La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

19/10/2005 | FRANCE | N°267821

France | France, Conseil d'État, 5eme et 4eme sous-sections reunies, 19 octobre 2005, 267821


Vu le recours, enregistré le 21 mai 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE ; le ministre demande au Conseil d'Etat d'annuler le jugement du 10 février 2004 par lequel le tribunal administratif de Melun, faisant droit à la demande de M. Gilles Y, a 1) annulé la décision du 12 décembre 2001 du chef de service des pensions du ministère de l'éducation nationale rejetant la demande de l'intéressé tendant à l'attribution d'une bonification de service supérieure à celle d'un an qui lui a été reconn

ue sur le fondement des articles L. 12 h) et R. 25 du code des pe...

Vu le recours, enregistré le 21 mai 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE ; le ministre demande au Conseil d'Etat d'annuler le jugement du 10 février 2004 par lequel le tribunal administratif de Melun, faisant droit à la demande de M. Gilles Y, a 1) annulé la décision du 12 décembre 2001 du chef de service des pensions du ministère de l'éducation nationale rejetant la demande de l'intéressé tendant à l'attribution d'une bonification de service supérieure à celle d'un an qui lui a été reconnue sur le fondement des articles L. 12 h) et R. 25 du code des pensions civiles et militaires de retraite, 2) enjoint au ministre de l'éducation nationale et au MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE de prendre les mesures nécessaires à assurer à l'intéressé l'attribution d'une bonification de trois années en application des articles L. 12 h) et R. 25 du code des pensions civiles et militaires de retraite dans un délai de quatre mois à compter de la notification du présent jugement ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code des pensions civiles et militaires de retraite ;

Vu le décret n° 53-458 du 16 mai 1953 modifié ;

Vu l'arrêté du 29 décembre 1969 relatif aux conditions d'inscription au concours de recrutement des professeurs d'enseignement technique théorique de dessin industriel des collèges d'enseignement technique ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Marc Lambron, Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Baraduc, Duhamel, avocat de M. Y,

- les conclusions de M. Didier Chauvaux, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 12 du code des pensions civiles et militaires de retraite, une bonification est accordée : (...) h) aux professeurs d'enseignement technique au titre du stage professionnel exigé pour avoir le droit de se présenter au concours par lequel ils ont été recrutés ; qu'aux termes de l'article R. 25 du même code, cette bonification est égale dans la limite de cinq années, à la durée de l'activité professionnelle dans l'industrie dont les professeurs de l'enseignement technologique ont dû justifier pour pouvoir se présenter au concours de recrutement dans les conditions exigées par le statut particulier au titre duquel ils ont été nommés ; que, nonobstant la référence, dans les dispositions précitées de l'article R. 25 du code, à la seule industrie, il résulte de la rédaction même de l'article L. 12 h) que le bénéfice de la bonification qu'il institue est ouvert à tous les professeurs d'enseignement technique tenus, en vertu du statut particulier de leur corps, de justifier de l'exercice d'une activité professionnelle pour pouvoir se présenter au concours de recrutement dans ce corps ;

Considérant que le concours de recrutement de professeurs d'enseignement technique théorique de dessin industriel des collèges d'enseignement technique, spécialité mécanique, auquel M. Y a été reçu en 1975, était alors régi par le décret n° 53-458 du 16 mai 1953 modifié, dont l'article 7 disposait : Les candidats... doivent être âgés de vingt-trois ans au moins et de quarante-cinq ans au plus et justifier de cinq années de service dans leur activité professionnelle ou dans l'enseignement technique... ; qu'un arrêté ministériel du 29 décembre 1969 pris en application de ce décret, en vigueur à la date de la décision litigieuse, prévoyait toutefois que des dispenses de temps de pratique professionnelle pourront être accordées aux candidats titulaires de certains diplômes de la spécialité, dans les conditions suivantes : / Les candidats titulaires du diplôme d'élève, breveté des écoles nationales professionnelles devront justifier de trois années de pratique professionnelle. / Les titulaires du brevet de technicien supérieur ... devront avoir effectué une année au moins de pratique professionnelle ;

