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23/11/2005 | FRANCE | N°265158

France | France, Conseil d'État, President de la section du contentieux, 23 novembre 2005, 265158


Vu la requête, enregistrée le 3 mars 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DU BAS-RHIN ; le PREFET DU BAS-RHIN demande au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 5 février 2004 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Strasbourg a annulé son arrêté du 21 janvier 2004 décidant la reconduite à la frontière de Mlle Y... A et la décision distincte fixant la pays de destination ;

2°) de rejeter la demande présentée par Mlle A devant le trib

unal administratif de Strasbourg ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la conv...

Vu la requête, enregistrée le 3 mars 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DU BAS-RHIN ; le PREFET DU BAS-RHIN demande au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 5 février 2004 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Strasbourg a annulé son arrêté du 21 janvier 2004 décidant la reconduite à la frontière de Mlle Y... A et la décision distincte fixant la pays de destination ;

2°) de rejeter la demande présentée par Mlle A devant le tribunal administratif de Strasbourg ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- les conclusions de Mme Marie-Hélène Mitjavile, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, en vigueur à la date de l'arrêté litigieux : Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (...) 3° Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait (...) ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mlle A, de nationalité algérienne, s'est maintenue sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 26 janvier 2004, de la décision du PREFET DU BAS-RHIN lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire ; qu'elle entrait ainsi dans le champ d'application de la disposition précitée ;

Considérant que, pour annuler l'arrêté de reconduite à la frontière du 21 janvier 2004 pris par le PREFET DU BAS-RHIN à l'encontre de Mlle A, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Strasbourg s'est fondé sur l'erreur manifeste commise dans l'appréciation des conséquences de la mesure d'éloignement, dont l'exécution aurait pour effet de contraindre Mlle A à interrompre les études entreprises ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mlle A est entrée en France en juillet 2001 munie d'un visa de court séjour pour solliciter le bénéfice de l'asile territorial, qui lui a été refusé par une décision du ministre de l'intérieur, en date du 14 août 2003 ; qu'elle ne s'est inscrite en D.E.U.G. en psychologie qu'à la rentrée universitaire 2003 ; que, dès lors, eu égard au caractère très récent de ses études en France, c'est à tort que le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Strasbourg s'est fondé sur l'erreur manifeste commise par le PREFET DU BAS-RHIN dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de Mlle A pour prononcer l'annulation de l'arrêté de reconduite à la frontière pris à l'encontre de celle-ci ;

Considérant toutefois qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mlle X... devant le juge administratif ;

Sur la légalité de l'arrêté de reconduite à la frontière :

Considérant qu'aux termes des stipulations du 7° de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié : Le certificat de résidence d'un an portant la mention vie privée et familiale est délivré de plein droit : (...) 7° Au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays. ; que, si Mlle A fournit un certificat d'un médecin de l'établissement public de santé Alsace Nord, daté du 28 janvier 2004, d'ailleurs postérieur à l'arrêté de reconduite à la frontière, attestant qu'elle est régulièrement suivie depuis trois ans et traitée dans cet établissement, que la poursuite du traitement est nécessaire et que celui-ci ne pourrait être suivi en Algérie, compte tenu du climat de violence générale et familiale, lequel serait d'ailleurs à l'origine des traumatismes subis, il n'est toutefois pas établi que Mlle A ne pourrait suivre un traitement approprié à son état dans son pays d'origine ; que, dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations du 7° de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié doit être écarté ;

Considérant que les résultats universitaires obtenus ainsi que les promesses d'embauche reçues, qui sont, en tout état de cause, postérieurs à la décision attaquée, sont sans incidence sur la légalité de celle-ci ;

Sur la légalité de la décision fixant le pays de renvoi :

Considérant que l'arrêté attaqué prévoit que Mlle A sera reconduite à destination de son pays d'origine ; que la requérante n'apporte aucun élément à l'appui de ses allégations relatives aux risques de violences exercées contre elle par sa famille à raison de sa fuite pour échapper à un mariage forcé ; qu'ainsi, le moyen tiré de ce que la décision contestée méconnaîtrait les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut qu'être écarté ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DU BAS-RHIN est fondé à demander l'annulation du jugement par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Strasbourg a annulé son arrêté du 21 janvier 2004 décidant la reconduite à la frontière de Mlle A et fixant l'Algérie comme pays de destination ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que Mlle A demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le jugement du 5 février 2004 du magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Strasbourg est annulé.

Article 2 : La requête de Mlle A devant le tribunal administratif de Strasbourg est rejetée.

Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DU BAS-RHIN, à Mlle Karima X... et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 23 nov. 2005, n° 265158
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : M. Christnacht
Rapporteur public ?: Mme Mitjavile

Origine de la décision
Formation : President de la section du contentieux
Date de la décision : 23/11/2005
Date de l'import : 05/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 265158
Numéro NOR : CETATEXT000008228801 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2005-11-23;265158 ?
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