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09/05/2005 | FRANCE | N°256661

France | France, Conseil d'État, 7eme et 2eme sous-sections reunies, 09 mai 2005, 256661


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 7 mai 2003 et 8 septembre 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour l'OFFICE NATIONAL INTERPROFESSIONNEL DU LAIT ET DES PRODUITS LAITIERS (ONILAIT), dont le siège est ... (75740) ; l'OFFICE NATIONAL INTERPROFESSIONNEL DU LAIT ET DES PRODUITS LAITIERS demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 27 février 2003 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a annulé, à la demande de la société Nutriset, le jugement du 29 avril 1998 par lequel le tribunal administrati

f de Paris avait rejeté la demande de la société tendant à la condam...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 7 mai 2003 et 8 septembre 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour l'OFFICE NATIONAL INTERPROFESSIONNEL DU LAIT ET DES PRODUITS LAITIERS (ONILAIT), dont le siège est ... (75740) ; l'OFFICE NATIONAL INTERPROFESSIONNEL DU LAIT ET DES PRODUITS LAITIERS demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 27 février 2003 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a annulé, à la demande de la société Nutriset, le jugement du 29 avril 1998 par lequel le tribunal administratif de Paris avait rejeté la demande de la société tendant à la condamnation de l'établissement requérant à lui verser la somme de 399.344 francs en paiement de la fourniture de marchandises destinées à l'aide alimentaire au Burkina Faso et l'a condamné à verser à la société Nutriset la somme de 60 879,60 euros avec intérêts au taux légal à compter du 12 juin 1995 ;

2°) statuant sur le fond, de rejeter la demande de la société Nutriset ;

3°) de mettre à la charge de la société Nutriset la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Nathalie Escaut, Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Ancel, Couturier-Heller, avocat de l'OFFICE NATIONAL INTERPROFESSIONNEL DU LAIT ET DES PRODUITS LAITIERS et de la SCP Delaporte, Briard, Trichet, avocat de la société Nutriset,

- les conclusions de M. Nicolas Boulouis, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que par une convention en date du 16 juin 1989, le ministre de l'agriculture a confié à l'OFFICE NATIONAL INTERPROFESSIONNEL DU LAIT ET DES PRODUITS LAITIERS, (ONILAIT), la mission de procéder à la mobilisation effective des produits laitiers (…) nécessaires à l'exécution du programme d'aide alimentaire français, conformément aux décisions arrêtées par le comité interministériel de l'aide alimentaire, le financement des opérations en cause étant intégralement assuré par le ministère de l'agriculture ; que le 12 juin 1995, la société Nutriset a demandé à l'ONILAIT le paiement d'une somme de 399 344 F à raison de la livraison au Burkina Faso de farines lactées dans le cadre d'une opération d'aide alimentaire ; que par un arrêt en date du 27 février 2003, la cour administrative d'appel de Paris a annulé le jugement du tribunal administratif de Paris en date du 29 avril 1998 ayant rejeté la requête de la société Nutriset et a condamné l'ONILAIT à verser à cette société la somme qu'elle demandait ; que l'ONILAIT se pourvoit en cassation contre cet arrêt ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que le litige dont était saisie la cour, portait sur les droits dont la société Nutriset pouvait se prévaloir à l'encontre de l'ONILAIT à la suite de la livraison de farines lactées au Burkina Faso faite dans le cadre de l'aide alimentaire française à ce pays ; que dès lors, la cour a pu, sans entacher ses motifs de contradiction, ni commettre d'erreur de droit, juger que l'absence de respect de la procédure prévue par la convention du 16 juin 1989 conclue entre le ministre de l'agriculture et l'ONILAIT, et à laquelle la société Nutriset n'était pas partie, était sans incidence sur les obligations qui avaient pu naître à la charge de l'ONILAIT du fait des prestations exécutées par la société Nutriset ;

Considérant que si l'ONILAIT soutient que la cour aurait méconnu les règles de la comptabilité publique en mettant à sa charge le paiement de la somme réclamée par la société Nutriset alors que son directeur n'avait pas procédé à son ordonnancement, ce moyen est nouveau en cassation et, par suite, irrecevable ;

Considérant que l'existence de relations contractuelles entre l'ONILAIT et la société Nutriset en exécution desquelles la société Nutriset a livré des farines lactées au Burkina Faso, a été déduite par la cour de l'examen des pièces du dossier qui lui était soumis et qui faisait apparaître que le comité interministériel de l'aide alimentaire avait décidé de soutenir le projet de la société Nutriset d'implantation au Burkina Faso d'une unité de fabrication de farines de sevrage pour jeunes enfants, que le ministre de l'agriculture avait demandé, le 29 juin 1990, à l'ONILAIT de mobiliser 400 000 F de farines lactées à l'appui de cette opération et que la cellule d'urgence et de veille des ministères des affaires étrangères et de la coopération en avait financé les frais de transport ; qu'en statuant ainsi, la cour s'est livrée, sans erreur de droit et par une décision suffisamment motivée, à une appréciation souveraine des faits qui lui étaient soumis, insusceptible en l'absence de dénaturation d'être remise en cause devant le juge de cassation ;

Considérant qu'il ressort de tout ce qui précède que l'ONILAIT n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêt attaqué ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de la société Nutriset, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que l'ONILAIT demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de l'ONILAIT une somme de 3 000 euros au titre des frais exposés par la société Nutriset et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de l'OFFICE NATIONAL INTERPROFESSIONNEL DU LAIT ET DES PRODUITS LAITIERS est rejetée.

