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11/04/2005 | FRANCE | N°263236

France | France, Conseil d'État, 1ère et 6ème sous-sections réunies, 11 avril 2005, 263236


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 2 janvier et 3 mai 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SOCIETE BEAUFOUR IPSEN PHARMA, dont le siège est 24, rue Erlanger à Paris (75016) ; la SOCIETE BEAUFOUR IPSEN PHARMA demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision implicite par laquelle les ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale ont approuvé l'accord « de bon usage des soins génériques, DC, prise en charge du diabète type 2, médicaments à service médical rendu insuffisant (région N

ord-Pas-de-Calais) » conclu entre l'union régionale des caisses d'assurance m...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 2 janvier et 3 mai 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SOCIETE BEAUFOUR IPSEN PHARMA, dont le siège est 24, rue Erlanger à Paris (75016) ; la SOCIETE BEAUFOUR IPSEN PHARMA demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision implicite par laquelle les ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale ont approuvé l'accord « de bon usage des soins génériques, DC, prise en charge du diabète type 2, médicaments à service médical rendu insuffisant (région Nord-Pas-de-Calais) » conclu entre l'union régionale des caisses d'assurance maladie de la région Nord-Pas-de-Calais et la fédération française des médecins généralistes MG-France du Nord-Pas-de-Calais le 15 mai 2003 ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 5 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Sébastien Veil, Auditeur,

- les observations de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de la SOCIETE BEAUFOUR IPSEN PHARMA,

- les conclusions de M. Christophe Devys, Commissaire du gouvernement ;

Sur le moyen tiré de ce que l'accord de bon usage des soins aurait été approuvé selon une procédure irrégulière :

Considérant qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article L. 162-12-17 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction alors en vigueur, les accords régionaux de bon usage des soins « sont approuvés par les ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale dans des conditions identiques à celles prévues aux deuxième et troisième alinéas de l'article L. 162-15. Seuls les accords régionaux ayant recueilli l'avis favorable de la caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés et d'au moins une autre caisse nationale peuvent être soumis à l'approbation des ministres » ; qu'aux termes des deuxième et troisième alinéas de l'article L. 162-15 du même code : « L'accord-cadre, les conventions, annexes et avenants sont approuvés par les ministres chargés de la santé, de la sécurité sociale, de l'agriculture, de l'économie et du budget. Ils sont réputés approuvés si les ministres n'ont pas fait connaître « aux signataires », dans le délai de quarante-cinq jours à compter de la réception du texte, qu'ils s'opposent à leur approbation du fait de leur non-conformité aux lois et règlements en vigueur ou de leur incompatibilité avec le respect des objectifs de dépenses ou des risques que leur application ferait courir à la santé publique ou à un égal accès aux soins. Toutefois, lorsque la non-conformité aux lois et règlements en vigueur de l'accord-cadre, de la convention, de l'avenant ou de l'annexe concerne seulement une ou plusieurs dispositions divisibles, les ministres compétents peuvent, dans le délai prévu ci-dessus, disjoindre cette ou ces seules dispositions de l'approbation. Ils notifient cette disjonction à la caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés ainsi qu'à la ou les autres caisses nationales d'assurance maladie concernées (...) » ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'un avis favorable de la caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés, de la caisse nationale d'assurance maladie des professions indépendantes et de la caisse centrale de la mutualité agricole sur l'accord « de bon usage des soins génériques, DC, prise en charge du diabète type 2, médicaments à SMR insuffisant » conclu par l'URCAM de la région Nord-Pas-de-Calais avec la fédération française des médecins généralistes MG-France et MG-Pas-de-Calais le 15 mai 2003, a été transmis avec cet accord au ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées par un courrier en date du 5 septembre 2003 et que ce dernier a notifié le 17 octobre 2003 à la caisse nationale de l'assurance maladie la disjonction de l'article 1er de l'accord ; qu'ainsi, les moyens tirés de l'irrégularité de la procédure au regard des dispositions précitées des articles L. 162-12-17 et L. 162-15 du code de la sécurité sociale manquent en fait ;

Sur le moyen tiré de la méconnaissance de l'autorité de chose jugée :

Considérant que l'article 5 de l'accord du 15 mai 2003 impose une diminution des prescriptions d'un certain nombre de spécialités dont le service médical rendu (SMR) a été jugé insuffisant par l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé après avis de la commission de la transparence, parmi lesquelles Tanakan 40 mg (comprimés enrobés, boîtes de 30 et de 90) et Tanakan 40 mg/ml (solution buvable, flacons de 30 ml et de 90 ml) ;

