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27/07/2005 | FRANCE | N°252847

France | France, Conseil d'État, 10eme et 9eme sous-sections reunies, 27 juillet 2005, 252847


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 24 décembre 2002 et 17 avril 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Alain YX, demeurant ... ; M. YX demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt du 24 octobre 2002 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement du 27 mars 1997 du tribunal administratif de Grenoble rejetant sa demande en décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle il a été assujetti au titre de l'année 1985 et des pénalit

s correspondantes ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code ...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 24 décembre 2002 et 17 avril 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Alain YX, demeurant ... ; M. YX demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt du 24 octobre 2002 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement du 27 mars 1997 du tribunal administratif de Grenoble rejetant sa demande en décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle il a été assujetti au titre de l'année 1985 et des pénalités correspondantes ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Yves Salesse, Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Choucroy, Gadiou, Chevallier, avocat de M. X...,

- les conclusions de Mme Marie-Hélène Mitjavile, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la S.A. Alain Y, qui a pour objet le commerce de gros et de détail de vêtements féminins et dont M. YX était le président directeur général, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur les exercices clos les 31 décembre 1985, 1986 et 1987 ; qu'à la suite de ce contrôle, l'administration fiscale a notamment soumis à l'impôt sur le revenu, dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux, au taux de 16 %, une plus-value de 11 000 000 F réalisée par M. YX lors de la cession à cette société, le 19 septembre 1985, de la marque Alain Y et d'autres marques complémentaires, que l'intéressé avait omis de déclarer ; que, dans sa réponse en date du 19 janvier 1989 à la notification de redressements du 12 décembre 1988, M. YX n'a pas contesté le principe du redressement dont il était ainsi l'objet mais a sollicité la taxation de la plus-value dans la catégorie des bénéfices non commerciaux au taux de 11 % ; que cette demande a été rejetée par une réponse de l'administration en date du 18 janvier 1989 ; que M. YX demande l'annulation de l'arrêt en date du 24 octobre 2002 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement du tribunal administratif de Grenoble du 27 mars 1997 rejetant sa demande de réduction de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu qui lui a été assignée au titre de l'année 1985 à raison de cette plus-value ;

Considérant qu'aux termes de l'article 92 du code général des impôts dans sa rédaction alors applicable : 1. Sont considérés comme provenant de l'exercice d'une profession non commerciale ou comme revenus assimilés aux bénéfices non commerciaux, les bénéfices des professions libérales, des charges et offices dont les titulaires n'ont pas la qualité de commerçants et de toutes occupations, exploitation lucratives et sources de profit ne se rattachant pas à une autre catégorie de bénéfices ou revenus./ 2. Ces bénéfices comprennent notamment…/ Les produits perçus par les inventeurs au titre soit de la concession de licences d'exploitation de leurs brevets, soit de la cession ou concession de marques de fabrique, procédés ou formules de fabrication… ; qu'aux termes du I de l'article 93 quater du même code, dans sa rédaction alors applicable : Les plus-values réalisées sur des immobilisations sont soumises au régime des articles 39 duodecies à 39 quindecies./ Ce régime est également applicable aux produits de la propriété industrielle définis à l'article 39 terdecies quelle que soit la qualité de leur bénéficiaire./ Le taux d'imposition des plus-values à long terme est cependant ramené à 11 % dans le cas particulier des contribuables exerçant une profession non commerciale ; qu'aux termes, enfin, du premier alinéa du I-1 de l'article 39 quindecies du même code : … le montant net des plus-values à long terme… fait l'objet d'une imposition séparée au taux de 16 % ;

Considérant que la cour administrative d'appel de Lyon a jugé que M. YX ne pouvait bénéficier du taux de 11 % prévu par les dispositions précitées de l'article 93 quater, dès lors que, si les produits financiers qu'il retirait, précédemment à leur cession, de l'exploitation de ses marques, étaient imposables dans la catégorie des bénéfices non commerciaux en vertu de l'article 92 du code général des impôts, ils n'étaient pas des bénéfices provenant de l'exercice d'une profession non commerciale au sens de ce même article et de l'article 93 quater ;

Considérant qu'il résulte de la combinaison des dispositions précitées des articles 92 et 93 quater du code général des impôts que les produits perçus par les inventeurs au titre de la cession ou de la concession de leurs marques de fabrique sont regardés comme provenant de l'exercice d'une profession non commerciale et bénéficient du taux d'imposition de 11 % des plus-values à long terme, quelle que soit l'activité professionnelle à laquelle ils se livrent par ailleurs et l'importance de leurs autres revenus ; qu'ainsi, en jugeant comme il a été dit ci-dessus, la cour administrative d'appel de Lyon a commis une erreur de droit ; que, dès lors, M. YX est fondé à demander l'annulation de l'arrêt attaqué ;

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, par application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, de régler l'affaire au fond ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction alors applicable : L'administration adresse au contribuable une notification de redressement qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation./ Lorsque l'administration rejette les observations du contribuable sa réponse doit également être motivée ;