Article 2 : L'OFFICE NATIONAL INTERPROFESSIONNEL DU LAIT ET DES PRODUITS LAITIERS versera à la société Nutriset une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à l'OFFICE NATIONAL INTERPROFESSIONNEL DU LAIT ET DES PRODUITS LAITIERS, à la société Nutriset, au ministre des affaires étrangères et au ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et de la ruralité.


Synthèse
Formation : 7eme et 2eme sous-sections reunies
Numéro d'arrêt : 256661
Date de la décision : 09/05/2005
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

COMPÉTENCE - RÉPARTITION DES COMPÉTENCES ENTRE LES DEUX ORDRES DE JURIDICTION - COMPÉTENCE DÉTERMINÉE PAR UN CRITÈRE JURISPRUDENTIEL - CONTRATS - CONTRATS ADMINISTRATIFS - CONTRATS COMPORTANT PARTICIPATION AU SERVICE PUBLIC - CONTRAT CONCLU ENTRE L'ONILAIT ET UNE SOCIÉTÉ PRIVÉE POUR LA FOURNITURE DE FARINES LACTÉES DANS LE CADRE D'UN PROGRAMME D'AIDE ALIMENTAIRE [RJ1].

17-03-02-03-02-03 L'ONILAIT, établissement public industriel et commercial, s'est vu confier par le ministre de l'agriculture la mission de procéder à la mobilisation effective des produits laitiers (…) nécessaires à l'exécution du programme d'aide alimentaire français, conformément aux décisions arrêtées par le comité interministériel de l'aide alimentaire. Il assure ainsi une mission de service public. Le contrat par lequel il a confié à une société privée le soin de livrer des farines lactées à une association humanitaire étrangère dans le cadre d'un programme d'aide alimentaire a donc pour objet l'exécution même du service public et constitue dès lors un contrat administratif. Le litige portant sur le paiement par ONILAIT des prestations prévues par ce contrat relève donc de la compétence du juge administratif.

MARCHÉS ET CONTRATS ADMINISTRATIFS - NOTION DE CONTRAT ADMINISTRATIF - NATURE DU CONTRAT - CONTRATS AYANT UN CARACTÈRE ADMINISTRATIF - CONTRATS AYANT POUR OBJET L'EXÉCUTION D'UN SERVICE PUBLIC - CONTRAT CONCLU ENTRE L'ONILAIT ET UNE SOCIÉTÉ PRIVÉE POUR LA FOURNITURE DE FARINES LACTÉES DANS LE CADRE D'UN PROGRAMME D'AIDE ALIMENTAIRE - CONSÉQUENCE - COMPÉTENCE DU JUGE ADMINISTRATIF POUR CONNAÎTRE D'UN LITIGE PORTANT SUR LE PAIEMENT PAR L'ONILAIT DES PRESTATIONS PRÉVUES PAR LE CONTRAT [RJ1].

39-01-02-01-02 L'ONILAIT, établissement public industriel et commercial, s'est vu confier par le ministre de l'agriculture la mission de procéder à la mobilisation effective des produits laitiers (…) nécessaires à l'exécution du programme d'aide alimentaire français, conformément aux décisions arrêtées par le comité interministériel de l'aide alimentaire. Il assure ainsi une mission de service public. Le contrat par lequel il a confié à une société privée le soin de livrer des farines lactées à une association humanitaire étrangère dans le cadre d'un programme d'aide alimentaire a donc pour objet l'exécution même du service public et constitue dès lors un contrat administratif. Le litige portant sur le paiement par ONILAIT des prestations prévues par ce contrat relève donc de la compétence du juge administratif.


Références :

[RJ1]

Rappr. TC, 28 septembre 1998, Grands moulins italiens de Venise c/ Office national interprofessionnel des céréales, p. 544.


Publications
Proposition de citation : CE, 09 mai. 2005, n° 256661
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : Mme Hagelsteen
Rapporteur ?: Mme Nathalie Escaut
Rapporteur public ?: M. Boulouis
Avocat(s) : SCP ANCEL, COUTURIER-HELLER ; SCP DELAPORTE, BRIARD, TRICHET

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2005:256661.20050509
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