La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

02/11/2005 | FRANCE | N°269007

France | France, Conseil d'État, 6ème et 1ère sous-sections réunies, 02 novembre 2005, 269007


Vu la requête sommaire, et le mémoire complémentaire, enregistrés les 22 juin et 20 octobre 2004, présentés par l'association COORDINATION DES SYNDICATS DE MARAIS DE LA BAIE DE L'AIGUILLON POUR LE MAINTIEN DURABLE DES ACTIVITES HUMAINES (COSYMDAH), dont le siège social est sis à la maison des communes du Petit Poitou à Chaille Les Marais (85450), représentée par son président en exercice, M. Jean X, demeurant ..., M. Jean-Baptiste Y, demeurant ...et M. Guy Z, demeurant ... l'association COORDINATION DES SYNDICATS DE MARAIS DE LA BAIE DE L'AIGUILLON POUR LE MAINTIEN DURABLE DES ACTI

VITES HUMAINES (COSYMDAH) et les autres requérants demanden...

Vu la requête sommaire, et le mémoire complémentaire, enregistrés les 22 juin et 20 octobre 2004, présentés par l'association COORDINATION DES SYNDICATS DE MARAIS DE LA BAIE DE L'AIGUILLON POUR LE MAINTIEN DURABLE DES ACTIVITES HUMAINES (COSYMDAH), dont le siège social est sis à la maison des communes du Petit Poitou à Chaille Les Marais (85450), représentée par son président en exercice, M. Jean X, demeurant ..., M. Jean-Baptiste Y, demeurant ...et M. Guy Z, demeurant ... l'association COORDINATION DES SYNDICATS DE MARAIS DE LA BAIE DE L'AIGUILLON POUR LE MAINTIEN DURABLE DES ACTIVITES HUMAINES (COSYMDAH) et les autres requérants demandent au Conseil d'Etat :

1°) l'annulation pour excès de pouvoir de la décision implicite, née du silence gardé sur leur demande du 21 février 2004, tendant à l'abrogation de l'arrêté du ministre de l'écologie et du développement durable du 27 août 2002 portant désignation du site Natura 2000 du marais poitevin (zone de protection spéciale) et de son arrêté du 23 décembre 2003 le modifiant ;

2°) l'annulation pour excès de pouvoir de ces deux arrêtés ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la directive 79/409/CEE, du Conseil, du 2 avril 1979, concernant la conservation des oiseaux sauvages ;

Vu la directive 92/43/CEE, du Conseil, du 21 mai 1992, concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages ;

Vu le code de l'environnement ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mlle Maud Vialettes, Maître des Requêtes,

- les conclusions de M. Mattias Guyomar, Commissaire du gouvernement ;

Sur les règles applicables :

Considérant que l'article 4 de la directive 79/409/CEE, du Conseil, du 2 avril 1979, concernant la conservation des oiseaux sauvages (directive « Oiseaux ») prévoit que les Etats membres classent en zones de protection spéciale les territoires les plus appropriés à la conservation des espèces d'oiseaux mentionnées à l'annexe I ainsi que, dans certaines conditions, d'autres espèces d'oiseaux migratrices et que l'article 3 de la directive 92/43/CEE, du Conseil, du 21 mai 1992, concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages (directive « Habitats ») prévoit que ces zones concourent au réseau Natura 2000 ; que dans ce cadre, le II de l'article L.414-1 du code de l'environnement, dans sa version applicable au litige, prévoit que « Les zones de protection spéciale sont : / - soit des sites maritimes et terrestres particulièrement appropriés à la survie et à la reproduction des espèces d'oiseaux sauvages figurant sur une liste arrêtée dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat ; / - soit des sites maritimes ou terrestres qui servent d'aires de reproduction, de mue, d'hivernage ou de zones de relais, au cours de leur migration, à des espèces d'oiseaux autres que celles figurant sur la liste susmentionnée. » ; que selon l'article R. 214-20 du même code : « Saisi d'un projet de désignation d'une zone de protection spéciale, le ministre chargé de l'environnement prend un arrêté désignant la zone comme site Natura 2000. Sa décision est notifiée à la Commission européenne » ; que selon l'article R. 214-22 du code de l'environnement : « L'arrêté portant désignation d'un site Natura 2000 est publié au Journal officiel de la République française. L'arrêté et ses annexes comportant notamment la carte du site, sa dénomination, sa délimitation, ainsi que l'identification des habitats naturels et des espèces qui ont justifié la désignation du site, sont tenus à la disposition du public dans les services du ministère chargé de l'environnement et à la préfecture » ;

En ce qui concerne l'arrêté du 27 août 2002 et le refus implicite de l'abroger :

Considérant que, pour demander, à la fois l'annulation de l'arrêté du ministre de l'écologie et du développement durable du 27 août 2002 portant désignation du site Natura 2000 du marais poitevin (zone de protection spéciale) et l'annulation de la décision implicite par laquelle le ministre a refusé de l'abroger, les requérants soutiennent qu'il était, dès l'origine, entaché d'excès de pouvoir ;