Considérant que, dans ses observations en date du 10 janvier 1989, M. YX, tout en acceptant le caractère imposable de la plus-value, a contesté le taux d'imposition de 16 % retenu par l'administration et demandé l'application du taux de 11 % au motif que l'exploitation antérieure de ses marques avait produit des revenus imposés dans la catégorie des bénéfices non commerciaux ; que, dans sa réponse du 18 janvier 1989, l'administration a fait valoir que le régime d'imposition au taux de 11 % prévu par les dispositions précitées de l'article 93 quater du code général des impôts n'était plus possible pour les opérations intervenues postérieurement au 31 décembre 1984, en se référant à une instruction administrative 5G-7-85 du 29 mai 1985 ; que l'administration respecte l'obligation de motivation prévue par l'article L. 57 précité lorsque, pour répondre aux observations du contribuable, elle donne les informations qui lui permettent de comprendre sa décision, quel que soit le bien-fondé de la position qu'elle prend ; qu'en l'espèce la réponse de l'administration aux observations de M. YX explique clairement les raisons du rejet de sa demande ; qu'ainsi elle satisfait aux exigences de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales ;

Considérant que, si M. YX soutient que la décision du 17 novembre 1992 par laquelle le directeur régional des impôts a rejeté sa réclamation est insuffisamment motivée, un tel moyen est sans incidence sur la régularité de la procédure d'imposition ;

Sur le bien-fondé des impositions litigieuses :

Considérant, en premier lieu, que M. YX soutient que les marques qu'il a cédées à la société Alain Y sont des marques de fabrique, les produits griffés Alain Y ayant été créés par lui et fabriqués sous son contrôle avec des matières premières sélectionnées par ses soins ; que toutefois, par le contrat du 19 septembre 1985, M. YX a cédé à la SA Alain Y la propriété de la marque Alain Y et de marques complémentaires, ainsi que des divers enregistrements auxquels elles ont donné lieu, en France et dans d'autres pays ; que cette cession a pour seul objet le transfert du droit d'utilisation des marques dans les différentes formes sous lesquelles elles sont présentées et ne concerne aucun procédé de fabrication, aucun modèle particulier de vêtement ni aucun produit intermédiaire lié à un procédé de fabrication spécifique ; que le contrat ne prévoit aucune intervention de M. YX dans la production ; qu'ainsi les marques cédées par le requérant doivent être regardées, pour l'application des dispositions précitées du code général des impôts, comme des marques commerciales et non comme des marques de fabrique ; que dès lors il ne peut bénéficier, pour la plus-value qu'il a réalisée en 1985, du taux d'imposition de 11 % prévu par l'article 93 quater du code général des impôts ;

Considérant, en second lieu, que M. YX ne saurait se prévaloir, en tout état de cause, sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 80 A et L. 80 B du livre des procédures fiscales, de la circonstance, qui ne constitue pas une prise de position formelle de l'administration sur la plus-value litigieuse, que les produits qu'il a antérieurement tirés de l'exploitation de ses marques ont été imposés dans la catégorie des bénéfices non commerciaux ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. YX n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement du 27 mars 1997, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que demande M. YX au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt du 24 octobre 2002 de la cour administrative d'appel de Lyon est annulé.

Article 2 : La requête présentée par M. YX devant la cour administrative d'appel de Lyon est rejetée.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. Alain YX et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.


Synthèse
Formation : 10eme et 9eme sous-sections reunies
Numéro d'arrêt : 252847
Date de la décision : 27/07/2005
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-02-05-01 CONTRIBUTIONS ET TAXES. - IMPÔTS SUR LES REVENUS ET BÉNÉFICES. - REVENUS ET BÉNÉFICES IMPOSABLES - RÈGLES PARTICULIÈRES. - BÉNÉFICES NON COMMERCIAUX. - PERSONNES, PROFITS, ACTIVITÉS IMPOSABLES. - INVENTEURS - PRODUITS DE LA CESSION OU CONCESSION D'UNE MARQUE (ART. 92 ET 93 QUATER DU CGI) - A) MARQUE DE FABRIQUE [RJ1] - B) MARQUE COMMERCIALE.

19-04-02-05-01 a) Il résulte de la combinaison des dispositions des articles 92 et 93 quater du code général des impôts, dans leur rédaction applicable aux exercices clos en 1985, 1986 et 1987, que les produits perçus par les inventeurs au titre de la cession ou de la concession de leurs marques de fabrique sont regardés comme provenant de l'exercice d'une profession non commerciale et bénéficient du taux d'imposition de 11 % des plus-values à long terme, quelle que soit l'activité professionnelle à laquelle ils se livrent par ailleurs et l'importance de leurs autres revenus.,,b) Une marque vestimentaire ayant donné lieu à un contrat de cession qui a pour seul objet le transfert du droit d'utilisation de la marque dans les différentes formes sous lesquelles elle est présentée, qui ne concerne aucun procédé de fabrication, aucun modèle particulier de vêtement ni aucun produit intermédiaire lié à un procédé de fabrication spécifique, et qui ne prévoit aucune intervention de la partie cédante dans la production, doit être regardée comme une marque commerciale et non comme une marque de fabrique au sens de l'article 92 du code général des impôts. Par suite, le cédant ne peut bénéficier du taux d'imposition de 11% prévu par l'article 93 quater du code.


Références :

[RJ1]

Cf. 11 juillet 1984, Ministre du budget c/ Barraud, p. 262 ;

Plénière 8 avril 1991, Renault, p. 123.


Publications
Proposition de citation : CE, 27 jui. 2005, n° 252847
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Martin
Rapporteur ?: M. Yves Salesse
Rapporteur public ?: Mme Mitjavile
Avocat(s) : SCP CHOUCROY, GADIOU, CHEVALLIER

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2005:252847.20050727
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