Considérant qu'il résulte des termes mêmes de cet arrêté que ses dispositions présentaient, au regard de la règle fixée à l'article 7 du décret du 16 mai 1953, un caractère dérogatoire et ne pouvaient recevoir application que lorsqu'un candidat ne satisfaisait pas à la condition nécessaire et suffisante d'une pratique professionnelle de cinq ans pour pouvoir s'inscrire au concours ; que, par suite, la circonstance relevée par le tribunal administratif que M. Y qui justifiait à la date du concours de cinq années d'activité professionnelle comme professeur de dessin dans divers établissements ait été par ailleurs titulaire d'un diplôme d'élève breveté d'une école nationale professionnelle et d'un brevet de technicien supérieur ne pouvait prévaloir, pour l'appréciation de ses droits à la bonification prévue par l'article L. 12 h) du code, sur la durée de cinq années d'activité professionnelle dont il justifiait ; que le tribunal administratif de Melun a pu, par suite, sans commettre d'erreur de droit, annuler la décision du 12 décembre 2001 du chef du service des pensions du ministère de l'éducation nationale rejetant la demande de M. Y tendant à l'attribution d'une bonification supérieure à celle d'un an qui lui a été accordée ;

Sur le recours incident de M. Y :

Considérant que, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, la limite de cinq années prévue par l'article R. 25 du code précité pour le calcul de la bonification dont s'agit s'entend, nonobstant la référence à la seule industrie, de l'activité professionnelle dont les professeurs d'enseignement technique ont eu à justifier pour pouvoir se présenter au concours de recrutement dans ce corps ; qu'il résulte des pièces du dossier que M. Y, à la date où il s'est présenté audit concours, avait assuré les fonctions de professeur de dessin dans divers établissements entre le 1er novembre 1966 et le 30 septembre 1973 avant d'être recruté comme maître auxiliaire par le ministre de l'éducation nationale, tandis que, parallèlement, il exerçait pendant trois ans et un mois, du 1er décembre 1968 au 31 décembre 1971, les fonctions de dessinateur dans son propre cabinet d'études ; qu'en estimant que pouvait seulement être prise en compte pour le calcul de ladite bonification la durée d'exercice professionnel en activité libérale de M. Y au motif qu'elle seule se rattachait à l'industrie, le tribunal administratif a méconnu les dispositions des articles L. 12 h) et R. 25 du code des pensions civiles et militaires de retraite et entaché son jugement d'une erreur de droit ; que M. Y est, par suite, fondé à demander l'annulation du jugement en tant qu'il a enjoint au ministre de l'éducation nationale de lui accorder une bonification de trois années ;

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, par application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, de régler l'affaire au fond ;

Considérant que M. Y pouvait, à la date de son recrutement, se prévaloir d'une durée d'activité professionnelle de six ans et onze mois comme professeur de dessin ; que, par suite, il a droit, en application des article L. 12 h) et R. 25 du code précité, à une bonification calculée par référence à la durée maximale de cinq années d'activité professionnelle prévue par ces dispositions ; qu'il y a lieu, dès lors, d'enjoindre au ministre compétent, en application des article L. 911-1 et L. 911-2 du code de justice administrative, de faire bénéficier M. Y dans les deux mois suivant la notification de la présente décision, d'une bonification de cinq ans ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros que M. Y demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le recours du MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE est rejeté.

Article 2 : L'article 2 du jugement du tribunal administratif de Melun en date du 10 février 2004 est annulé.

Article 3 : Le MINISTRE DE L'ECONOMIE ET DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE modifiera, dans le délai de deux mois suivant la notification de la présente décision, les conditions dans lesquelles la pension de M. Y lui a été concédée et la revalorisera rétroactivement en faisant bénéficier l'intéressé d'une bonification de cinq ans.

Article 4 : L'Etat versera à M. Y une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : La présente décision sera notifiée au MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE, à M. Gilles Y et au ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.


Synthèse
Formation : 5eme et 4eme sous-sections reunies
Numéro d'arrêt : 267821
Date de la décision : 19/10/2005
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Contentieux des pensions

Publications
Proposition de citation : CE, 19 oct. 2005, n° 267821
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Stirn
Rapporteur ?: M. Marc Lambron
Rapporteur public ?: M. Chauvaux
Avocat(s) : SCP BARADUC, DUHAMEL

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2005:267821.20051019
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award