Vu la requête, enregistrée le 3 mai 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET D'ILLE-ET-VILAINE ; le PREFET D'ILLE-ET-VILAINE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du magistrat délégué par le président administratif de Rennes du 1er avril 2004 annulant son arrêté du 9 mars 2004 décidant la reconduite à la frontière de Mme Annie X... et fixant la République démocratique du Congo comme pays de renvoi ;
2°) de rejeter la demande présentée par Mme X... devant le tribunal administratif de Rennes ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Bernard Pignerol, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Thouin-Palat, avocat de Mme X...,
- les conclusions de M. Rémi Keller, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'à la suite de la décision défavorable rendue par l'office français de protection des réfugiés et apatrides refusant, le 29 décembre 2003, à Mme X... la qualité de réfugiée, le PREFET D'ILLE-ET-VILAINE a invité cette dernière, le 9 janvier 2004, à quitter le territoire français dans le délai d'un mois ; que le 23 février 2004, elle a sollicité un titre de séjour vie privée et familiale sur le fondement des dispositions du 7° de l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 ; que par décision du 9 mars 2004, le PREFET D'ILLE-ET-VILAINE a ordonné sa reconduite à la frontière et son renvoi en République démocratique du Congo sur le fondement des dispositions du 3° du I de l'article 22 de la même ordonnance ;
Considérant qu'il est constant que Mme X..., de nationalité congolaise entrée irrégulièrement en France le 10 février 2000, se trouvait dans l'un des cas où, en application de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, le préfet pouvait ordonner qu'elle soit reconduite à la frontière ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier que l'intéressée s'est enfuie de son pays d'origine, dans lequel elle n'a plus d'attaches familiales, après le décès de son mari, professeur de lettres à l'université de Kinshasa, des suites des mauvais traitements qu'il avait subis ; que sa mère, entrée en France en février 2001, s'est vue reconnaître la qualité de réfugiée politique par l'office français de protection des réfugiés et apatrides ; que Mme X... apporte à sa mère, âgée de 74 ans, dont le handicap physique, attesté par deux certificats médicaux, nécessite l'aide d'une tierce personne, une assistance quotidienne ; que, dans ces conditions, en prenant l'arrêté de reconduite à la frontière de Mme X..., le PREFET D'ILLE-ET-VILAINE a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET D'ILLE-ET-VILAINE n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Rennes a annulé l'arrêté attaqué ;
D E C I D E :
--------------
Article 1er : La requête du PREFET D'ILLE-ET-VILAINE est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée au PREFET D'ILLE-ET-VILAINE, à Mme Annie X... et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.