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26/09/2005 | FRANCE | N°257413

France | France, Conseil d'État, 1ere et 6eme sous-sections reunies, 26 septembre 2005, 257413


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 3 juin et 3 octobre 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés par l'UNION DES FAMILLES EN EUROPE, dont le siège est 20, cours Vitton à Lyon (69006), représentée par sa présidente en exercice ; l'UNION DES FAMILLES EN EUROPE demande au Conseil d'Etat d'annuler les articles 2 et 3 du décret n° 2003 ;300 du 2 avril 2003 modifiant le décret n° 91 ;1266 du 19 décembre 1991 portant application de la loi n° 91 ;647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

Vu les autres pièces

du dossier ;

Vu la Constitution, notamment son préambule ;

Vu la conv...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 3 juin et 3 octobre 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés par l'UNION DES FAMILLES EN EUROPE, dont le siège est 20, cours Vitton à Lyon (69006), représentée par sa présidente en exercice ; l'UNION DES FAMILLES EN EUROPE demande au Conseil d'Etat d'annuler les articles 2 et 3 du décret n° 2003 ;300 du 2 avril 2003 modifiant le décret n° 91 ;1266 du 19 décembre 1991 portant application de la loi n° 91 ;647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la Constitution, notamment son préambule ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la loi n° 91 ;647 du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridique ;

Vu le décret n° 91 ;1266 du 19 décembre1991 portant application de la loi n° 91 ;647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mlle Anne Courrèges, Maître des Requêtes,

- les conclusions de M. Christophe Devys, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que la loi du 10 juillet 1991 prévoit que l'aide juridictionnelle est accordée sous condition de ressources ; que, selon son article 4, le demandeur doit justifier que ses ressources mensuelles sont inférieures à des plafonds, différents selon qu'il s'agit d'obtenir l'aide juridictionnelle totale ou partielle, qui sont revalorisés, au 1er janvier de chaque année, comme la tranche la plus basse du barème de l'impôt sur le revenu ; que le deuxième alinéa de cet article dispose : « Ces plafonds sont affectés de correctifs pour charges de famille » ; qu'aux termes de l'article 5 de la même loi : « Pour l'application de l'article 4, sont prises en considération les ressources de toute nature dont le demandeur a directement ou indirectement la jouissance ou la libre disposition. Il est tenu compte des éléments extérieurs du train de vie. Sont exclues de l'appréciation des ressources les prestations familiales ainsi que certaines prestations sociales à objet spécialisé selon des modalités prévues par décret en Conseil d'Etat » ; que l'article 70 de la même loi charge également un décret en Conseil d'Etat de fixer les correctifs pour charges de famille prévus à l'article 4 ;

Considérant que, dans sa rédaction issue de l'article 2 du décret attaqué du 2 avril 2003, l'article 3 du décret du 19 décembre 1991, pris sur le fondement des dispositions législatives précitées, dispose que : « Les plafonds de ressources prévus pour l'octroi de l'aide juridictionnelle totale ou partielle sont majorés d'une somme équivalente à : /a) 0,18 fois le montant du plafond de ressources pris en compte pour le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale pour chacune des deux premières personnes à charge ; / b) 0,1137 fois ce même montant pour la troisième personne à charge et chacune des suivantes » ; que, pour le cas où il est tenu compte des ressources provenant du conjoint du demandeur, de son concubin ou de son partenaire à un pacte civil de solidarité ainsi que des autres personnes vivant habituellement à son foyer, l'article 3 du décret attaqué, modifiant l'article 4 du décret du 19 décembre 1991, retient les mêmes correctifs, s'agissant respectivement des deux premières personnes vivant habituellement à son foyer et de chacune des autres personnes ;

Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que le moyen tiré de ce que le conseil national de l'aide juridique n'aurait pas été consulté avant l'intervention du décret attaqué, manque en fait ;

