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18/05/2005 | FRANCE | N°266398

France | France, Conseil d'État, 6eme sous-section jugeant seule, 18 mai 2005, 266398


Vu la requête, enregistrée le 9 avril 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DES PYRENEES-ORIENTALES ; le PREFET DES PYRENEES-ORIENTALES demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 15 mars 2004 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Montpellier a annulé l'arrêté du 9 mars 2004 ordonnant la reconduite à la frontière de M. Mohammed X ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. X devant le tribunal administratif de Montpellier ;

3°) de mettre à la charge de M. X l

e versement d'une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de just...

Vu la requête, enregistrée le 9 avril 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DES PYRENEES-ORIENTALES ; le PREFET DES PYRENEES-ORIENTALES demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 15 mars 2004 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Montpellier a annulé l'arrêté du 9 mars 2004 ordonnant la reconduite à la frontière de M. Mohammed X ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. X devant le tribunal administratif de Montpellier ;

3°) de mettre à la charge de M. X le versement d'une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République algérienne démocratique et populaire, du 27 décembre 1968, relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles ;

Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Bertrand Dacosta, Maître des Requêtes,

- les conclusions de M. Mattias Guyomar, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (...) 2° Si l'étranger s'est maintenu sur le territoire au-delà de la durée de validité de son visa (...) ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X, de nationalité algérienne, s'est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité du visa de trente jours qui lui avait été délivré le 28 avril 2001 ; qu'il se trouvait ainsi dans le cas où, en application du 2° du I de l'article 22 de l'ordonnance du 22 novembre 1945, le préfet peut décider la reconduite à la frontière d'un étranger ;

Considérant que si M. X vivait depuis quelques mois en concubinage avec une ressortissante française qu'il projetait d'épouser, il n'est pas dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine, où résident sa mère et ses frères ; que, dans les circonstances de l'espèce, compte tenu de la durée et du caractère irrégulier de son séjour et eu égard aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière, l'arrêté attaqué n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels cet arrêté a été pris ; que, par suite, le PREFET DES PYRENEES-ORIENTALES est fondé à soutenir que c'est à tort que le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Montpellier s'est fondé sur ce motif pour annuler l'arrêté ordonnant la reconduite à la frontière de M. X ;

Considérant, toutefois, qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. X devant le tribunal administratif ;

Considérant que l'arrêté attaqué, qui comporte l'indication des motifs de droit et de fait qui en constituent le fondement, est suffisamment motivé ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le préfet des Pyrénées-Orientales a pris en compte la situation d'ensemble du requérant, y compris son état de concubinage et son projet de mariage ; qu'ainsi l'arrêté attaqué n'est entaché ni d'erreur de fait, ni d'erreur de droit ;

Considérant que si l'arrêté ordonnant la reconduite à la frontière de M. X a été pris quelques semaines avant la date prévue pour le mariage de celui-ci avec Mme Lalouette, cette mesure ne porte pas, par elle-même, atteinte au droit des intéressés de se marier ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier qu'elle ait eu pour seul but de faire échec à la célébration du mariage ; que, par suite, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 12 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et du détournement de pouvoir doivent être écartés ;

Considérant que la circonstance que M. X séjourne en France depuis 2001, soit domicilié chez sa concubine et dispose de ressources régulières n'est pas de nature à faire regarder l'arrêté attaqué comme entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DES PYRENEES-ORIENTALES est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Montpellier a annulé son arrêté du 9 mars 2004 ordonnant la reconduite à la frontière de M. X ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme réclamée par M. X devant le tribunal administratif au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. X la somme réclamée par l'Etat au même titre ;

D E C I D E :

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Article 1er : Le jugement du 15 mars 2004 du magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Montpellier est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. X devant le tribunal administratif de Montpellier est rejetée.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête du PREFET DES PYRENEES-ORIENTALES est rejeté.

Article 4 : La présente décision sera notifiée au PREFET DES PYRENEES-ORIENTALES, à M. Mohammed X et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.


Synthèse
Formation : 6eme sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 266398
Date de la décision : 18/05/2005
Sens de l'arrêt : Satisfaction totale
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 18 mai. 2005, n° 266398
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Bonichot
Rapporteur ?: M. Bertrand Dacosta
Rapporteur public ?: M. Guyomar

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2005:266398.20050518
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