Vu le recours, enregistré le 9 février 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le MINISTRE DES AFFAIRES SOCIALES, DU TRAVAIL ET DE LA SOLIDARITE ; le ministre demande au Conseil d'Etat d'annuler la décision du 15 décembre 2003 par laquelle la commission départementale des travailleurs handicapés, des mutilés de guerre et assimilés (CDTH) des Landes a infirmé la décision du 17 juillet 2003 de la commission technique d'orientation et de reclassement professionnelle (COTOREP) des Landes refusant d'accorder à M. Benoît YX, employeur de M. Paul Y, le bénéfice de la réduction de salaire prévue à l'article L. 323-6 du code du travail ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du travail ;
Vu le code de l'action sociale et des familles ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Isabelle Lemesle, Maître des Requêtes,
- les conclusions de M. François Séners, Commissaire du gouvernement ;
Considérant d'une part, qu'aux termes de l'article L. 323-6 du code du travail, le salaire des travailleurs handicapés ne peut être inférieur à celui qui résulte de l'application des dispositions législatives et réglementaires ou de la convention ou de l'accord collectif de travail ; qu'il est prévu cependant que lorsque le rendement professionnel des intéressés est notoirement diminué, des réductions de salaires peuvent être autorisées ; qu'en pareil cas, les travailleurs handicapés ont droit néanmoins à la garantie de ressources instituée par l'article 32 de la loi du 30 juin 1975 d'orientation en faveur des handicapés, dont les dispositions ont été reprises à l'article L. 243-4 du code de l'action sociale et des familles ; que d'après ce dernier texte, lorsque le handicapé exerce une activité soit dans le secteur ordinaire de production, soit dans un atelier protégé ou centre de distribution du travail à domicile, soit dans un centre d'aide par le travail, cette garantie de ressources, différente dans chaque cas, est fixée par rapport au salaire minimum de croissance ; que selon l'article L. 243-5 du même code, la garantie de ressources est regardée comme une rémunération du travail et est soumise comme telle aux cotisations sociales ; qu'en vertu de l'article L. 243-6 du même code, l'Etat assure aux entreprises et aux organismes gestionnaires des ateliers protégés, des centres de distribution du travail à domicile et des centres d'aides par le travail la compensation des charges qu'ils supportent au titre de la garantie des ressources ;
Considérant d'autre part, que l'article L. 322-4-2 du code du travail dispose qu' afin de faciliter l'insertion professionnelle durable des demandeurs d'emploi de longue durée, des bénéficiaires de minima sociaux et des personnes qui, du fait de leur âge, de leur handicap, de leur situation sociale ou familiale, rencontrent des difficultés particulières à l'emploi, l'Etat peut conclure avec des employeurs des conventions ouvrant droit au bénéfice des contrats de travail dénommés contrats initiative-emploi ; que ces contrats donnent droit à une aide de l'Etat dont le montant peut être modulé en fonction de la gravité des difficultés d'accès à l'emploi ; qu'il est spécifié qu'aucune convention ne peut être conclue pour une embauche bénéficiant d'une autre aide à l'emploi ;
Considérant que les dispositions précitées de l'article L. 323-6 du code du travail qui prévoient, à titre dérogatoire et sous réserve d'une autorisation, la possibilité de réduire le salaire versé aux travailleurs handicapés dont le rendement professionnel est notoirement diminué et ouvrent en conséquence aux intéressés droit à la garantie de ressources instituée par l'article L. 243-4 du code de l'action sociale et des familles, ont pour objet de faciliter l'emploi salarié des travailleurs handicapés dans le secteur ordinaire de production et comportent le versement d'un concours financé sur fonds publics ; qu'il s'agit ainsi d'une aide à l'emploi au sens de l'article L. 322-4-2 précité du code du travail ; que la règle de non-cumul du bénéfice du contrat initiative-emploi avec d'autres aides publiques à l'emploi édictée par cet article fait obstacle à ce que l'employeur d'un salarié bénéficiant d'un contrat initiative-emploi obtienne l'autorisation prévue par l'article L. 323-6 précité ;
Considérant qu'il suit de là qu'en estimant que M. YX, employeur de M. Y, pouvait prétendre au bénéfice de la réduction de salaire prévue par l'article L. 323 ;6 du code du travail, alors que M. Y avait été recruté sur un contrat initiative-emploi, la commission départementale des travailleurs handicapés, des mutilés de guerre et assimilés des Landes a entaché sa décision d'une erreur de droit ; que le MINISTRE DES AFFAIRES SOCIALES, DU TRAVAIL ET DE LA COHESION SOCIALE est fondé à en demander, pour ce motif, l'annulation ;
Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, en application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, de régler l'affaire au fond ;
Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que, M. Y ayant été recruté dans le cadre d'un contrat initiative-emploi, son employeur ne peut obtenir l'autorisation de pratiquer la réduction de salaire prévue par les dispositions de l'article L. 323-6 du code du travail ; que, par suite, M. YX n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par la décision attaquée, la commission technique d'orientation et de reclassement professionnel des Landes a rejeté sa demande ;
D E C I D E :
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Article 1er : La décision de la commission départementale des travailleurs handicapés, des mutilés de guerre et assimilés des Landes du 15 décembre 2003 est annulée.
Article 2 : La demande présentée par M. YX devant la commission départementale des travailleurs handicapés, des mutilés de guerre et assimilés des Landes est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au MINISTRE DE L'EMPLOI, DU TRAVAIL ET DE LA COHESION SOCIALE et à M. Benoît YX.