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01/04/2005 | FRANCE | N°258440

France | France, Conseil d'État, 2eme sous-section jugeant seule, 01 avril 2005, 258440


Vu la requête, enregistrée le 10 juillet 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE POLICE ; le PREFET DE POLICE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 13 mai 2003 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 4 mars 2003 décidant la reconduite à la frontière de M. Y ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. Y devant le tribunal administratif de Paris ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvega

rde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, signée le 4 novembre 1950 ;

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Vu la requête, enregistrée le 10 juillet 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE POLICE ; le PREFET DE POLICE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 13 mai 2003 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 4 mars 2003 décidant la reconduite à la frontière de M. Y ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. Y devant le tribunal administratif de Paris ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, signée le 4 novembre 1950 ;

Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mlle Sophie Liéber, Auditeur,

- les conclusions de Mme Emmanuelle Prada Bordenave, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, modifiée, relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France, alors en vigueur : I- Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police, peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (...) 3° Si l'étranger, auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait (...) ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. Y, de nationalité sénégalaise, s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois à compter de la notification, le 12 janvier 2003, de la décision du 9 janvier 2003 par laquelle le PREFET DE POLICE lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour ; qu'il se trouvait ainsi dans le cas où, en application du 3° du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;

Considérant que si M. Y fait valoir qu'il vit depuis près de quinze ans en France, où réside une grande partie de sa famille, il ressort des pièces du dossier que l'ancienneté de son séjour en France n'est pas établie et que, âgé de plus de trente ans à la date de la mesure de reconduite à la frontière, il est célibataire, sans charge de famille et n'est pas dépourvu d'attaches familiales au Sénégal ; qu'ainsi, compte-tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, et eu égard aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière, l'arrêté attaqué n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; que, par suite, le PREFET DE POLICE est fondé à soutenir que c'est à tort que le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé cet arrêté au motif qu'il méconnaîtrait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant, toutefois, qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. Y devant le tribunal administratif de Paris ;

Considérant qu'aux termes de l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945, modifiée, dans sa rédaction issue de la loi du 11 mai 1998, en vigueur à la date de l'arrêté attaqué : Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit : ... 3° A l'étranger, ne vivant pas en état de polygamie, qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans ou plus de quinze ans si, au cours de cette période, il a séjourné en qualité d'étudiant (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire ;

Considérant, d'une part, que le requérant n'établit pas, par les documents qu'il produit, sa présence sur le territoire français depuis plus de dix ans, notamment pour les années antérieures à 2001 ; que, d'autre part, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'asthme et les allergies dont souffre M. Y nécessiteraient une prise ne charge qui ne pourrait être effectuée dans son pays d'origine, le Sénégal ; que, par suite, M. Y n'est pas au nombre des étrangers pouvant obtenir de plein droit un titre de séjour en application du 3° ou du 11° de l'article 12 bis de l'ordonnance de 1945 ; que, dès lors, il n'est pas fondé à soutenir que le PREFET DE POLICE ne pouvait prendre à son encontre l'arrêté attaqué sans méconnaître les dispositions précitées de l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DE POLICE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 4 mars 2003 ordonnant la reconduite à la frontière de M. Y ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant que, la présente décision n'appelant aucune mesure d'exécution, les conclusions de M. Y tendant à ce que le Conseil d'Etat enjoigne au PREFET DE POLICE de lui délivrer une carte de séjour d'un an portant la mention vie privée et familiale ne peuvent qu'être écartées ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, verse à M. Y la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le jugement du 13 mai 2003 du magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris est annulé.

Article 2 : La demande présentée devant le tribunal administratif de Paris par M. Y ainsi que ses conclusions présentées devant le Conseil d'Etat sont rejetées.

Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DE POLICE, à M. Y et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 01 avr. 2005, n° 258440
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : M. Honorat
Rapporteur ?: Mlle Sophie Liéber
Rapporteur public ?: Mme Prada Bordenave

Origine de la décision
Formation : 2eme sous-section jugeant seule
Date de la décision : 01/04/2005
Date de l'import : 05/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 258440
Numéro NOR : CETATEXT000008214123 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2005-04-01;258440 ?
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