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08/07/2005 | FRANCE | N°272283

France | France, Conseil d'État, 6eme et 1ere sous-sections reunies, 08 juillet 2005, 272283


Vu l'ordonnance du 9 septembre 2004, enregistrée le 16 septembre 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'État, par laquelle le président du tribunal administratif de Nice a transmis, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, la demande présentée à ce tribunal par M. Eric X demeurant ... ;

Vu la requête, enregistrée le 7 septembre 2004 au greffe du tribunal administratif de Nice, présentée par M. X ; M. X demande au juge administratif :

1°) d'annuler la décision du 23 juin 2004 par laquelle le procureur général près la cour d'

appel d'Aix-en-Provence a fixé à 4 % le taux d'attribution individuelle de ...

Vu l'ordonnance du 9 septembre 2004, enregistrée le 16 septembre 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'État, par laquelle le président du tribunal administratif de Nice a transmis, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, la demande présentée à ce tribunal par M. Eric X demeurant ... ;

Vu la requête, enregistrée le 7 septembre 2004 au greffe du tribunal administratif de Nice, présentée par M. X ; M. X demande au juge administratif :

1°) d'annuler la décision du 23 juin 2004 par laquelle le procureur général près la cour d'appel d'Aix-en-Provence a fixé à 4 % le taux d'attribution individuelle de sa prime modulable ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le décret n° 2003-1284 du 26 décembre 2003 ;

Vu l'arrêté interministériel du 17 septembre 2004 pris en application du décret n° 2003-1284 du 26 décembre 2003 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Olivier Henrard, Auditeur,

- les observations de la SCP Gaschignard, avocat de M. X,

- les conclusions de M. Mattias Guyomar, Commissaire du gouvernement ;

Sur l'intervention du Syndicat de la magistrature :

Considérant que le Syndicat de la magistrature a intérêt à l'annulation de la décision attaquée ; qu'ainsi, son intervention est recevable ;

Sur la légalité de la décision attaquée et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :

Considérant que le décret du 26 décembre 2003 relatif au régime indemnitaire de certains magistrats de l'ordre judiciaire prévoit, à son article 1er, qu'une indemnité peut être allouée aux magistrats de l'ordre judiciaire exerçant leurs fonctions en juridiction ; que cette indemnité, destinée à rémunérer l'importance et la valeur des services rendus et à tenir compte des sujétions afférentes à l'exercice de leurs fonctions comprend, notamment, une prime modulable attribuée, en vertu de l'article 3 du décret, « en fonction de la contribution du magistrat au bon fonctionnement de l'institution judiciaire » ; que l'article 7 du décret précise que : « La prime modulable est calculée en pourcentage du traitement indiciaire brut. Elle est versée mensuellement./ Le montant des crédits disponibles au titre de la prime modulable pour les magistrats du siège, d'une part, et du parquet, d'autre part (…), est déterminé par application d'un taux moyen à la masse des traitements indiciaires des magistrats concernés./ Le taux d'attribution individuelle de la prime modulable est fixé :/ - pour les magistrats exerçant en juridiction, (…) par le procureur général près la cour d'appel ou le procureur de la République près le tribunal supérieur d'appel pour chaque magistrat du parquet de leur ressort, sur proposition du chef de juridiction sous l'autorité duquel est placé le magistrat pour ceux qui sont affectés dans une juridiction du premier degré (…) » ; que l'arrêté interministériel du 17 septembre 2004, applicable à la prime modulable attribuée pour le quatrième trimestre 2004, précise à son article 2 : « Le taux moyen de la prime modulable (…) est fixé à 8%./ Le taux maximal d'attribution individuelle de cette prime est fixé à 15 % (…) » ;

Considérant que M. X, procureur de la République près le tribunal de grande instance de Nice, demande l'annulation de la décision du 23 juin 2004 par laquelle le procureur général près la cour d'appel d'Aix-en-Provence a fixé à 4 % le taux d'attribution individuelle de sa prime modulable au titre du quatrième trimestre 2004 ;

