 par laquelle la section disciplinaire du conseil national de l'ordre des médecins, d'une part, a rejeté sa requête tendant à l'annulation de la décision du 4 mars 2002 par laquelle le conseil régional de l'ordre des médecins d'Ile-de-France, statuant sur la plainte de Mme Odette A, lui a infligé la sanc

tion de l'interdiction d'exercer la médecine pendant six mois dont troi...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 28 janvier et 28 mai 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mme Michelle B, demeurant ... ; Mme B demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision du 18 décembre 2003 par laquelle la section disciplinaire du conseil national de l'ordre des médecins, d'une part, a rejeté sa requête tendant à l'annulation de la décision du 4 mars 2002 par laquelle le conseil régional de l'ordre des médecins d'Ile-de-France, statuant sur la plainte de Mme Odette A, lui a infligé la sanction de l'interdiction d'exercer la médecine pendant six mois dont trois mois avec sursis, d'autre part, a décidé que la sanction ferme prendrait effet le 1er mai 2004 et cesserait de porter effet le 31 juillet 2004 à minuit ;

2°) de mettre à la charge de Mme A la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu, enregistrée le 20 janvier 2005, la note en délibéré présentée pour Mme B ;

Vu, enregistrée le 8 février 2005, la nouvelle note en délibéré, présentée pour Mme B ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu le décret n° 48-1671 du 26 octobre 1948 modifié ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Anne-Marie Leroy, Conseiller d'Etat,

- les observations de la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat de Mme B et de la SCP Vier, Barthélemy, avocat du conseil national de l'ordre des médecins,

- les conclusions de M. Rémi Keller, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article 28 du décret du 26 octobre 1948, qui est relatif à la section disciplinaire du conseil national de l'ordre des médecins : Les décisions de la section en matière disciplinaire ou en matière électorale sont rendues publiques... ; et qu'aux termes de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue (...) publiquement (...) par un tribunal indépendant et impartial établi par la loi, qui décidera, soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle ;

Considérant que, si la décision attaquée de la section disciplinaire du conseil national de l'ordre des médecins infligeant à Mme B la sanction de l'interdiction d'exercer la médecine pendant six mois et lui refusant le bénéfice de l'amnistie porte l'indication qu'elle a été faite et délibérée à l'issue de l'audience publique du 18 décembre 2003, elle ne mentionne pas la date à laquelle elle a été rendue publique ; qu'ainsi elle ne fait pas la preuve qu'elle a été prononcée dans des conditions régulières ; que, par suite, Mme B est fondée à en demander l'annulation ;

Considérant qu'en vertu de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond ;

Considérant qu'aux termes de l'article 52 du code de déontologie médicale : Le médecin qui aura traité une personne pendant la maladie dont elle est décédée ne pourra profiter des dispositions entre vifs et testamentaires faites par celle-ci en sa faveur pendant le cours de cette maladie que dans les cas et conditions prévus par la loi (...) ;

Considérant que ces dispositions sont applicables au médecin qui aura traité une personne pendant la maladie dont elle est décédée, et non pas seulement à celui qui aura traité cette personne pour l'affection dont elle est décédée ; qu'il ressort des pièces du dossier que Mme B a, en qualité de psychanalyste, été à de multiples reprises consultée par Mme D entre 1995 et 1997 ; qu'elle a, par la suite, donné diverses consultations gratuites jusqu'au milieu de l'année 1999 et prescrit diverses spécialités pharmaceutiques à l'intéressée, alors que celle-ci se savait atteinte d'une maladie grave dont elle est décédée en mars 2000 ; qu'en mars 1999, Mme D a signé au profit de Mme B un avenant à son contrat d'assurance sur la vie, que Mme B a accepté ; qu'en jugeant, dans ces circonstances, que Mme B avait méconnu les dispositions de l'article 52 du code de déontologie médicale, la section disciplinaire du conseil régional de l'ordre des médecins d'Ile-de-France n'a pas commis d'erreur de droit ;

Considérant que c'est également à bon droit que la section disciplinaire du conseil régional de l'ordre des médecins d'Ile-de-France a qualifié les faits reprochés à Mme B de contraires à l'honneur et à la probité et a écarté, par suite, le bénéfice de la loi d'amnistie ; que ces faits justifient l'interdiction d'exercer la médecine pendant six mois dont trois avec sursis, prononcée par le conseil régional d'Ile-de-France de l'ordre des médecins ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme B n'est pas fondée à demander l'annulation de la décision du 4 mars 2003 par laquelle la section disciplinaire du conseil régional de l'ordre des médecins d'Ile-de-France lui a infligé la sanction de l'interdiction d'exercer la médecine pendant six mois dont trois mois avec sursis ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de Mme A, qui n'est pas partie à la présente instance, la somme de 2 000 euros que Mme B demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

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Article 1er : La décision de la section disciplinaire du conseil national de l'ordre des médecins en date du 18 décembre 2003 est annulée.

Article 2 : L'appel présenté par Mme B devant la section disciplinaire du conseil national de l'ordre des médecins est rejeté.

Article 3 : La sanction d'interdiction ferme d'exercer la médecine pendant trois mois infligée à Mme B par la décision du conseil régional de l'ordre des médecins d'Ile-de-France du 4 mars 2003 prendra effet le 1er mai 2005 et cessera de porter effet le 31 juillet 2005 à minuit.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à Mme Michelle B, au conseil national de l'ordre des médecins, au ministre de la santé et de la protection sociale et à Mme Odette A.


Synthèse
Formation : 4ème et 5ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 264014
Date de la décision : 18/02/2005
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

55-03-01-02 PROFESSIONS, CHARGES ET OFFICES. CONDITIONS D'EXERCICE DES PROFESSIONS. MÉDECINS. RÈGLES DIVERSES S'IMPOSANT AUX MÉDECINS DANS L'EXERCICE DE LEUR PROFESSION. - INTERDICTION FAITE AU MÉDECIN TRAITANT DE BÉNÉFICIER DE LIBÉRALITÉS DE LA PART DE SON PATIENT (ART. 52 DU CODE DE DÉONTOLOGIE) - NOTION DE MÉDECIN TRAITANT - MÉDECIN AYANT TRAITÉ LA PERSONNE AU COURS DE LA MALADIE DONT ELLE EST DÉCÉDÉE.

55-03-01-02 Aux termes de l'article 52 du code de déontologie médicale : Le médecin qui aura traité une personne pendant la maladie dont elle est décédée ne pourra profiter des dispositions entre vifs et testamentaires faites par celle-ci en sa faveur pendant le cours de cette maladie que dans les cas et conditions prévus par la loi (…) . Ces dispositions sont applicables au médecin qui a traité une personne pendant la maladie dont elle est décédée, et non pas seulement à celui qui a traité cette personne pour l'affection dont elle est décédée.


Publications
Proposition de citation : CE, 18 fév. 2005, n° 264014
Publié au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : Mme Hagelsteen
Rapporteur ?: Mme Anne-Marie Leroy
Rapporteur public ?: M. Keller
Avocat(s) : SCP WAQUET, FARGE, HAZAN ; SCP VIER, BARTHELEMY, MATUCHANSKY

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2005:264014.20050218
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