Considérant, en deuxième lieu, que les dispositions contestées ont pour objet d'augmenter le correctif applicable aux deux premières personnes à charge lorsque le foyer comporte moins de quatre personnes ; que, ni la circonstance que les études faites par l'INSEE et par l'OCDE conduiraient à évaluer à des niveaux supérieurs les coefficients permettant de tenir compte de la présence de plusieurs personnes dans un foyer, ni le fait que les dispositions applicables à d'autres prestations ont retenu des correctifs pour charges de famille d'un montant supérieur ne suffisent à établir que le décret attaqué aurait, en retenant les montants contestés par l'UNION DES FAMILLES EN EUROPE, méconnu les dispositions législatives pour l'application desquelles il a été pris ;

Considérant, en troisième lieu, qu'il résulte de ce qui vient d'être dit que les dispositions attaquées permettent de tenir compte de manière effective des charges de famille dans l'appréciation des ressources du demandeur à l'aide juridictionnelle ; qu'ainsi, d'une part, loin de méconnaître le droit au recours, elle contribuent à le mettre en oeuvre et que, dès lors, le moyen tiré de ce qu'elle seraient intervenues en méconnaissance du principe de la garantie des droits énoncé à l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen et des stipulations des articles 6 et 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, doit être écarté ; que, d'autre part, le moyen tiré de ce que le décret attaqué méconnaîtrait l'égalité entre les justiciables, selon qu'ils ont ou non des charges de famille, ainsi que l'article 14 de la même convention doit, pour les mêmes motifs, être écarté ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que les conclusions de l'UNION DES FAMILLES EN EUROPE tendant à l'annulation des articles 2 et 3 du décret attaqué du 2 avril 2003 doivent être rejetées ; qu'il en va de même, par voie de conséquence, de ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761 ;1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

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Article 1er : La requête de l'UNION DES FAMILLES EN EUROPE est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à l'UNION DES FAMILLES EN EUROPE, au Premier ministre et au garde des sceaux, ministre de la justice.


Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

ACTES LÉGISLATIFS ET ADMINISTRATIFS - VALIDITÉ DES ACTES ADMINISTRATIFS - VIOLATION DIRECTE DE LA RÈGLE DE DROIT - LOI - ABSENCE DE VIOLATION - LOI DU 10 JUILLET 1991 RELATIVE À L'AIDE JURIDIQUE - DISPOSITIONS RÉGLEMENTAIRES PRISES EN APPLICATION DE L'ARTICLE 4 DE CETTE LOI FIXANT LES CORRECTIFS POUR CHARGES DE FAMILLE DONT SONT AFFECTÉS LES PLAFONDS DE RESSOURCES.

01-04-02-01 L'article 4 de la loi du 10 juillet 1991 prévoit que le demandeur de l'aide juridictionnelle doit justifier que ses ressources mensuelles sont inférieures à des plafonds, différents selon qu'il s'agit d'obtenir l'aide juridictionnelle totale ou partielle, qui sont affectés de correctifs pour charges de famille fixés par décret en Conseil d'Etat. Dans sa rédaction issue de l'article 2 du décret du 2 avril 2003, l'article 3 du décret du 19 décembre 1991 dispose que : « Les plafonds de ressources prévus pour l'octroi de l'aide juridictionnelle totale ou partielle sont majorés d'une somme équivalente à : /a) 0,18 fois le montant du plafond de ressources pris en compte pour le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale pour chacune des deux premières personnes à charge ;/ b) 0,1137 fois ce même montant pour la troisième personne à charge et chacune des suivantes ». Pour le cas où il est tenu compte des ressources provenant du conjoint du demandeur, de son concubin ou de son partenaire à un pacte civil de solidarité ainsi que des autres personnes vivant habituellement à son foyer, l'article 3 du décret attaqué, modifiant l'article 4 du décret du 19 décembre 1991, retient les mêmes correctifs, s'agissant respectivement des deux premières personnes vivant habituellement à son foyer et de chacune des autres personnes.,,Ni la circonstance que les études faites par l'INSEE et par l'OCDE conduiraient à évaluer à des niveaux supérieurs les coefficients permettant de tenir compte de la présence de plusieurs personnes dans un foyer, ni le fait que les dispositions applicables à d'autres prestations ont retenu des correctifs pour charges de famille d'un montant supérieur ne suffisent à établir que le décret attaqué aurait, en retenant les montants contestés visés ci-dessus, qui sont d'ailleurs supérieurs, pour les deux premières personnes à charge, à ce qu'ils étaient sous l'empire de la réglementation antérieure, méconnu les dispositions législatives pour l'application desquelles il a été pris.... ...Les dispositions attaquées qui permettent de tenir compte de manière effective des charges de famille dans l'appréciation des ressources du demandeur à l'aide juridictionnelle, contribuent par ailleurs à mettre en oeuvre le droit au recours et ne sont donc pas intervenues en méconnaissance du principe de la garantie des droits énoncé à l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen et des stipulations des articles 6 et 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

