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06/04/2005 | FRANCE | N°266583

France | France, Conseil d'État, 4eme sous-section jugeant seule, 06 avril 2005, 266583


Vu la requête, enregistrée le 15 avril 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS ; le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 17 mars 2004 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé son arrêté du 16 février 2004 décidant la reconduite à la frontière de M. Nordine X ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. X devant le tribunal administratif de Cergy-Pontoise ;

Vu les autres pièces du d

ossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des liber...

Vu la requête, enregistrée le 15 avril 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS ; le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 17 mars 2004 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé son arrêté du 16 février 2004 décidant la reconduite à la frontière de M. Nordine X ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. X devant le tribunal administratif de Cergy-Pontoise ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;

Vu le décret n° 46-1574 du 30 juin 1946 modifié ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Gérard-David Desrameaux, Maître des Requêtes,

- les conclusions de Mme Anne-Françoise Roul, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 : I. - Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (...) 3° Si l'étranger, auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X, de nationalité marocaine, s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 13 décembre 2003, de la décision du 8 décembre 2003, du PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS lui refusant un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire ; qu'il était ainsi dans le cas prévu par les dispositions citées ci-dessus de l'ordonnance du 2 novembre 1945 où le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;

Considérant qu'aux termes de l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 : Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit : (...) 3° A l'étranger, ne vivant pas en état de polygamie, qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans (...) ; que si, à l'appui de sa demande d'annulation de l'arrêté ordonnant sa reconduite à la frontière, M. X fait valoir qu'il séjourne habituellement en France depuis 1980 et qu'il était titulaire d'une carte de résident valable de mars 1986 à mars 1996, il ressort des pièces du dossier qu'il a quitté le territoire français en août 1994 après avoir fait l'objet d'une mesure d'éloignement, qu'il ne justifie pas de la date de son retour en France et que les pièces qu'il produit pour les années 1995 à 1998 sont insuffisantes pour établir qu'il résidait de manière habituelle sur le territoire français durant cette période ; que ces circonstances, alors même que M. X a résidé en France pendant plus de dix ans avant son éloignement à destination du Maroc en août 1994 et qu'il était titulaire d'une carte de résident valable dix ans, à compter de mars 1986, qui ne lui a jamais été retirée, sont de nature à interrompre le délai relatif à la durée de résidence habituelle en France ; que, dès lors, M. X ne justifie pas d'une résidence habituelle en France depuis plus de dix ans à la date de l'arrêté attaqué ; que, par suite, c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Cergy-Pontoise s'est fondé sur la méconnaissance des dispositions du 3° de l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 pour annuler l'arrêté du PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS en date du 16 février 2004 ordonnant la reconduite à la frontière de M. X ;

Considérant, toutefois, qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. X devant le tribunal administratif de Cergy-Pontoise ;

Sur les autres moyens dirigés contre l'arrêté de reconduite à la frontière :

Considérant que l'arrêté ordonnant la reconduite à la frontière de M. X contient l'exposé des faits et des considérations de droit sur lesquels il se fonde et est ainsi suffisamment motivé ;

Considérant que si M. X soutient qu'il vit en France depuis 1980, aux côtés de ses deux soeurs, qui résident régulièrement sur le territoire français, il ressort des pièces du dossier que M. X n'est pas dépourvu de toute attache familiale dans son pays d'origine, où résident notamment sa mère et ses six autres soeurs ; que, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce et eu égard aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière, l'arrêté du PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS en date du 16 février 2004 n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels cet arrêté a été pris ; que, par suite, le moyen tiré de ce qu'il méconnaîtrait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé son arrêté du 16 février 2004 ordonnant la reconduite à la frontière de M. X ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que M. X demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

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Article 1er : Le jugement du magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Cergy-Pontoise en date du 17 mars 2004 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. X devant le tribunal administratif de Cergy-Pontoise est rejetée.

Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS, à M. Nordine X et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.


Synthèse
Formation : 4eme sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 266583
Date de la décision : 06/04/2005
Sens de l'arrêt : Satisfaction totale
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 06 avr. 2005, n° 266583
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Silicani
Rapporteur public ?: Mme Roul

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2005:266583.20050406
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