Vu la requête, enregistrée le 13 février 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DES ALPES-MARITIMES ; le PREFET DES ALPES-MARITIMES demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 15 janvier 2004 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Nice a annulé son arrêté du 13 janvier 2004 décidant la reconduite à la frontière de Mlle Khadija X à destination du Maroc ;
2°) de rejeter la demande présentée par Mlle X devant le tribunal administratif de Nice ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Martine Jodeau-Grymberg, Conseiller d'Etat,
- les conclusions de Mme Isabelle de Silva, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que Mlle X s'est maintenue sur le territoire français au-delà du délai d'un mois prévu par le 3° du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, en vigueur à la date de l'arrêté litigieux, après la notification, le 10 juillet 2003, de la décision du 2 juillet 2003 par laquelle le PREFET DES ALPES-MARITIMES a refusé de lui délivrer un titre de séjour ; qu'elle pouvait, dès lors, faire l'objet d'une mesure de reconduite à la frontière ;
Considérant que Mlle X, de nationalité marocaine, est entrée en France à l'âge de 24 ans révolus ; qu'elle est célibataire, sans enfant et conserve des attaches familiales au Maroc, où vivent ses parents ainsi que des frères et soeurs ; qu'ainsi, en ordonnant sa reconduite à la frontière, le PREFET DES ALPES-MARITIMES n'a pas porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect d'une vie privée et familiale normale protégé par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme ; que, dès lors, le PREFET DES ALPES-MARITIMES est fondé à soutenir que c'est à tort que le magistrat délégué s'est fondé sur ce motif pour annuler l'arrêté du 13 janvier 2004 ordonnant la reconduite à la frontière de Mlle X et fixant le Maroc comme pays de destination de la reconduite ;
Considérant, toutefois, qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mlle X devant le tribunal administratif de Nice et le Conseil d'Etat ;
Considérant que si Mlle X invoque les pressions que son père serait susceptible de lui imposer afin de la contraindre à un mariage forcé, il ne ressort pas des pièces du dossier, eu égard notamment à l'évolution de la législation marocaine sur la famille, que le préfet aurait commis une erreur manifeste d'appréciation ou méconnu les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en fixant le Maroc comme pays de destination ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DES ALPES-MARITIMES est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Nice a annulé son arrêté du 13 janvier 2004 ordonnant la reconduite à la frontière de Mlle X et fixant le Maroc comme pays de la reconduite ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demande Mlle X au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
--------------
Article 1er : Le jugement du 15 janvier 2004 du magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Nice est annulé.
Article 2 : La demande présentée par Mlle X devant le tribunal administratif de Nice et ses conclusions présentées devant le Conseil d'Etat tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DES ALPES-MARITIMES, à Mlle Khadija X et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.