Considérant qu'il ressort des termes mêmes du décret précité du 26 décembre 2003 que l'attribution de la prime modulable ne peut être légalement fondée que sur l'appréciation de la qualité et de la quantité du travail fourni par un magistrat et, de manière générale, de sa contribution au bon fonctionnement du service public de la justice ; que, compte tenu des responsabilités spécifiques qui incombent aux procureurs de la République en qualité de chefs de parquets, il appartient aux procureurs généraux de fixer le taux de prime modulable de ces magistrats au regard, tant de la qualité et de la quantité de leur propre travail juridictionnel et administratif, que de l'activité du parquet placé sous leur autorité ;

Considérant qu'en se fondant, pour fixer le taux de prime contesté, sur la seule circonstance qu'un différend s'était élevé entre lui-même et le procureur de la République de Nice concernant les modalités de mise en oeuvre de la prime modulable au sein de ce parquet, à l'exclusion de toute considération relative à la qualité et à la quantité du travail de M. X ou du service rendu par le parquet dont il est responsable, le procureur général près la cour d'appel d'Aix-en-Provence a fait une inexacte application du décret du 26 décembre 2003 ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la décision attaquée doit être annulée ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros que demande M. X au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'intervention du Syndicat de la magistrature est admise.

Article 2 : La décision du 23 juin 2004 du procureur général près la cour d'appel d'Aix-en-Provence est annulée.

Article 3 : L'Etat versera à M. X la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. Eric X, au Syndicat de la magistrature et au garde des sceaux, ministre de la justice.


Sens de l'arrêt : Satisfaction totale
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

37-04-02-01 JURIDICTIONS ADMINISTRATIVES ET JUDICIAIRES. - MAGISTRATS ET AUXILIAIRES DE LA JUSTICE. - MAGISTRATS DE L'ORDRE JUDICIAIRE. - STATUT, DROITS, OBLIGATIONS ET GARANTIES. - RÉGIME INDEMNITAIRE - PRIME MODULABLE PRÉVUE PAR LE DÉCRET DU 26 DÉCEMBRE 2003 - CRITÈRES LÉGAUX DE MODULATION.

37-04-02-01 Le décret du 26 décembre 2003 relatif au régime indemnitaire de certains magistrats de l'ordre judiciaire prévoit, à son article 1er, qu'une indemnité peut être allouée aux magistrats de l'ordre judiciaire exerçant leurs fonctions en juridiction. Cette indemnité, destinée à rémunérer l'importance et la valeur des services rendus et à tenir compte des sujétions afférentes à l'exercice de leurs fonctions comprend, notamment, une prime modulable attribuée, en vertu de l'article 3 du décret, « en fonction de la contribution du magistrat au bon fonctionnement de l'institution judiciaire ». Il résulte de ces dispositions que l'attribution de la prime modulable ne peut être légalement fondée que sur l'appréciation de la qualité et de la quantité du travail fourni par un magistrat et, de manière générale, de sa contribution au bon fonctionnement du service public de la justice. Compte tenu des responsabilités spécifiques qui incombent aux procureurs de la République en qualité de chefs de parquets, il appartient aux procureurs généraux de fixer le taux de prime modulable de ces magistrats au regard, tant de la qualité et de la quantité de leur propre travail juridictionnel et administratif, que de l'activité du parquet placé sous leur autorité. Ainsi, fait une inexacte application du décret du 26 décembre 2003 le procureur général près d'une cour d'appel qui se fonde, pour fixer le taux de prime du procureur de la République près l'un des tribunaux de grande instance de son ressort, sur la seule circonstance qu'un différend s'était élevé entre lui-même et ce procureur concernant les modalités de mise en oeuvre de la prime modulable au sein du parquet dont ce dernier est responsable, à l'exclusion de toute considération relative à la qualité et à la quantité du travail de l'intéressé ou du service rendu par le parquet dont il est responsable.


Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 08 jui. 2005, n° 272283
Publié au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : M. Martin
Rapporteur ?: M. Olivier Henrard
Rapporteur public ?: M. Guyomar
Avocat(s) : SCP GASCHIGNARD

Origine de la décision
Formation : 6eme et 1ere sous-sections reunies
Date de la décision : 08/07/2005
Date de l'import : 05/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 272283
Numéro NOR : CETATEXT000008214996 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2005-07-08;272283 ?
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