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23/03/2005 | FRANCE | N°262434

France | France, Conseil d'État, 9eme et 10eme sous-sections reunies, 23 mars 2005, 262434


Vu le recours, enregistré le 5 décembre 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE ; le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE demande que le Conseil d'Etat :

1°) annule l'arrêt en date du 23 septembre 2003 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille a, sur appel de la SA La Grande Taverne de Bavière, annulé les jugements du tribunal administratif de Nice du 8 mars 2001 et accordé à cette société la décharge des amendes fiscales mises à sa charge sur le fondement d

e l'article 1758 du code général des impôts au titre des années 1991...

Vu le recours, enregistré le 5 décembre 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE ; le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE demande que le Conseil d'Etat :

1°) annule l'arrêt en date du 23 septembre 2003 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille a, sur appel de la SA La Grande Taverne de Bavière, annulé les jugements du tribunal administratif de Nice du 8 mars 2001 et accordé à cette société la décharge des amendes fiscales mises à sa charge sur le fondement de l'article 1758 du code général des impôts au titre des années 1991 à 1994 ;

2°) statuant au fond, rejette les requêtes introduites par la SA La Grande Taverne de Bavière devant la cour administrative d'appel de Marseille ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la Constitution, et notamment son article 62 ;

Vu le Traité instituant la Communauté économique européenne, devenue la Communauté européenne, notamment ses articles 49 et 50 ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu la loi de finances rectificative pour 1999 (n° 99-1173 du 30 décembre 1999), notamment son article 25, ensemble la décision du Conseil constitutionnel n° 99-425 DC du 29 décembre 1999 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Hugues Hourdin, Maître des Requêtes,

- les observations de Me Odent, avocat de la SA La Grande Taverne de Bavière,

- les conclusions de M. Laurent Vallée, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes du B du II de l'article 25 de la loi de finances rectificative pour 1999 : Sont réputés réguliers, sous réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée, les avis de mise en recouvrement émis à la suite de notifications de redressement effectuées avant le 1er janvier 2000 en tant qu'ils seraient contestés par le moyen tiré de ce qu'ils se réfèreraient, pour ce qui concerne les informations mentionnées à l'article R. 256 ;1 du livre des procédures fiscales, à la seule notification de redressement ; qu'aux termes de l'article R. 256-1 du livre des procédures fiscales dans sa rédaction antérieure au décret du 20 avril 2000 : L'avis de mise en recouvrement individuel prévu à l'article L. 256 comporte : 1° Les indications nécessaires à la connaissance des droits, taxes, redevances, impositions ou autres sommes qui font l'objet de cet avis ; 2° Les éléments du calcul et le montant des droits et des pénalités, indemnités ou intérêts de retard qui constituent la créance. Toutefois, les éléments du calcul peuvent être remplacés par le renvoi au document sur lequel ils figurent, lorsque ce document a été établi ou signé par le contribuable ou son mandataire ou lui a été notifié antérieurement… ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que les avis de mise en recouvrement des 25 juillet 1995 et 1er juillet 1997 mettant respectivement à la charge de la SA La Grande Taverne de Bavière, pour les années 1991 et 1992 et pour les années 1993 et 1994, les sommes de 131 512 F et 51 316 F à raison d'insuffisances de versement de la retenue à la source mentionnée aux articles 182 B et 1671 A du code général des impôts, se bornaient à renvoyer, pour identifier l'origine de ces créances, à des notifications de redressements et à des lettres de motivation du 22 novembre 1994 ; que les dispositions précitées de l'article R. 256-1 du livre des procédures fiscales dans sa rédaction alors applicable n'autorisaient le renvoi à un document tel qu'une notification de redressement que pour les éléments mentionnés au 2° de cet article et non pour ceux figurant au 1° du même article relatifs aux indications concernant notamment la nature et l'origine des créances en cause ; que, pour mettre en recouvrement les impositions dont il s'agit, l'administration ne pouvait légalement se borner, ainsi que l'a jugé à bon droit la cour administrative d'appel et que le reconnaît le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE, à renvoyer à un autre document pour faire connaître à la société redevable les indications relatives à la nature et à l'origine des amendes mises à sa charge ; que ces avis de mise en recouvrement étaient, dès lors, irréguliers ;

