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08/07/2005 | FRANCE | N°264366

France | France, Conseil d'État, 2eme et 7eme sous-sections reunies, 08 juillet 2005, 264366


Vu le recours, enregistré le 9 février 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le MINISTRE DE LA SANTE, DE LA FAMILLE ET DES PERSONNES HANDICAPEES ; le ministre demande au Conseil d'Etat :

1°) à titre principal, d'annuler l'ordonnance du 22 janvier 2004 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Nice a suspendu l'exécution de la décision du 23 juillet 2003 de la commission exécutive de l'Agence régionale de l'hospitalisation de Provence-Alpes-Côte-d'Azur refusant à la clinique Saint-Michel le renouvellement de l'autorisation

de fonctionnement de huit lits de médecine et a enjoint à l'Agence r...

Vu le recours, enregistré le 9 février 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le MINISTRE DE LA SANTE, DE LA FAMILLE ET DES PERSONNES HANDICAPEES ; le ministre demande au Conseil d'Etat :

1°) à titre principal, d'annuler l'ordonnance du 22 janvier 2004 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Nice a suspendu l'exécution de la décision du 23 juillet 2003 de la commission exécutive de l'Agence régionale de l'hospitalisation de Provence-Alpes-Côte-d'Azur refusant à la clinique Saint-Michel le renouvellement de l'autorisation de fonctionnement de huit lits de médecine et a enjoint à l'Agence régionale de l'hospitalisation, dans le cas où le MINISTRE DE LA SANTE, DE LA FAMILLE ET DES PERSONNES HANDICAPEES rejetterait le recours hiérarchique présenté par la clinique, de réexaminer la demande de celle-ci et de rendre sa décision dans un délai de quinze jours à compter de la notification de la décision ministérielle, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

2°) à titre subsidiaire, d'annuler l'article 2 de l'ordonnance du 22 janvier 2004 susvisée en ce qu'il enjoint à l'Agence régionale de l'hospitalisation de Provence-Alpes-Côte-d'Azur, dans le cas où le MINISTRE DE LA SANTE, DE LA FAMILLE ET DES PERSONNES HANDICAPEES rejetterait le recours hiérarchique présenté par la clinique Saint-Michel, de réexaminer la demande et de rendre sa décision dans un délai de quinze jours à compter de la notification de la décision ministérielle, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

3°) à titre encore subsidiaire, d'annuler l'ordonnance en tant qu'elle met à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761 ;1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Catherine Chadelat, Conseiller d'Etat,

- les observations de la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle, avocat de la clinique Saint-Michel,

- les conclusions de Mme X... de Silva, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 6122 ;10 du code de la santé publique, relatif aux autorisations de fonctionnement des établissements de santé, dans sa rédaction applicable en l'espèce : « L'autorisation est donnée ou renouvelée par l'agence régionale de l'hospitalisation après avis du comité régional de l'organisation sanitaire et sociale. Un recours hiérarchique contre la décision peut être formé par tout intéressé devant le ministre chargé de la santé qui statue dans un délai maximum de six mois…/ Dans chaque cas, la décision du ministre ou de l'agence régionale de l'hospitalisation est notifiée au demandeur dans un délai maximum de six mois suivant la date d'expiration de la période de réception mentionnée à l'article L. 6122 ;9. Sauf dans le cas d'un renouvellement d'autorisation prévu par l'article L. 6122 ;8, l'absence de notification d'une réponse dans ce délai vaut rejet de la demande d'autorisation » ; qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article R. 712 ;44 du code de la santé publique : « Lorsqu'un recours hiérarchique a été formé contre une décision de la commission exécutive de l'agence régionale de l'hospitalisation accordant ou refusant la délivrance ou le renouvellement d'une autorisation, le recours est réputé rejeté à l'expiration d'un délai de six mois à partir de sa réception par le ministre chargé de la santé si aucune décision de sens contraire n'est intervenue dans ce délai » ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés que la clinique Saint-Michel, après s'être vu opposer, le 23 juillet 2003, un refus de renouvellement, par l'Agence régionale de l'hospitalisation de Provence-Alpes-Côte-d'Azur, de l'autorisation de fonctionnement de huit lits de médecine en hospitalisation complète, a exercé un recours hiérarchique contre cette décision le 3 septembre 2003 ;

Considérant que, par l'ordonnance attaquée, le juge des référés du tribunal administratif de Nice a, en premier lieu, suspendu le refus de l'Agence régionale de l'hospitalisation de Provence-Alpes-Côte-d'Azur d'autoriser la clinique Saint-Michel à faire fonctionner huit lits de médecine en hospitalisation complète, en deuxième lieu, fait injonction à l'Agence régionale de l'hospitalisation, pour le cas où le ministre chargé de la santé rejetterait le recours hiérarchique de la clinique Saint-Michel, de réexaminer la demande de celle-ci dans les quinze jours de la notification de la décision de rejet du recours hiérarchique et, en troisième lieu, mis à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761 ;1 du code de justice administrative ;

Considérant, tout d'abord, que l'exercice par la clinique Saint-Michel du recours hiérarchique devant le ministre chargé de la santé, dont la décision se substitue à celle de l'Agence régionale de l'hospitalisation de Provence-Alpes-Côte-d'Azur, a eu pour effet de dessaisir cette agence ; que, dès lors, en enjoignant à l'Agence régionale de l'hospitalisation de Provence-Alpes-Côte-d'Azur de réexaminer la demande en cas de rejet du recours par le ministre, le juge des référés du tribunal administratif de Nice a entaché son ordonnance d'une première erreur de droit ;

