La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

07/12/2005 | FRANCE | N°254576

France | France, Conseil d'État, 2ème et 7ème sous-sections réunies, 07 décembre 2005, 254576


Vu la requête, enregistrée le 27 février 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour la VILLE DE PARIS, représentée par son maire ; la VILLE DE PARIS demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 13 décembre 2002 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a annulé le jugement du 11 juin 1998 du tribunal administratif de Paris qui a rejeté la demande de la société Nesstim tendant à l'annulation de l'arrêté du 8 novembre 1994 par lequel le maire de Paris a retiré le permis de construire modificatif tacite qui avait été octroyé

à ladite société le 16 septembre 1994 ;

2°) de mettre à la charge de l'E...

Vu la requête, enregistrée le 27 février 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour la VILLE DE PARIS, représentée par son maire ; la VILLE DE PARIS demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 13 décembre 2002 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a annulé le jugement du 11 juin 1998 du tribunal administratif de Paris qui a rejeté la demande de la société Nesstim tendant à l'annulation de l'arrêté du 8 novembre 1994 par lequel le maire de Paris a retiré le permis de construire modificatif tacite qui avait été octroyé à ladite société le 16 septembre 1994 ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Sophie-Caroline de Margerie, Conseiller d'Etat,

- les observations de Me Foussard, avocat de la VILLE DE PARIS et de la SCP Boullez, avocat de la société Nesstim,

- les conclusions de Mme Isabelle de Silva, Commissaire du gouvernement ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête ;

Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article R. 421-1 du code de l'urbanisme : « La demande de permis de construire est présentée soit par le propriétaire du terrain ou son mandataire, soit par une personne justifiant d'un titre l'habilitant à construire sur le terrain... La demande précise l'identité du demandeur..., la situation et la superficie du terrain... l'identité du propriétaire au cas où celui-ci n'est pas l'auteur de la demande... » et d'autre part, qu'il résulte des dispositions du b) de l'article 25 de la loi du 10 juillet 1965, auxquelles l'article 43 de la même loi interdit aux règlements de copropriété de déroger, que les « travaux affectant les parties communes ou l'aspect extérieur de l'immeuble » sont soumis à autorisation de l'assemblée générale des copropriétaires ;

Considérant qu'il découle des dispositions précitées du code de l'urbanisme et de la loi du 10 juillet 1965 que, lorsque l'autorité administrative, en l'état du dossier qui lui est soumis, est informée de ce que le projet de travaux du déclarant porte sur un immeuble compris dans une copropriété, il lui appartient d'exiger la production des autorisations auxquelles la loi, complétée le cas échéant par les stipulations du règlement de copropriété, subordonne le droit, pour chacun des propriétaires, de réaliser certains travaux ; qu'il lui appartient, en particulier, de vérifier si les travaux faisant l'objet de la déclaration affectent les parties communes ou l'aspect extérieur d'un immeuble compris dans la copropriété et nécessitent ainsi l'assentiment de l'assemblée générale des copropriétaires ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que les travaux faisant l'objet de la demande de permis de construire présentée par la société Nesstim consistaient à transformer des locaux techniques en salle de petit-déjeuner, à supprimer un escalier extérieur et à aménager le jardin intérieur d'un bâtiment à usage d'hôtel situé dans un ensemble immobilier faisant partie, avec un autre bâtiment à usage d'habitation, d'une copropriété ; que ces travaux modifiaient l'aspect extérieur de l'immeuble ; que dès lors, et quelle que soit la portée du règlement de copropriété, dont il résulte des termes mêmes de l'article 43 de la loi du 10 juillet 1965 que les stipulations ne peuvent écarter l'application du b) de l'article 25 de cette loi, en se fondant, pour estimer que les travaux n'avaient pas à être autorisés par l'assemblée générale des copropriétaires malgré les modifications apportées à l'aspect extérieur de l'immeuble, sur la circonstance que ceux-ci portaient sur le seul bâtiment dont la société Nesstim « a l'usage exclusif », la cour administrative d'appel de Paris a entaché sa décision d'erreur de droit ; que la VILLE DE PARIS est fondée à demander pour ce motif l'annulation de l'arrêt du 13 décembre 2002 de la cour administrative d'appel de Paris ;

