Vu la requête, enregistrée le 5 février 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DES PYRENEES-ATLANTIQUES ; le PREFET DES PYRENEES-ATLANTIQUES demande au Conseil d'Etat d'annuler le jugement du 9 janvier 2004 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Pau a, d'une part, annulé son arrêté du 6 janvier 2004 décidant la reconduite à la frontière de M. Mohamed Y et, d'autre part, mis à la charge de l'Etat une somme de 700 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu la convention internationale relative aux droits de l'enfant du 26 janvier 1990 ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Alain Christnacht, Conseiller d'Etat,
- les conclusions de M. Nicolas Boulouis, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 en vigueur à la date de l'arrêté litigieux : Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (...) 3° Si l'étranger, auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé (...) s'est maintenu sur le territoire au-delà d'un mois à compter de la date de notification du refus (...) ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. Y, de nationalité guinéenne, entré irrégulièrement en France le 2 décembre 2000, s'est vu refuser la reconnaissance de la qualité de réfugié par une décision de l'office français de protection des réfugiés et apatrides du 7 septembre 2001 ; que cette décision étant devenue définitive, le préfet de police a pris à son encontre une décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour qui lui a été notifiée, avec une invitation à quitter le territoire, le 24 octobre 2001 ; qu'il s'est ensuite maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de cette notification ; qu'ainsi, il se trouvait dans le cas où le préfet peut, en vertu des dispositions précitées, décider la reconduite à la frontière d'un étranger ; que le préfet de police a pris, le 22 février 2002, un arrêté de reconduite à la frontière à l'encontre de M. Y ; que, sur le même fondement, le PREFET DES PYRENEES-ATLANTIQUES a pris, le 6 janvier 2004, un arrêté ayant le même objet ;
Considérant que M. Y fait valoir qu'il vivait depuis deux ans en concubinage avec une ressortissante de Sierra Leone, dont il eu un enfant et qui en attendait un autre à la date de l'arrêté attaqué ; que celle-ci a bénéficié de la reconnaissance de la qualité de réfugié en France, depuis le 19 décembre 2003 ; que, compte tenu de la présence en Guinée de nombreux réfugiés de Sierra Leone, sa concubine serait menacée dans le cas d'un retour de M. Y en Guinée, tant par les membres des forces rebelles sierra léonaises qui y font des incursions que par les Guinéens ; qu'elle est ainsi donc dans l'impossibilité de résider en Guinée avec ses enfants à raison des risques qu'elle encourrait dans ce pays ; que, dès lors, la mesure de reconduite à la frontière de M. Y porterait une atteinte disproportionnée au droit de ce dernier au respect de sa vie privée et familiale ;
Considérant, toutefois, qu'eu égard aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière et, notamment, de ce que sa concubine, à supposer qu'elle ne puisse sans risque s'établir en Guinée, peut, en sa qualité de réfugiée résidant en France, demander pour M. Y le bénéfice du regroupement familial, il ne ressort pas des pièces du dossier que la mesure prise à l'encontre de celui-ci ait porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au but en vue duquel elle a été prise ; que c'est, dès lors, à tort que, pour annuler l'arrêté attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Pau s'est fondé sur ce qu'il méconnaissait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant, toutefois, qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. Y devant le tribunal administratif de Grenoble ;
Considérant que si M. Y, soutient, par la voie de l'exception, que la décision du PREFET DES PYRENEES-ATLANTIQUES du 24 octobre 2001 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour aurait méconnu les dispositions du 7° de l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France, il ne ressort pas des pièces du dossier, pour les raisons indiquées ci-dessus, que la décision de refus de séjour aurait porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus ;
Considérant que la décision par laquelle le PREFET DES PYRENEES-ATLANTIQUES a ordonné la reconduite à la frontière de M. Y et fixé le pays de destination énonce les considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde ; qu'elle est, par suite, suffisamment motivée ; que, pour les raisons indiquées ci-dessus, cette décision ne méconnaît pas les stipulations des articles 3-1 et 16 de la convention internationale de New York sur les droits de l'enfant du 26 janvier 1990 ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DES PYRENEES-ATLANTIQUES est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Pau a annulé son arrêté du 6 janvier 2004 ;
D E C I D E :
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Article 1er : Le jugement du magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Pau du 9 janvier 2004 est annulé.
Article 2 : La demande de M. Y devant le tribunal administratif de Pau est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DES PYRENEES-ATLANTIQUES et à M. Mohamed Y.