Considérant, ensuite, qu'en vertu de l'article L. 761 ;1 du code de justice administrative, seule une partie au litige peut être condamnée à payer à une autre partie la somme que cette dernière demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'en mettant ainsi à la charge de l'Etat, par l'ordonnance attaquée, une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761 ;1 du code de justice administrative, alors que l'Etat a simplement présenté des observations devant le juge des référés et n'était pas partie à l'instance, le juge des référés du tribunal administratif de Nice a entaché sa décision d'une seconde erreur de droit ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le MINISTRE DE LA SANTE, DE LA FAMILLE ET DES PERSONNES HANDICAPEES est fondé à demander l'annulation de l'ordonnance attaquée ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 821 ;2 du code de justice administrative et de régler l'affaire au titre de la procédure de référé engagée ;

Considérant que le ministre ayant été saisi d'un recours hiérarchique le 3 septembre 2003, l'autorisation sollicitée a été implicitement rejetée à l'expiration du délai de six mois prévu à l'article L. 712 ;44 précité ; que cette décision implicite se substituant à la décision de l'Agence régionale de l'hospitalisation de Provence-Alpes-Côte-d'Azur, les conclusions à fin de suspension de la décision du 23 juillet 2003 par laquelle l'agence a opposé un refus à la demande de la clinique Saint-Michel sont devenues sans objet ; qu'il n'y a plus lieu de statuer sur ces conclusions et, par voie de conséquence, sur les conclusions à fin d'injonction ;

Considérant, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, que l'Etat n'était pas partie à l'instance devant le juge des référés ; que, par suite, les conclusions de la clinique Saint-Michel présentées devant le tribunal administratif de Nice tendant à ce qu'il soit mise à sa charge le versement d'une somme au titre des dispositions de l'article L. 761 ;1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;

Considérant que ces mêmes dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que la clinique Saint-Michel demande au même titre devant le Conseil d'Etat ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'ordonnance du 22 janvier 2004 du juge des référés du tribunal administratif de Nice est annulée.

Article 2 : Il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions à fin de suspension de la décision de l'Agence régionale de l'hospitalisation de Provence-Alpes-Côte-d'Azur du 23 juillet 2003 ainsi que sur les conclusions à fin d'injonction présentées par la clinique Saint-Michel devant le juge des référés du tribunal administratif de Nice.

Article 3 : Les conclusions présentées par la clinique Saint-Michel devant le juge des référés du tribunal administratif de Nice et devant le Conseil d'Etat tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761 ;1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : La présente décision sera notifiée au MINISTRE DES SOLIDARITES, DE LA SANTE ET DE LA FAMILLE, à la clinique Saint-Michel et à l'Agence régionale de l'hospitalisation de Provence-Alpes-Côte-d'Azur.


Synthèse
Formation : 2eme et 7eme sous-sections reunies
Numéro d'arrêt : 264366
Date de la décision : 08/07/2005
Sens de l'arrêt : Non-lieu
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

PROCÉDURE - INTRODUCTION DE L'INSTANCE - LIAISON DE L'INSTANCE - RECOURS ADMINISTRATIF PRÉALABLE - EXERCICE D'UN TEL RECOURS - EFFETS - DESSAISISSEMENT DE L'AUTORITÉ ADMINISTRATIVE AUTEUR DE LA DÉCISION INITIALE - CONSÉQUENCE - JUGE DES RÉFÉRÉS SAISI D'UNE DEMANDE DE SUSPENSION DE LA DÉCISION INITIALE NE POUVANT PRONONCER D'INJONCTION À L'ENCONTRE DE L'AUTORITÉ AUTEUR DE CETTE DÉCISION [RJ1].

54-01-02-01 L'exercice d'un recours administratif préalable obligatoire, qui donnera lieu à une décision se substituant à la décision administrative initiale, a pour effet de dessaisir l'autorité administrative auteur de cette décision initiale. Dès lors, commet une erreur de droit le juge des référés qui, saisi d'une demande tendant à la suspension de l'exécution de la décision administrative initiale après que le justiciable a exercé le recours administratif obligatoire, prononce une injonction à l'encontre de l'autorité administrative qui en est l'auteur.

PROCÉDURE - PROCÉDURES INSTITUÉES PAR LA LOI DU 30 JUIN 2000 - RÉFÉRÉ SUSPENSION (ART - L - 521-1 DU CODE DE JUSTICE ADMINISTRATIVE) - POUVOIRS ET DEVOIRS DU JUGE - POUVOIRS DU JUGE - JUGE DES RÉFÉRÉS SAISI D'UNE DEMANDE DE SUSPENSION D'UNE DÉCISION À L'ENCONTRE DE LAQUELLE A ÉTÉ EXERCÉ UN RECOURS ADMINISTRATIF PRÉALABLE OBLIGATOIRE [RJ1 ] - POUVOIR DE PRONONCER UNE INJONCTION À L'ENCONTRE DE L'AUTORITÉ ADMINISTRATIVE AYANT PRIS LA DÉCISION INITIALE - ABSENCE.

54-035-02-04 L'exercice d'un recours administratif préalable obligatoire, qui donnera lieu à une décision se substituant à la décision administrative initiale, a pour effet de dessaisir l'autorité administrative auteur de cette décision initiale. Dès lors, commet une erreur de droit le juge des référés qui, saisi d'une demande tendant à la suspension de l'exécution de la décision administrative initiale après que le justiciable a exercé le recours administratif obligatoire, prononce une injonction à l'encontre de l'autorité administrative qui en est l'auteur.


Références :

[RJ1]

Comp. Section, 12 octobre 2001, Société Produits Roche, p. 463.


Publications
Proposition de citation : CE, 08 jui. 2005, n° 264366
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Martin
Rapporteur ?: Mme Catherine Chadelat
Rapporteur public ?: Mme de Silva
Avocat(s) : SCP NICOLAY, DE LANOUVELLE

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2005:264366.20050708
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