Considérant qu'il y a lieu, en application de l'article L. 821-1 du code de justice administrative, de régler l'affaire au fond ;

Considérant que le maire de Paris pouvait, dans le délai de recours contentieux, procéder, par l'arrêté attaqué du 8 novembre 1994, au retrait pour illégalité du permis de construire tacitement acquis le 16 septembre 1994 ;

Considérant que, pour refuser la demande d'autorisation de travaux demandée par la société Nesstim, le maire de Paris s'est à la fois fondé sur l'absence de consultation de la commission de sécurité en application de l'article R. 421-53 du code de l'urbanisme et sur l'absence d'autorisation de l'assemblée des copropriétaires ; que si le premier motif est erroné en fait, il résulte de ce qui précède que le maire de Paris pouvait se fonder légalement sur le second pour refuser ladite autorisation ; qu'il aurait pris la même décision s'il ne s'était fondé que sur ce motif ;

Considérant qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, les travaux réalisés par la société Nesstim, de nature à affecter l'aspect extérieur de l'immeuble, ne pouvaient, faute d'avoir été, en application des dispositions précitées, autorisés par l'assemblée générale des copropriétaires, faire légalement l'objet d'un permis de construire ; qu'en estimant, après avoir écarté comme inopérants les autres moyens de la demande, que le maire de Paris a pu légalement, en l'état d'un dossier ne comportant pas l'autorisation requise de l'assemblée générale des copropriétaires, rejeter la demande de permis de construire présentée par la société Nesstim, au motif que celle-ci n'était pas habilitée, au sens des dispositions précitées de l'article R. 422-3 du code de l'urbanisme, à demander un permis de construire sur la parcelle sise 8 avenue de la soeur Rosalie à Paris 13ème, le tribunal administratif ne s'est pas mépris sur la portée de ces dispositions ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société Nesstim n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du maire de Paris en date du 8 novembre 1994 ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de la société Nesstim la somme de 2 500 euros que demande la VILLE DE PARIS au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Paris en date du 13 décembre 2002 est annulé.

Article 2 : Les conclusions de la requête présentée par la société Nesstim devant la cour administrative d'appel de Paris sont rejetées.

Article 3 : La société Nesstim versera à la VILLE DE PARIS la somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à la VILLE DE PARIS, à la société Nesstim et au ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

26-04 DROITS CIVILS ET INDIVIDUELS. DROIT DE PROPRIÉTÉ. - DROITS DES COPROPRIÉTAIRES - POSSIBILITÉ POUR LE RÈGLEMENT DE COPROPRIÉTÉ DE DÉROGER À L'ARTICLE 25 B) DE LA LOI DU 10 JUILLET 1965 - ABSENCE [RJ1].

26-04 Il résulte des termes mêmes de l'article 43 de la loi du 10 juillet 1965 que les stipulations du règlement de copropriété ne peuvent écarter l'application du b) de l'article 25 de la loi, aux termes duquel tous les travaux affectant les parties communes ou l'aspect extérieur de l'immeuble doivent être soumis à l'autorisation de l'assemblée générale des copropriétaires.


Références :

[RJ1]

Cf. 23 juin 1995, Syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis 76, rue Vieille-du-Temple à Paris, T. p. 1093.


Publications
Proposition de citation: CE, 07 déc. 2005, n° 254576
Mentionné aux tables du recueil Lebon
RTFTélécharger au format RTF
Composition du Tribunal
Président : M. Stirn
Rapporteur ?: Mme Sophie-Caroline de Margerie
Rapporteur public ?: Mme de Silva
Avocat(s) : FOUSSARD ; SCP BOULLEZ

Origine de la décision
Formation : 2ème et 7ème sous-sections réunies
Date de la décision : 07/12/2005
Date de l'import : 05/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 254576
Numéro NOR : CETATEXT000008258479 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2005-12-07;254576 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award