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06/04/2005 | FRANCE | N°266645

France | France, Conseil d'État, 4eme sous-section jugeant seule, 06 avril 2005, 266645


Vu la requête, enregistrée le 16 avril 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DU GARD ; le PREFET DU GARD demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 11 septembre 2003 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Montpellier a annulé son arrêté du 21 août 2003 décidant la reconduite à la frontière de M. Zoubir X ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. X devant le tribunal administratif de Montpellier ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention eur

opéenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'ordonnance...

Vu la requête, enregistrée le 16 avril 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DU GARD ; le PREFET DU GARD demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 11 septembre 2003 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Montpellier a annulé son arrêté du 21 août 2003 décidant la reconduite à la frontière de M. Zoubir X ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. X devant le tribunal administratif de Montpellier ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Gérard-David Desrameaux, Maître des Requêtes,

- les conclusions de Mme Anne-Françoise Roul, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que, par un arrêté du 15 juillet 2002, régulièrement publié au recueil des actes administratifs du département du Gard, le PREFET DU GARD a donné à M. Cervelle, secrétaire général, délégation pour signer notamment les arrêtés de reconduite à la frontière des étrangers en situation irrégulière ; que c'est dès lors, à tort que, pour annuler l'arrêté attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Montpellier s'est fondé sur ce qu'il aurait été pris par une autorité incompétente ;

Considérant, toutefois, qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. Zoubir X devant le tribunal administratif ;

Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 : Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (...) 3° Si l'étranger, auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait (...) ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X, de nationalité algérienne, s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 21 janvier 2003, de la décision du PREFET DU GARD lui refusant un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire ; qu'il était ainsi dans le cas prévu par les dispositions précitées du 3° du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 où le préfet peut décider la reconduite à la frontière ;

Considérant que si, à l'appui, d'une part, de sa demande d'annulation de l'arrêté ordonnant sa reconduite à la frontière et, d'autre part, par voie d'exception, de son moyen tiré de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour, M. X fait valoir que depuis son entrée sur le territoire français en 2002, sa femme a mis au monde un enfant, il ressort des pièces du dossier que M. X n'est pas dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine ; qu'ainsi, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce et eu égard aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière, l'arrêté attaqué n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels il a été pris ; que, par suite, le moyen tiré de ce qu'il méconnaîtrait les dispositions de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut être accueilli ; qu'il résulte de ces mêmes circonstances que les décisions contestées ne sont pas entachées d'erreur manifeste dans l'appréciation de leurs conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé ;

Sur les conclusions dirigées contre la décision fixant l'Algérie comme pays de destination :

Considérant qu'aux termes du second alinéa de l'article 27 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que ce dernier texte énonce : Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ;

Considérant que l'arrêté attaqué prévoit que le requérant sera reconduit à destination de l'Algérie ; que si l'intéressé, dont la demande d'asile territorial a d'ailleurs été rejetée par le ministre de l'intérieur, fait valoir que sa vie serait menacée en cas de retour en Algérie, il n'apporte pas de justifications suffisantes sur la réalité des risques actuels et personnels qu'il encourt ; qu'il n'est, par suite, pas fondé à soutenir que la décision fixant l'Algérie comme pays de destination méconnaîtrait tant les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales que les dispositions de l'article 27 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DU GARD est fondé à soutenir que c'est à tort que, par son jugement du 11 septembre 2003, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Montpellier a annulé son arrêté du 2 août 2003 ordonnant la reconduite à la frontière de M. X et fixant l'Algérie comme pays de destination ;

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme demandée par M. X, au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le jugement du 11 septembre 2003 du magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Montpellier est annulé.

Article 2 : La demande présentée devant le tribunal administratif de Montpellier par M. X et les conclusions présentées par ce dernier tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DU GARD, à M. Zoubir X et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.


Sens de l'arrêt : Satisfaction totale
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 06 avr. 2005, n° 266645
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : M. Silicani
Rapporteur ?: M. Gérard-David Desrameaux
Rapporteur public ?: Mme Roul

Origine de la décision
Formation : 4eme sous-section jugeant seule
Date de la décision : 06/04/2005
Date de l'import : 04/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 266645
Numéro NOR : CETATEXT000008214350 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2005-04-06;266645 ?
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