Considérant que, par décision en date du 23 juillet 2003, le Conseil d'Etat statuant au contentieux a annulé l'arrêté du 14 septembre 2001 du ministre de l'emploi et de la solidarité et du secrétaire d'Etat à la santé et aux handicapés en tant qu'il modifie le taux de remboursement des deux spécialités Tanakan 40 mg et Tanakan 40 mg/ml en se fondant sur l'illégalité des avis de la commission de la transparence du 27 juin 2001 résultant de la méconnaissance des exigences de motivation posées par les dispositions de l'article R. 163-18 du code de la sécurité sociale ; que l'autorité absolue de la chose jugée qui s'attache à cette décision et au motif unique qui en constitue le soutien nécessaire, si elle ferait obstacle à ce que puisse être jugé légal un arrêté modifiant le taux de remboursement de ces mêmes spécialités pharmaceutiques, pris sur le fondement des avis de la commission de la transparence en date du 27 juin 2001, n'impose pas par elle-même que le juge saisi de conclusions dirigées contre la décision d'approbation de l'accord de bon usage des soins du 15 mai 2003 en tant qu'il porte sur les stipulations de son article 5 relatives aux spécialités Tanakan 40 mg et 40 mg/ml en prononce l'annulation pour excès de pouvoir ; qu'ainsi, la SOCIETE BEAUFOUR IPSEN PHARMA n'est pas fondée à soutenir que la décision implicite approuvant l'accord de bon usage des soins en tant qu'il porte sur ces stipulations, aurait méconnu l'autorité de la chose jugée par la décision du 23 juillet 2003 ;

Sur le moyen tiré de ce que la décision attaquée ne pouvait légalement approuver un accord se fondant sur le critère de service médical rendu insuffisant :

Considérant qu'aux termes des troisième et quatrième alinéas de l'article L. 162-12-17 du code de la sécurité sociale : « Les accords nationaux et régionaux prévoient des objectifs médicalisés d'évolution des pratiques ainsi que les actions permettant de les atteindre. Ils peuvent fixer des objectifs quantifiés d'évolution de certaines dépenses et prévoir les modalités selon lesquelles les professionnels conventionnés peuvent percevoir, notamment sous forme de forfaits, une partie du montant des dépenses évitées par la mise en oeuvre de l'accord. / Cette partie est versée aux professionnels concernés par l'action engagée, dans la limite, le cas échéant, d'un plafond, en fonction de critères définis par l'accord » ; qu'il résulte de ces dispositions que l'accord de bon usage des soins litigieux pouvait légalement se fonder sur le caractère insuffisant du service médical rendu de certains médicaments pour prévoir la diminution de leur prescription ; que cet accord pouvait également énumérer des médicaments ou des catégories de médicaments dont, au vu des avis de la commission de la transparence, le service médical rendu était insuffisant ; qu'en approuvant un tel accord, les ministres n'ont pas commis d'illégalité ; qu'ainsi, le moyen tiré de ce que la décision attaquée ne pouvait légalement approuver l'accord de bon usage des soins doit être écarté ;

Sur le moyen tiré de l'illégalité du reversement collectif des économies réalisées :

Considérant que les dispositions précitées de l'article L. 162-12-17 du code de la sécurité sociale ont entendu permettre que les économies réalisées dans le cadre d'un accord de bon usage des soins donnent lieu au profit des professionnels concernés à un reversement forfaitaire, ou sous toute autre forme, d'une partie du montant des dépenses évitées par la mise en oeuvre de cet accord ; qu'aux termes de l'article 7 de l'accord de bon usage des soins litigieux : « (...) 5 % des économies qui seront réalisées dans le cadre de l'article 5 serviront au financement des différentes actions prévues par cet accord et au développement de dispositifs complémentaires concernant notamment (...) la mise à disposition d'un outil d'aide à la prescription en DC pour l'ensemble des médecins concernés par l'accord » ; que ces stipulations, en prévoyant la mise à disposition d'un outil d'aide à la prescription, créent un dispositif de reversement des économies qui entre dans les prévisions de l'article L. 162-12-17 du code de la sécurité sociale ; qu'ainsi, le moyen tiré de l'illégalité des dispositions de l'article 7 de l'accord de bon usage des soins doit, en tout état de cause, être écarté ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SOCIETE BEAUFOUR IPSEN PHARMA n'est pas fondée à demander l'annulation de la décision implicite par laquelle les ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale ont approuvé l'accord de bon usage des soins conclu entre l'union régionale des caisses d'assurance maladie de la région Nord-Pasde-Calais et la fédération française des médecins généralistes MG-France du Nord-Pas-de-Calais le 15 mai 2003 ;

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que la SOCIETE BEAUFOUR IPSEN PHARMA demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

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Article 1er : La requête de la SOCIETE BEAUFOUR IPSEN PHARMA est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE BEAUFOUR IPSEN PHARMA et au ministre des solidarités, de la santé et de la famille.


Synthèse
Formation : 1ère et 6ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 263236
Date de la décision : 11/04/2005
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 11 avr. 2005, n° 263236
Publié au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Stirn
Rapporteur ?: M. Sébastien Veil
Rapporteur public ?: M. Devys Christophe
Avocat(s) : SCP LYON-CAEN, FABIANI, THIRIEZ

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2005:263236.20050411
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