Considérant, d'une part, qu'il ressort des pièces du dossier que l'arrêté du 27 août 2002 a été publié au Journal officiel de la République française le 17 novembre 2002 ; que la présente requête, enregistrée le 22 juin 2004, n'a été précédée, dans le délai de recours contentieux, d'aucun recours gracieux ou contentieux suivant sa publication ; que, par suite, la fin de non-recevoir, opposée par le ministre de l'écologie et du développement durable et tirée de ce que les conclusions tendant à l'annulation de cet arrêté sont tardives, doit être accueillie ;

Considérant, d'autre part, que l'arrêté désignant un site Natura 2000 n'a pas le caractère d'un acte réglementaire dont les intéressés peuvent demander au gouvernement après l'expiration du délai de recours, l'abrogation au motif qu'il serait, depuis l'origine, illégal ; que, par suite, les conclusions tendant à l'annulation de la décision implicite par laquelle le ministre de l'écologie et du développement durable a rejeté la demande que les requérants lui ont présentée le 21 février 2004 tendant à ce qu'il prononce l'abrogation de cet arrêté, au motif qu'il serait, depuis l'origine, illégal, doit être rejetée ;

En ce qui concerne l'arrêté du 23 décembre 2003 et le refus implicite de l'abroger :

Sur la légalité externe :

Considérant qu'aux termes de l'article R. 214-18 du code de l'environnement : « Le préfet soumet pour avis le projet de périmètre de zone spéciale de conservation ou de zone de protection spéciale aux communes et aux établissements publics de coopération intercommunale concernés (...). / Le ou les préfets transmettent au ministre chargé de l'environnement le projet de désignation de site Natura 2000, assorti des avis qu'ils ont recueillis. S'ils s'écartent des avis motivés mentionnés au premier alinéa, ils en indiquent les raisons dans le projet qu'ils transmettent » ; qu'il ressort des pièces du dossier que le moyen tiré de ce que les préfets concernés par la modification du site Natura 2000 du marais poitevin (zone de protection spéciale) auquel procède l'arrêté du 23 décembre 2003, n'auraient pas indiqué, dans le projet qu'ils ont transmis au ministre, les raisons pour lesquelles ils se sont écartés de certains avis qu'ils avaient recueillis, manque en fait ;

Considérant que les moyens tirés de ce que l'arrêté du 23 décembre 2003 aurait dû être motivé en application de l'article 4 de la directive « Oiseaux », des articles 4 et 7 de la directive « Habitats », du II et du III de l'article L. 414-1 du code de l'environnement ne peuvent qu'être écartés, aucune des dispositions ainsi invoquées n'imposant une telle motivation ;

Considérant, enfin, qu'aucune disposition ni aucun principe n'obligeait non plus le ministre à justifier dans son arrêté le périmètre et les limites du site Natura 2000 du marais poitevin qu'il désignait et que, dès lors, les requérants ne sont pas fondés à en faire grief à l'arrêté attaqué ;

Sur la légalité interne :

Considérant que l'arrêté du 23 décembre 2003 comporte en annexe, ainsi que le prévoit l'article R. 214-22 du code de l'environnement, l'identification des espèces qui ont justifié la désignation du site, sous forme de deux listes, l'une des espèces d'oiseaux justifiant la désignation du site au titre des sites maritimes et terrestres particulièrement appropriés à la survie et à la reproduction des espèces d'oiseaux sauvages figurant sur la liste mentionnée au II de l'article L. 414-1 du code et l'autre des espèces d'oiseaux justifiant la désignation du site au titre des sites maritimes et terrestres qui servent d'aires de reproduction, de mue, d'hivernage ou de zones de relais, au cours de leur migration, à des espèces d'oiseaux autres que celles figurant sur la liste susmentionnée ; que cette dernière liste a été arrêtée, en application de l'article R. 214-16 du code de l'environnement, par un arrêté du 16 novembre 2001 du ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement ; que si les requérants soutiennent que la liste annexée à l'arrêté du 16 novembre 2001 est illégale, ils n'apportent aucune précision au soutien de leurs allégations qui ne peuvent, dès lors et en tout état de cause, qu'être écartées ; qu'en outre, il ne ressort pas des pièces du dossier que les listes annexées à l'arrêté du 23 décembre 2003, seraient inexactes ou auraient méconnu le II de l'article L. 414-1 du code de l'environnement ;

Considérant que la circonstance que le marais poitevin ne serait pas une « zone humide » au sens de la loi du 3 janvier 1992 sur l'eau est sans influence sur la légalité de l'arrêté attaqué qui ne fait pas application de cette législation ;

Considérant que les requérants ne sauraient non plus soutenir que l'arrêté attaqué, en tant qu'il ne tiendrait pas compte des exigences économiques, sociales et culturelles du marais poitevin, méconnaîtrait le V de l'article L. 414-1 du code de l'environnement qui n'est pas relatif à la procédure de désignation des sites Natura 2000, mais seulement aux mesures de gestion dont ils font, une fois désignés, l'objet ;

Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la délimitation du site Natura 2000 du marais poitevin à laquelle procède l'arrêté attaqué sur un territoire qui constitue une zone naturelle de très haute valeur ornithologique pour de nombreuses espèces d'oiseaux, fasse une inexacte application des dispositions du II de l'article L. 414-1 du code de l'environnement ;

Considérant, enfin, que les moyens tirés de ce que l'arrêté attaqué méconnaîtrait les articles 4, 6 et 7 de la directive « Habitats » ne peuvent qu'être écartés, ces articles ne prévoyant aucune règle qui s'imposerait pour la désignation des zones de protection spéciale ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la requête de la COORDINATION DES SYNDICATS DE MARAIS DE LA BAIE DE L'AIGUILLON POUR LE MAINTIEN DURABLE DES ACTIVITES HUMAINES et des autres requérants doit être rejetée ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de la COORDINATION DES SYNDICATS DE MARAIS DE LA BAIE DE L'AIGUILLON POUR LE MAINTIEN DURABLE DES ACTIVITES HUMAINES et des autres requérants est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à la COORDINATION DES SYNDICATS DE MARAIS DE LA BAIE DE L'AIGUILLON POUR LE MAINTIEN DURABLE DES ACTIVITES HUMAINES, à M. Jean X, à M. Jean-Baptiste Y, à M. Guy Z et au ministre de l'écologie et du développement durable.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

ACTES LÉGISLATIFS ET ADMINISTRATIFS - DIFFÉRENTES CATÉGORIES D'ACTES - ACTES ADMINISTRATIFS - CLASSIFICATION - ACTES RÉGLEMENTAIRES - NE PRÉSENTENT PAS CE CARACTÈRE - ARRÊTÉ PORTANT DÉSIGNATION D'UN SITE NATURA 2000 (ART - R - 214-20 DU CODE DE L'ENVIRONNEMENT PRIS EN APPLICATION DU II DE L'ARTICLE L - 414-1 DU MÊME CODE).

01-01-06-01-02 L'arrêté désignant un site Natura 2000 n'a pas le caractère d'un acte réglementaire.

COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES ET UNION EUROPÉENNE - RÈGLES APPLICABLES - ENVIRONNEMENT - DIRECTIVES OISEAUX ET HABITATS - DÉSIGNATION D'UN SITE NATURA 2000 (ART - R - 214-20 DU CODE DE L'ENVIRONNEMENT PRIS EN APPLICATION DU II DE L'ARTICLE L - 414-1 DU MÊME CODE) - A) ACTE RÉGLEMENTAIRE - ABSENCE - B) DÉLIMITATION DE LA ZONE CONCERNÉE - CONTRÔLE NORMAL.

15-05-10 a) L'arrêté désignant un site Natura 2000 n'a pas le caractère d'un acte réglementaire.,,b) Le juge exerce un contrôle normal sur la délimitation du site retenue par l'autorité administrative.

NATURE ET ENVIRONNEMENT - PROTECTION DE LA NATURE - PROTECTION DE LA FAUNE ET DE LA FLORE - DÉSIGNATION D'UN SITE NATURA 2000 (ART - R - 214-20 DU CODE DE L'ENVIRONNEMENT PRIS EN APPLICATION DU II DE L'ARTICLE L - 414-1 DU MÊME CODE) - A) ACTE RÉGLEMENTAIRE - ABSENCE - B) DÉLIMITATION DE LA ZONE CONCERNÉE - APPRÉCIATION SOUMISE À UN CONTRÔLE NORMAL DU JUGE.

44-01-002 a) L'arrêté désignant un site Natura 2000 n'a pas le caractère d'un acte réglementaire.,,b) Le juge exerce un contrôle normal sur la délimitation du site retenue par l'autorité administrative.

PROCÉDURE - POUVOIRS ET DEVOIRS DU JUGE - CONTRÔLE DU JUGE DE L'EXCÈS DE POUVOIR - APPRÉCIATIONS SOUMISES À UN CONTRÔLE NORMAL - DÉLIMITATION DE LA ZONE CONCERNÉE PAR UN SITE NATURA 2000 (ART - R - 214-20 DU CODE DE L'ENVIRONNEMENT PRIS EN APPLICATION DU II DE L'ARTICLE L - 414-1 DU MÊME CODE).

54-07-02-03 Le juge exerce un contrôle normal sur la délimitation par l'autorité administrative d'un site Natura 2000.


Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 02 nov. 2005, n° 269007
Mentionné aux tables du recueil Lebon
RTFTélécharger au format RTF
Composition du Tribunal
Président : Mme Hagelsteen
Rapporteur ?: Mlle Maud Vialettes
Rapporteur public ?: M. Guyomar

Origine de la décision
Formation : 6ème et 1ère sous-sections réunies
Date de la décision : 02/11/2005
Date de l'import : 05/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 269007
Numéro NOR : CETATEXT000008235688 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2005-11-02;269007 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award