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20/04/2005 | FRANCE | N°266108

France | France, Conseil d'État, 6eme sous-section jugeant seule, 20 avril 2005, 266108


Vu la requête, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 1er avril 2004, présentée par le PREFET DE LA REGION PAYS-DE-LA-LOIRE, PREFET DE LA LOIRE-ATLANTIQUE ; le PREFET DE LA REGION PAYS-DE-LA-LOIRE, PREFET DE LA LOIRE-ATLANTIQUE, demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 10 mars 2004 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Nantes a annulé son arrêté du 2 mars 2004 ordonnant la reconduite à la frontière de M. X... A et fixant la Roumanie comme pays de destination ;

2°) de rejeter la demande

présentée par M. A devant le tribunal administratif de Nantes ;

Vu les au...

Vu la requête, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 1er avril 2004, présentée par le PREFET DE LA REGION PAYS-DE-LA-LOIRE, PREFET DE LA LOIRE-ATLANTIQUE ; le PREFET DE LA REGION PAYS-DE-LA-LOIRE, PREFET DE LA LOIRE-ATLANTIQUE, demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 10 mars 2004 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Nantes a annulé son arrêté du 2 mars 2004 ordonnant la reconduite à la frontière de M. X... A et fixant la Roumanie comme pays de destination ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. A devant le tribunal administratif de Nantes ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 ;

Vu le décret n° 98-503 du 23 juin 1998 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mlle Maud Vialettes, Maître des Requêtes,

- les conclusions de M. Mattias Guyomar, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (...) 3° Si l'étranger, auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé, ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la notification du refus ou du retrait (...) ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A, de nationalité roumaine, s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois à compter de la notification, le 4 septembre 2003, de l'arrêté du PREFET DE LA REGION PAYS-DE-LA-LOIRE, PREFET DE LA LOIRE-ATLANTIQUE, par lequel il lui a retiré son titre de séjour ; qu'il se trouvait ainsi dans le cas où, en application du 3° du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;

Considérant que, pour annuler l'arrêté du PREFET DE LA REGION PAYS-DE-LA-LOIRE, PREFET DE LA LOIRE-ATLANTIQUE, ordonnant la reconduite à la frontière de M. A, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Nantes s'est fondé sur le moyen tiré de l'illégalité de la décision, notifiée le 4 septembre 2003, par laquelle son titre de séjour lui a été retiré, elle-même provoquée par l'illégalité de la décision, notifiée le même jour, par laquelle le ministre de l'intérieur lui a refusé le bénéfice de l'asile territorial ;

Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article 2 du décret du 23 juin 1998 relatif à l'asile territorial : L'étranger est entendu en préfecture au jour que lui a fixé la convocation. Il peut demander au préalable l'assistance d'un interprète et peut être accompagné d'une personne de son choix ; qu'il résulte de ces dispositions que l'administration n'est pas tenue, dans la convocation qu'elle adresse au demandeur, d'informer celui-ci qu'il peut être assisté d'un interprète ; que, par suite, M. A n'est pas fondé à soutenir que la décision lui refusant le bénéfice de l'asile territorial aurait été rendue au terme d'une procédure irrégulière, faute pour lui d'avoir été informé de cette possibilité ; qu'il suit de là que le PREFET DE LA REGION PAYS-DE-LA-LOIRE, PREFET DE LA LOIRE-ATLANTIQUE, est fondé à soutenir que c'est à tort que le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Nantes s'est fondé sur ce motif pour déclarer illégal le retrait de titre de séjour de M. A et annuler de ce fait l'arrêté ordonnant sa reconduite à la frontière ;

Considérant, toutefois, qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. A devant le tribunal administratif et devant le Conseil d'Etat ;

En ce qui concerne l'exception d'illégalité de la décision par laquelle le ministre de l'intérieur a refusé d'accorder à M. A l'asile territorial :

Considérant que le moyen tiré de ce que le ministre de l'intérieur n'aurait pas consulté le ministre des affaires étrangères manque en fait ; qu'il s'ensuit que M. A n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de la décision par laquelle le ministre de l'intérieur a refusé de lui accorder l'asile territorial ;

En ce qui concerne la légalité de l'arrêté en tant qu'il ordonne la reconduite à la frontière de M. A :

Considérant, en premier lieu, que M. Y..., secrétaire général de la préfecture de la Loire-Atlantique, qui a signé l'arrêté de reconduite contesté, bénéficiait d'une délégation du PREFET DE LA REGION PAYS-DE-LA-LOIRE, PREFET DE LA LOIRE-ATLANTIQUE, en date du 3 février 2003 régulièrement publiée au recueil des actes administratifs de la préfecture de la Loire-Atlantique de février 2003 pour signer notamment les arrêtés de reconduite à la frontière en application de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 ; qu'ainsi, le moyen tiré de ce que M. Y... n'aurait pas été compétent pour signer l'arrêté de reconduite attaqué ne peut qu'être écarté ;

Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le PREFET DE LA REGION PAYS-DE-LA-LOIRE, PREFET DE LA LOIRE-ATLANTIQUE, aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation qu'il a faite des conséquences de la mesure contestée sur la situation personnelle de M. A ;

Considérant que si, à l'appui de sa requête dirigée contre l'arrêté du préfet décidant sa reconduite à la frontière, M. A fait valoir que sa petite-fille, Andréa, doit être prochainement opérée et que sa compagne a suivi en 2003 des soins à l'hôpital de Nantes, il ressort des pièces du dossier que, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, notamment des conditions du séjour en France de sa petite fille, qui vit auprès de son père, et de ce que sa compagne fait également l'objet d'une mesure de reconduite à la frontière, et eu égard aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière, l'arrêté attaqué n'a pas porté au respect dû à sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; qu'il n'a donc pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Sur les conclusions dirigées contre l'arrêté en tant qu'il fixe la Roumanie comme pays de destination :

Considérant que si M. A soutient que son retour dans son pays d'origine l'exposerait à de graves risques, il ne produit à l'appui de ses allégations aucun élément susceptible d'établir qu'il court personnellement des risques en cas de retour dans son pays ; que par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DE LA REGION PAYS-DE-LA-LOIRE, PREFET DE LA LOIRE-ATLANTIQUE, est fondé à demander l'annulation du jugement du 10 mars 2004 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Nantes a annulé son arrêté du 2 mars 2004 ordonnant la reconduite à la frontière de M. A ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

Considérant que la présente décision, qui rejette la demande de M. A, n'appelle aucune mesure d'exécution ; que ses conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet de lui délivrer un titre de séjour ne peuvent, dès lors, qu'être rejetées ;

Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que demande M. A au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le jugement du magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Nantes du 10 mars 2004 est annulé.

Article 2 : La demande présentée devant le tribunal administratif de Nantes par M. A ainsi que ses conclusions présentées devant le Conseil d'Etat sont rejetées.

Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DE LA REGION PAYS-DE-LA-LOIRE, PREFET DE LA LOIRE-ATLANTIQUE, à M. X... A et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.


Synthèse
Formation : 6eme sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 266108
Date de la décision : 20/04/2005
Sens de l'arrêt : Satisfaction totale
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 20 avr. 2005, n° 266108
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Bonichot
Rapporteur ?: Mlle Maud Vialettes
Rapporteur public ?: M. Guyomar

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2005:266108.20050420
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