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28/12/2005 | FRANCE | N°269986

France | France, Conseil d'État, 2ème sous-section jugeant seule, 28 décembre 2005, 269986


Vu la requête, enregistrée le 16 juillet 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE LA GIRONDE ; le PREFET DE LA GIRONDE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 2 juillet 2004 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Bordeaux a annulé son arrêté du 23 juin 2004 ordonnant la reconduite à la frontière de M. Alexandre X à destination de l'Ouzbekistan ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. X devant le tribunal administratif de Bordeaux ;

Vu les autres pièces d

u dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des l...

Vu la requête, enregistrée le 16 juillet 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE LA GIRONDE ; le PREFET DE LA GIRONDE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 2 juillet 2004 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Bordeaux a annulé son arrêté du 23 juin 2004 ordonnant la reconduite à la frontière de M. Alexandre X à destination de l'Ouzbekistan ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. X devant le tribunal administratif de Bordeaux ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, signée le 4 novembre 1950 ;

Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945, modifiée ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Suzanne von Coester, Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Vier, Barthélemy, Matuchansky, avocat de M. X,

- les conclusions de Mme Isabelle de Silva, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, en vigueur à la date de l'arrêté litigieux : « Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police, peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (...) 3° Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait (...) » ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X, ressortissant d'Ouzbekistan, s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après la notification de la décision du PREFET DE LA GIRONDE, en date du 9 avril 2004, lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire national ; que l'intéressé était ainsi dans le cas visé au 3° du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, où le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X est entré en France en juillet 2001, à l'âge de 15 ans, avec sa mère, son frère et sa soeur, nés respectivement en 1987 et 1991, et y a sollicité le statut de réfugié ainsi que l'asile territorial, demandes qui ont été rejetées ; que, si l'intéressé fait valoir qu'il suit avec succès des études d'apprentissage dans le prêt à porter, cette circonstance n'est pas de nature à établir qu'il ne puisse poursuivre ses études dans son pays d'origine, où vivent ses deux grand-parents ; que M. X, majeur, est célibataire et sans enfant ; que sa mère, avec laquelle il réside, fait également l'objet d'une mesure de reconduite à la frontière dont, par une décision de ce jour, le Conseil d'Etat a confirmé la légalité ; que, dès lors, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce et eu égard aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière, l'arrêté du PREFET DE LA GIRONDE du 23 juin 2004 n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; que, par suite, le PREFET DE LA GIRONDE est fondé à soutenir que c'est à tort que, pour prononcer l'annulation de son arrêté du 23 juin 2004 ordonnant la reconduite à la frontière de M. X à destination de l'Ouzbekistan, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Bordeaux, s'est fondé sur ce motif ;

Considérant, toutefois, qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. X devant le tribunal administratif de Bordeaux et devant le Conseil d'Etat ;

Considérant que l'arrêté attaqué énonce les considérations de droit et de fait sur lesquelles il se fonde ; qu'il est , par suite, suffisamment motivé ;

Considérant que, si M. X soutient que sa mère et lui-même feraient l'objet, en Ouzbekistan, de menaces contre leur vie ou leur liberté et qu'il risque d'y subir des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, les justificatifs qu'il produit ne sont pas suffisants à cet égard ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DE LA GIRONDE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Bordeaux a annulé son arrêté en date du 23 juin 2004 ordonnant la reconduite à la frontière de M. X à destination de l'Ouzbekistan ;

Sur les conclusions présentées au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. X demande pour son avocat au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

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Article 1er : Le jugement du 2 juillet 2004 du magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Bordeaux est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. X devant le tribunal administratif de Bordeaux est rejetée, ainsi que ses conclusions présentées devant le Conseil d'Etat au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DE LA GIRONDE, à M. Alexandre X et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.


Synthèse
Formation : 2ème sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 269986
Date de la décision : 28/12/2005
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 28 déc. 2005, n° 269986
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Honorat
Rapporteur ?: Mme Suzanne von Coester
Rapporteur public ?: Mme de Silva
Avocat(s) : SCP VIER, BARTHELEMY, MATUCHANSKY

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2005:269986.20051228
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