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27/06/2005 | FRANCE | N°262408

France | France, Conseil d'État, 5eme et 4eme sous-sections reunies, 27 juin 2005, 262408


Vu le recours, enregistré le 4 décembre 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le MINISTRE DE L'INTERIEUR, DE LA SECURITE INTERIEURE ET DES LIBERTES LOCALES ; le ministre demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt en date du 25 septembre 2003 par lequel la cour administrative d'appel de Nancy a rejeté son recours tendant à l'annulation du jugement du 1er septembre 1998 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a annulé son arrêté en date du 23 avril 1997 prononçant à l'encontre de M. Denis X, sous-brigadier de la police nationale

, une exclusion temporaire pour une durée de deux ans ;

2°) réglan...

Vu le recours, enregistré le 4 décembre 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le MINISTRE DE L'INTERIEUR, DE LA SECURITE INTERIEURE ET DES LIBERTES LOCALES ; le ministre demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt en date du 25 septembre 2003 par lequel la cour administrative d'appel de Nancy a rejeté son recours tendant à l'annulation du jugement du 1er septembre 1998 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a annulé son arrêté en date du 23 avril 1997 prononçant à l'encontre de M. Denis X, sous-brigadier de la police nationale, une exclusion temporaire pour une durée de deux ans ;

2°) réglant l'affaire au fond, d'annuler le jugement du tribunal administratif et de rejeter la demande de M. X tendant à l'annulation de son arrêté du 23 avril 1997 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le décret n° 82-451 du 28 mai 1982 ;

Vu le décret n° 92-1191 du 6 novembre 1992 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Xavier de Lesquen, Maître des Requêtes,

- les observations de Me Odent, avocat de M. Denis X,

- les conclusions de M. Didier Chauvaux, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article 35 du décret du 28 mai 1982 relatif aux commissions administratives paritaires, lorsqu'elles siègent en formation restreinte, et notamment en conseil de discipline, seuls les membres titulaires et, éventuellement, leurs suppléants représentant le grade auquel appartient le fonctionnaire intéressé et les membres titulaires ou suppléants représentant le grade immédiatement supérieur ainsi qu'un nombre égal de représentants de l'administration sont appelés à délibérer ; qu'aux termes de l'article 2 du décret du 6 novembre 1992 relatif au statut particulier des gradés et gardiens de la paix de la police nationale : Le corps des gradés et gardiens de la paix comprend deux grades : / sous-brigadier et gardien de la paix ; brigadier-chef et brigadier ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis à la cour administrative d'appel de Nancy qu'un conseil de discipline a été réuni le 12 janvier 1993 pour examiner le cas de M. X, sous-brigadier de la police nationale, dans le cadre de la procédure disciplinaire conduite à son encontre ; qu'un agent du grade de brigadier-chef a participé aux délibérations ; qu'en estimant que cet agent avait un grade supérieur de deux grades à celui de M. X, alors qu'il résulte des dispositions précitées de l'article 2 du décret du 6 novembre 1992 en vigueur à la date à laquelle le conseil de discipline s'est réuni que l'agent ayant le titre de brigadier-chef était d'un grade immédiatement supérieur à celui de M. X dans le corps des gradés et gardiens de la paix qui ne comprend que deux grades, et en en déduisant que l'avis émis par le conseil de discipline était irrégulier, la cour a commis une erreur de droit ; qu'il suit de là que l'arrêt attaqué de la cour administrative d'appel de Nancy doit être annulé ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, le Conseil d'Etat, s'il prononce l'annulation d'une décision d'une juridiction administrative statuant en dernier ressort, peut régler l'affaire au fond si l'intérêt d'une bonne administration de la justice le justifie ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de régler l'affaire au fond ;