Considérant que, pour faire obstacle aux conséquences de l'irrégularité ainsi relevée, l'administration a invoqué devant la cour les dispositions précitées du B du II de l'article 25 de la loi de finances rectificative pour 1999 ; que, toutefois, dans les motifs de sa décision du 26 décembre 1999, qui sont sur ce point le soutien nécessaire du dispositif de cette décision qui juge que ces dispositions ne méconnaissent aucune règle ni aucun principe de valeur constitutionnelle, le Conseil constitutionnel a mentionné que les avis de mise en recouvrement auxquels elles s'appliquent ne sont validés qu'en tant précisément qu'il se réfèrent, pour ce qui est du montant des droits et pénalités, à la seule notification de redressement ; qu'ainsi la validation législative prononcée par le B du II de l'article 25 de la loi de finances rectificative pour 1999 ne s'applique qu'aux éléments mentionnés au 2° de l'article R. 256-1 du livre des procédures fiscales ; que, par suite, et quand bien même la cour a-t-elle cru devoir, par une motivation surabondante, se reporter également aux travaux préparatoires de la loi de finances rectificative pour 1999, elle n'a pas commis d'erreur de droit en donnant à la loi de validation la portée qui résultait de la décision du Conseil constitutionnel et en en déduisant que, par suite, l'administration n'était pas fondée à soutenir que les avis de mise en recouvrement adressés à la société devaient être regardés comme réguliers ;

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu pour le Conseil d'Etat, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros que la SA La Grande Taverne de Bavière demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

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Article 1er : Le recours du MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE est rejeté.

Article 2 : L'Etat versera à la SA La Grande Taverne de Bavière la somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761 ;1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente décision sera notifiée au MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE et à la SA La Grande Taverne de Bavière.


Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

ACTES LÉGISLATIFS ET ADMINISTRATIFS - VALIDATION LÉGISLATIVE - APPLICATION PAR LE JUGE ADMINISTRATIF - PORTÉE DE LA VALIDATION - RESPECT DE LA CHOSE JUGÉE PAR LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL.

01-11 L'article R. 256-1 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction antérieure au décret du 20 avril 2000, disposait que : L'avis de mise en recouvrement individuel prévu à l'article L. 256 comporte : 1° Les indications nécessaires à la connaissance des droits, taxes, redevances, impositions ou autres sommes qui font l'objet de cet avis ; 2° Les éléments du calcul et le montant des droits et des pénalités, indemnités ou intérêts de retard qui constituent la créance. Toutefois, les éléments du calcul peuvent être remplacés par le renvoi au document sur lequel ils figurent, lorsque ce document a été établi ou signé par le contribuable ou son mandataire ou lui a été notifié antérieurement (…). L'article 25-B-II de la loi de finances rectificative pour 1999 a réputé réguliers, sous réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée, les avis de mise en recouvrement émis à la suite de notifications de redressement effectuées avant le 1er janvier 2000 en tant qu'ils seraient contestés par le moyen tiré de ce qu'ils se réfèreraient, « pour ce qui concerne les informations mentionnées à l'article R. 256-1 du livre des procédures fiscales », à la seule notification de redressement. Par une décision du 26 décembre 1999, le Conseil constitutionnel a jugé que ces dispositions ne méconnaissaient aucune règle ni aucun principe de valeur constitutionnelle. Aux termes de motifs qui constituent le soutien nécessaire du dispositif de cette dernière décision, le juge constitutionnel a toutefois précisé que les avis de mise en recouvrement auxquels les prévisions légales s'appliquent ne sont validés qu'en tant précisément qu'il se réfèrent, pour ce qui est du montant des droits et pénalités, à la seule notification de redressement. Il en résulte que la validation ainsi organisée par le législateur ne s'applique qu'aux éléments mentionnés au 2° de l'article R. 256-1 du livre des procédures fiscales, à l'exclusion de ceux mentionnés au 1° du même article. Irrégularité, par suite, de l'acte de procédure d'imposition qui ne répond pas aux exigences de ces dernières dispositions. Décharge des droits et pénalités ainsi établis.

CONTRIBUTIONS ET TAXES - GÉNÉRALITÉS - TEXTES FISCAUX - LÉGALITÉ DES DISPOSITIONS FISCALES - LOIS - LOIS DE VALIDATION - APPLICATION PAR LE JUGE ADMINISTRATIF - PORTÉE - RESPECT DE LA CHOSE JUGÉE PAR LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL.

