Vu la requête enregistrée le 9 juillet 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Oumar A, demeurant 275, rue de Belleville à Paris (75019) ; M. A demande au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 4 juin 2004 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 3 mai 2004 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a décidé sa reconduite à la frontière et de la décision distincte fixant le pays de destination de la reconduite ;
2°) d'annuler cet arrêté et cette décision pour excès de pouvoir ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n°45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- les conclusions de M. Didier Casas, Commissaire du gouvernement ;
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article R. 741-8 du code de justice administrative : (...) Lorsque l'affaire est jugée par un magistrat jugeant seul, la minute du jugement est signée par ce magistrat et par le greffier de l'audience ; que le moyen tiré de l'inobservation de cette disposition manque en fait, la minute du jugement comportant bien les signatures ainsi requises, M. A n'ayant été destinataire que d'une ampliation de cette décision, laquelle n'avait pas à être revêtue desdites signatures ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée, en vigueur à la date de l'arrêté attaqué : Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police, peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : 1° Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité ; 2° Si l'étranger s'est maintenu sur le territoire au-delà de la durée de validité de son visa ... ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A, de nationalité ivoirienne, est entré régulièrement en France le 4 mars 2000, muni d'un passeport revêtu d'un visa de court séjour ; que le préfet de la Seine-Saint-Denis s'est fondé sur un texte qui ne lui était pas légalement applicable en décidant sa reconduite à la frontière sur le fondement du 1° de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée à raison d'une entrée prétendument irrégulière sur le territoire ;
Considérant, il est vrai, que le préfet de la Seine-Saint-Denis demande au Conseil d'Etat de substituer comme fondement légal de son arrêté les dispositions du 2° du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 ; qu'une telle substitution de base légale est possible dès lors que les deux dispositions permettent au préfet de prendre la même mesure et que la substitution de la seconde à la première comme base légale de l'arrêté de reconduite à la frontière n'a pas pour effet de priver l'intéressé des garanties de procédure qui lui sont offertes par la loi ; qu'il ressort des pièces du dossier qu'à la date de l'arrêté attaqué, le visa de M. A était venu à expiration, et qu'en conséquence il entrait effectivement dans le champ d'application de l'article 22-I-2° de l'ordonnance précitée ; que, par suite, la circonstance que le préfet ait pris son arrêté du 3 mai 2004 sur la base non de cet article 22-I-2° mais de l'article 22-I-1° de la même ordonnance n'est pas de nature à entacher cet arrêté d'illégalité ;
Considérant, en troisième lieu, que, pour demander l'annulation de la décision distincte fixant la Côte d'Ivoire comme destination de la reconduite, M. A expose qu'il est d'origine dioula, et que cette seule circonstance suffit à faire de lui la cible des partisans du régime au pouvoir dans ce pays ;
Considérant toutefois que les allégations de M. A, qui ne sont assorties d'aucune précision ni d'aucune pièce susceptible d'établir la réalité d'une menace le visant personnellement, sont insuffisantes à cet égard ; qu'il suit de là que le moyen ne peut qu'être écarté ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que M. A demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
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Article 1er : La requête de M. A est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Oumar A, au préfet de la Seine-Saint-Denis et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.