Considérant que, par arrêté du 17 septembre 1993, le ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire a prononcé la mise à la retraite d'office de M. X au motif qu'ayant prélevé, en plusieurs fois, quatre-vingt litres d'essence pour son usage personnel à la pompe du garage de sa compagnie et falsifié, à chaque fois, le registre de perception de carburant, il avait eu un comportement incompatible avec la fonction policière ; que cet arrêté a été annulé par un arrêt de la cour administrative d'appel de Nancy en date du 28 décembre 1995 au motif que, si ces agissements constituaient une faute de nature à justifier une sanction disciplinaire, la sanction infligée était entachée d'erreur manifeste d'appréciation ; que, par une nouvelle décision en date du 23 avril 1997, le MINISTRE DE L'INTERIEUR, DE LA SECURITE INTERIEURE ET DES LIBERTES LOCALES a réintégré M. X rétroactivement à compter du 28 septembre 1993 et prononcé à son encontre, à raison des mêmes faits, la sanction de l'exclusion de ses fonctions pour une durée de deux ans ;

Considérant que l'arrêt de la cour administrative d'appel de Nancy en date du 28 décembre 1995, devenu définitif, a annulé la première sanction prise contre M. X au seul motif d'une erreur manifeste d'appréciation ; qu'il n'a censuré aucune irrégularité dans la procédure préalable à l'intervention de cette sanction ; que la seconde décision lui infligeant une sanction à raison des faits ayant donné lieu à la sanction annulée n'avait dès lors pas à être précédée d'une nouvelle procédure de consultation de l'instance paritaire compétente ; que, par suite, le MINISTRE DE L'INTERIEUR, DE LA SECURITE INTERIEURE ET DES LIBERTES LOCALES est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Strasbourg s'est fondé sur ce motif pour annuler la décision du ministre en date du 23 avril 1997 en tant qu'elle prononce l'exclusion temporaire des fonctions pour une durée de deux ans ;

Considérant toutefois qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. X devant le tribunal administratif de Strasbourg ;

Considérant qu'ainsi qu'il a déjà été dit, le moyen tiré de ce que la participation d'un agent du grade de brigadier-chef aux délibérations du conseil de discipline réuni le 12 juillet 1993 pour examiner le cas de M. X aurait entaché d'irrégularité l'avis rendu par ce conseil doit être écarté ;

Considérant qu'aucun texte n'enferme dans un délai déterminé l'exercice de l'action disciplinaire ; que la circonstance que M. X ait fait précédemment l'objet d'une sanction disciplinaire annulée par l'arrêt de la cour administrative de Nancy en date du 28 décembre 1995 ne faisait pas, par elle-même, obstacle à ce que le MINISTRE DE L'INTERIEUR, DE LA SECURITE INTERIEURE ET DES LIBERTES LOCALES prenne une nouvelle décision de sanction ; que, ce faisant, le ministre n'a entaché sa décision d'aucune erreur de droit ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'en prononçant à l'encontre de M. X la sanction de l'exclusion temporaire des fonctions pour une durée de deux ans le MINISTRE DE L'INTERIEUR, DE LA SECURITE INTERIEURE ET DES LIBERTES LOCALES, alors même que le comportement professionnel de l'intéressé n'avait pas auparavant fait l'objet de critiques et que les faits reprochés n'ont pas porté atteinte, en l'espèce, à la considération du corps auquel il appartient, n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le MINISTRE DE L'INTERIEUR, DE LA SECURITE INTERIEURE ET DES LIBERTES LOCALES est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a annulé sa décision en date du 23 avril 1997 ;

Sur les conclusions de M. X tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que M. X demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt en date du 25 septembre 2003 de la cour administrative d'appel de Nancy et le jugement en date du 1er septembre 1998 du tribunal administratif de Strasbourg sont annulés.

Article 2 : La demande présentée par M. X devant le tribunal administratif de Strasbourg est rejetée.

Article 3 : Les conclusions de M. X tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : La présente décision sera notifiée au MINISTRE D'ETAT, MINISTRE DE L'INTERIEUR ET DE L'AMENAGEMENT DU TERRITOIRE et à M. Denis X.


Synthèse
Formation : 5eme et 4eme sous-sections reunies
Numéro d'arrêt : 262408
Date de la décision : 27/06/2005
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 27 jui. 2005, n° 262408
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Martin
Rapporteur ?: M. Xavier de Lesquen
Rapporteur public ?: M. Chauvaux
Avocat(s) : ODENT

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2005:262408.20050627
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