19-01-01-01-01 L'article R. 256-1 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction antérieure au décret du 20 avril 2000, disposait que : L'avis de mise en recouvrement individuel prévu à l'article L. 256 comporte : 1° Les indications nécessaires à la connaissance des droits, taxes, redevances, impositions ou autres sommes qui font l'objet de cet avis ; 2° Les éléments du calcul et le montant des droits et des pénalités, indemnités ou intérêts de retard qui constituent la créance. Toutefois, les éléments du calcul peuvent être remplacés par le renvoi au document sur lequel ils figurent, lorsque ce document a été établi ou signé par le contribuable ou son mandataire ou lui a été notifié antérieurement (…). L'article 25-B-II de la loi de finances rectificative pour 1999 a réputé réguliers, sous réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée, les avis de mise en recouvrement émis à la suite de notifications de redressement effectuées avant le 1er janvier 2000 en tant qu'ils seraient contestés par le moyen tiré de ce qu'ils se réfèreraient, « pour ce qui concerne les informations mentionnées à l'article R. 256-1 du livre des procédures fiscales », à la seule notification de redressement. Par une décision du 26 décembre 1999, le Conseil constitutionnel a jugé que ces dispositions ne méconnaissaient aucune règle ni aucun principe de valeur constitutionnelle. Aux termes de motifs qui constituent le soutien nécessaire du dispositif de cette dernière décision, le juge constitutionnel a toutefois précisé que les avis de mise en recouvrement auxquels les prévisions légales s'appliquent ne sont validés qu'en tant précisément qu'il se réfèrent, pour ce qui est du montant des droits et pénalités, à la seule notification de redressement. Il en résulte que la validation ainsi organisée par le législateur ne s'applique qu'aux éléments mentionnés au 2° de l'article R. 256-1 du livre des procédures fiscales, à l'exclusion de ceux mentionnés au 1° du même article. Irrégularité, par suite, de l'acte de procédure d'imposition qui ne répond pas aux exigences de ces dernières dispositions. Décharge des droits et pénalités ainsi établis.

CONTRIBUTIONS ET TAXES - GÉNÉRALITÉS - RECOUVREMENT - ACTION EN RECOUVREMENT - ACTES DE RECOUVREMENT - AVIS DE MISE EN RECOUVREMENT INDIVIDUEL (ART - L - 256 DU LPF) - MENTIONS OBLIGATOIRES (ART - R - 256-1 DU MÊME LIVRE) - MOTIVATION PAR RÉFÉRENCE - LÉGALITÉ - CONDITIONS - MESURE DE VALIDATION LÉGISLATIVE (ART - 25-II-B DE LA LOI DE FINANCES RECTIFICATIVE POUR 1999) - PORTÉE.

19-01-05-01-02 L'article R. 256-1 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction antérieure au décret du 20 avril 2000, disposait que : L'avis de mise en recouvrement individuel prévu à l'article L. 256 comporte : 1° Les indications nécessaires à la connaissance des droits, taxes, redevances, impositions ou autres sommes qui font l'objet de cet avis ; 2° Les éléments du calcul et le montant des droits et des pénalités, indemnités ou intérêts de retard qui constituent la créance. Toutefois, les éléments du calcul peuvent être remplacés par le renvoi au document sur lequel ils figurent, lorsque ce document a été établi ou signé par le contribuable ou son mandataire ou lui a été notifié antérieurement (…). L'article 25-B-II de la loi de finances rectificative pour 1999 a réputé réguliers, sous réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée, les avis de mise en recouvrement émis à la suite de notifications de redressement effectuées avant le 1er janvier 2000 en tant qu'ils seraient contestés par le moyen tiré de ce qu'ils se réfèreraient, « pour ce qui concerne les informations mentionnées à l'article R. 256-1 du livre des procédures fiscales », à la seule notification de redressement. Par une décision du 26 décembre 1999, le Conseil constitutionnel a jugé que ces dispositions ne méconnaissaient aucune règle ni aucun principe de valeur constitutionnelle. Aux termes de motifs qui constituent le soutien nécessaire du dispositif de cette dernière décision, le juge constitutionnel a toutefois précisé que les avis de mise en recouvrement auxquels les prévisions légales s'appliquent ne sont validés qu'en tant précisément qu'il se réfèrent, pour ce qui est du montant des droits et pénalités, à la seule notification de redressement. Il en résulte que la validation ainsi organisée par le législateur ne s'applique qu'aux éléments mentionnés au 2° de l'article R. 256-1 du livre des procédures fiscales, à l'exclusion de ceux mentionnés au 1° du même article. Irrégularité, par suite, de l'acte de procédure d'imposition qui ne répond pas aux exigences de ces dernières dispositions. Décharge des droits et pénalités ainsi établis.


Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 23 mar. 2005, n° 262434
Publié au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : M. Stirn
Rapporteur ?: M. Hugues Hourdin
Rapporteur public ?: M. Vallée
Avocat(s) : ODENT

Origine de la décision
Formation : 9eme et 10eme sous-sections reunies
Date de la décision : 23/03/2005
Date de l'import : 05/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 262434
Numéro NOR : CETATEXT000008229223 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2005-03-23;262434 ?
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