PROCÉDURE - JUGEMENTS - FRAIS ET DÉPENS - AIDE JUDICIAIRE - LOI DU 10 JUILLET 1991 - DISPOSITIONS RÉGLEMENTAIRES PRISES EN APPLICATION DE L'ARTICLE 4 DE CETTE LOI FIXANT LES CORRECTIFS POUR CHARGE DE FAMILLE DONT SONT AFFECTÉS LES PLAFONDS DE RESSOURCES - LÉGALITÉ.

54-06-05-09 L'article 4 de la loi du 10 juillet 1991 prévoit que le demandeur de l'aide juridictionnelle doit justifier que ses ressources mensuelles sont inférieures à des plafonds, différents selon qu'il s'agit d'obtenir l'aide juridictionnelle totale ou partielle, qui sont affectés de correctifs pour charges de famille fixés par décret en Conseil d'Etat. Dans sa rédaction issue de l'article 2 du décret du 2 avril 2003, l'article 3 du décret du 19 décembre 1991 dispose que : « Les plafonds de ressources prévus pour l'octroi de l'aide juridictionnelle totale ou partielle sont majorés d'une somme équivalente à : /a) 0,18 fois le montant du plafond de ressources pris en compte pour le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale pour chacune des deux premières personnes à charge ; /b) 0,1137 fois ce même montant pour la troisième personne à charge et chacune des suivantes ». Pour le cas où il est tenu compte des ressources provenant du conjoint du demandeur, de son concubin ou de son partenaire à un pacte civil de solidarité ainsi que des autres personnes vivant habituellement à son foyer, l'article 3 du décret attaqué, modifiant l'article 4 du décret du 19 décembre 1991, retient les mêmes correctifs, s'agissant respectivement des deux premières personnes vivant habituellement à son foyer et de chacune des autres personnes.,,Ni la circonstance que les études faites par l'INSEE et par l'OCDE conduiraient à évaluer à des niveaux supérieurs les coefficients permettant de tenir compte de la présence de plusieurs personnes dans un foyer, ni le fait que les dispositions applicables à d'autres prestations ont retenu des correctifs pour charges de famille d'un montant supérieur ne suffisent à établir que le décret attaqué aurait, en retenant les montants contestés visés ci-dessus, qui sont d'ailleurs supérieurs, pour les deux premières personnes à charge, à ce qu'ils étaient sous l'empire de la réglementation antérieure, méconnu les dispositions législatives pour l'application desquelles il a été pris.... ...Les dispositions attaquées qui permettent de tenir compte de manière effective des charges de famille dans l'appréciation des ressources du demandeur à l'aide juridictionnelle, contribuent par ailleurs à mettre en oeuvre le droit au recours et ne sont donc pas intervenues en méconnaissance du principe de la garantie des droits énoncé à l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen et des stipulations des articles 6 et 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.


Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 26 sep. 2005, n° 257413
Mentionné aux tables du recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : Mme Hagelsteen
Rapporteur ?: Mlle Anne Courrèges
Rapporteur public ?: M. Devys

Origine de la décision
Formation : 1ere et 6eme sous-sections reunies
Date de la décision : 26/09/2005
Date de l'import : 05/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 257413
Numéro NOR : CETATEXT000008228652 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2005-09-26;257413 ?
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