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11/05/2005 | FRANCE | N°264048

France | France, Conseil d'État, 7eme sous-section jugeant seule, 11 mai 2005, 264048


Vu la requête, enregistrée le 30 janvier 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE ; le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 17 décembre 2003 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 14 décembre 2003 décidant la reconduite à la frontière de M. X... Y ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. Y devant le tribunal administratif ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la conventi

on européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'ordo...

Vu la requête, enregistrée le 30 janvier 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE ; le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 17 décembre 2003 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 14 décembre 2003 décidant la reconduite à la frontière de M. X... Y ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. Y devant le tribunal administratif ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France en vigueur à la date de l'arrêté attaqué ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Francis Girault, Maître des Requêtes,

- les conclusions de M. Nicolas Boulouis, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 en vigueur à la date de l'arrêté attaqué : Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police, peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (...) 1°) Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement en France, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité (...) ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. Y..., de nationalité tunisienne, a été interpellé le 14 décembre 2003 et n'a pu justifier être entré régulièrement en France muni du visa exigé pour les ressortissants tunisiens ; qu'il ne justifiait pas être titulaire d'un titre de séjour en cours de validité et se trouvait ainsi dans le cas, prévu au 1° du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée, où le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;

Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ;

Considérant que M. Y... fait valoir qu'il est entré, en 1984, en France, à l'âge de cinq ans, avec ses parents, qu'il y a suivi sa scolarité et qu'il n'est retourné dans son pays d'origine qu'entre décembre 2002 et juillet 2003 ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier que l'intéressé, qui est célibataire et sans enfant, ne justifie pas de la réalité de son séjour en France pour la période allant de janvier 1997 à décembre 2003 ; qu'il a conservé des attaches dans son pays d'origine où vivent ses parents ; que, dans les circonstances de l'espèce, eu égard aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière, l'arrêté du PREFET DES HAUTS-DE-SEINE en date du 14 décembre 2003 n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie familiale, une atteinte excessive ; qu'il suit de là que c'est à tort que le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a jugé que l'arrêté attaqué méconnaissait les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant, toutefois, qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. Y... devant le tribunal administratif de Paris ;

Considérant que l'arrêté litigieux qui énonce les dispositions applicables et les considérations de fait qui justifient la mesure prise à l'encontre de M. Y Y... est suffisamment motivé ;

Considérant qu'aux termes de l'article 25 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 en vigueur à la date de l'arrêté attaqué : Ne peuvent faire l'objet d'un arrêté d'expulsion, en application de l'article 23 : (...) 2° L'étranger qui justifie par tous moyens résider en France habituellement depuis qu'il a atteint au plus l'âge de dix ans ; 3° L'étranger qui justifie par tous moyens résider en France habituellement depuis plus de quinze ans ... Les étrangers mentionnés au 1° à 6° ne peuvent faire l'objet d'une mesure de reconduite à la frontière en application de l'article 22 de la présente ordonnance ;

Considérant que s'il ressort des pièces du dossier que M. Y, né en 1978, a vécu en France au cours des années 1984 à 1996, la réalité de son séjour n'est pas établie entre janvier 1997 et décembre 2003 ; que l'intéressé reconnaît lui-même être retourné dans son pays d'origine entre décembre 2002 et juillet 2003 ; qu'ainsi il ne peut justifier d'une résidence habituelle en France depuis l'âge de dix ans, ni pendant plus de quinze ans ; que par suite, il ne peut se prévaloir des dispositions susmentionnées de l'article 25 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement du 17 décembre 2003, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 14 décembre 2003 ordonnant la reconduite à la frontière de M. Y... ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le jugement du 17 décembre 2003 du magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris est annulé.

Article 2 : La demande présentée devant le tribunal administratif de Paris par M. Y... est rejetée.

Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DES HAUTS-DE-SEINE, à M. X... Y et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.


Synthèse
Formation : 7eme sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 264048
Date de la décision : 11/05/2005
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 11 mai. 2005, n° 264048
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Delarue
Rapporteur ?: M. Francis Girault
Rapporteur public ?: M. Boulouis

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2005:264048.20050511
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