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27/07/2005 | FRANCE | N°263291

France | France, Conseil d'État, 5eme sous-section jugeant seule, 27 juillet 2005, 263291


Vu la requête, enregistrée le 6 janvier 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DU VAL D'OISE ; le PREFET DU VAL-D'OISE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 5 décembre 2003 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé son arrêté du 24 novembre 2003 décidant la reconduite à la frontière de Mme Safia X ;

2°) de rejeter la demande présentée par Mme X devant le tribunal administratif de Cergy-Pontoise ;

Vu les autres pièces du dossier ;
>Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamental...

Vu la requête, enregistrée le 6 janvier 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DU VAL D'OISE ; le PREFET DU VAL-D'OISE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 5 décembre 2003 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé son arrêté du 24 novembre 2003 décidant la reconduite à la frontière de Mme Safia X ;

2°) de rejeter la demande présentée par Mme X devant le tribunal administratif de Cergy-Pontoise ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée alors en vigueur ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Marc Lambron, Maître des Requêtes,

- les conclusions de M. Didier Chauvaux, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée, en vigueur à la date de l'arrêté attaqué : Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (...) 3º Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait. (...) ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme X, de nationalité marocaine, s'est maintenue sur le territoire français plus d'un mois à compter de la notification, le 24 juillet 2003, de la décision du 22 juillet 2003 par laquelle le PREFET DU VAL-D'OISE a rejeté sa demande de titre de séjour et l'a invitée à quitter le territoire ; qu'elle se trouvait ainsi dans le cas où, en application du 3º du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;

Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ; qu'aux termes de l'article 12 bis 7° de l'ordonnance du 2 novembre 1945 : Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger, ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) ;

Considérant que si Mme X fait valoir qu'elle a rejoint, en mars 2002, son mari, résidant en France depuis 1979, afin de l'assister à la suite de l'accident de travail dont il avait été victime en mai 2001 et que l'état de santé de ce dernier, dont le taux d'invalidité est de 24 %, nécessite toujours sa présence à ses côtés, il n'est pas établi par les pièces du dossier qu'à la date de l'arrêté litigieux, soit deux ans et demi après l'accident dont il a été victime, l'état de santé de M. X nécessitait encore la présence permanente d'une tierce personne ; qu'il ressort par ailleurs des pièces du dossier que, mariée depuis 1972, Mme X a toujours vécu au Maroc et que le couple n'a jamais sollicité le bénéfice des dispositions relatives au regroupement familial ; que dans les circonstances de l'espèce et eu égard aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière l'arrêté attaqué n'a pas porté au respect dû à la vie privée et familiale de la requérante une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; que par suite le PREFET DU VAL D'OISE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé son arrêté du 24 novembre 2003 décidant la reconduite à la frontière de Mme X au motif qu'il aurait été pris en méconnaissance du 7° de l'article 12 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant, toutefois, qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mme X devant le tribunal administratif de Cergy-Pontoise et devant le Conseil d'Etat ;

Considérant que, pour les raisons susdites, l'arrêté du 24 novembre 2003 du PREFET DU VAL-D'OISE n'est pas entaché d'erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences qu'il pourrait avoir sur la situation personnelle de Mme X et de son mari ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DU VAL-D'OISE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé l'arrêté du 24 novembre 2003 par lequel ledit préfet a ordonné la reconduite à la frontière de Mme X ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le jugement du 5 décembre 2003 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé l'arrêté du PREFET DU VAL D'OISE du 24 novembre 2003 décidant la reconduite à la frontière de Mme X, est annulé.

Article 2 : La demande présentée par Mme X devant le tribunal administratif de Cergy-Pontoise est rejetée.

Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DU VAL-D'OISE, à Mme Safia X et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.


Sens de l'arrêt : Satisfaction totale
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 27 jui. 2005, n° 263291
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : Mme Hubac
Rapporteur ?: M. Marc Lambron
Rapporteur public ?: M. Chauvaux

Origine de la décision
Formation : 5eme sous-section jugeant seule
Date de la décision : 27/07/2005
Date de l'import : 05/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 263291
Numéro NOR : CETATEXT000008213151 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2005-07-27;263291 ?
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