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20/01/2006 | FRANCE | N°273651

France | France, Conseil d'État, 6eme sous-section jugeant seule, 20 janvier 2006, 273651


Vu la requête, enregistrée le 28 octobre 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DU VAL-D'OISE ; le PRÉFET DU VAL-D'OISE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 5 octobre 2004 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé son arrêté du 30 juillet 2004 décidant la reconduite à la frontière de Mme X... A et fixant la Guinée comme pays de destination ;

2°) de rejeter la demande présentée par Mme A devant le tribunal administratif de Cergy-Pontoise ;


Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des d...

Vu la requête, enregistrée le 28 octobre 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DU VAL-D'OISE ; le PRÉFET DU VAL-D'OISE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 5 octobre 2004 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé son arrêté du 30 juillet 2004 décidant la reconduite à la frontière de Mme X... A et fixant la Guinée comme pays de destination ;

2°) de rejeter la demande présentée par Mme A devant le tribunal administratif de Cergy-Pontoise ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention relative aux droits de l'enfant signée à New-York le 26 janvier 1990 ;

Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mlle Maud Vialettes, Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Delaporte, Briard, Trichet, avocat de Mme A,

- les conclusions de M. Mattias Guyomar, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 en vigueur à la date de l'arrêté attaqué : Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (...) 3° Si l'étranger, auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait (...) ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme A, de nationalité guinéenne, s'est maintenue sur le territoire français plus d'un mois à compter de la notification, le 10 mai 2004, de l'arrêté du 6 mai 2004 par lequel le PREFET DU VAL-D'OISE lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour ; qu'elle se trouvait ainsi dans le cas où, en application du 3° du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, le préfet de police peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;

Considérant qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant du 26 janvier 1990, publiée par décret du 8 octobre 1990 : “Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale” ; qu'il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ; qu'il ne ressort toutefois pas des pièces du dossier que l'arrêté ordonnant la reconduite à la frontière de Mme A, qui a deux enfants, dont l'un est scolarisé en France, ait, dans les circonstances de l'espèce, méconnu ces stipulations ; que, par suite, le PREFET DU VAL-D'OISE est fondé à soutenir que c'est à tort que le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Cergy-Pontoise s'est fondé sur ce motif pour annuler l'arrêté ordonnant la reconduite à la frontière de Mme A ;

Considérant qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel d'examiner l'autre moyen soulevé par Mme A tant devant le tribunal administratif de Cergy-Pontoise que devant le Conseil d'Etat ;

Considérant que si Mme A qui est née en 1971, fait valoir qu'elle est entrée en France en 1997, qu'elle est mère d'un premier enfant né en France en 1998 et scolarisé, qu'elle est mariée depuis 2004 à un ressortissant malien, qu'un enfant est né de cette union en 2004 sur le territoire français, il ne ressort pas des pièces du dossier, en l'absence de toute circonstance mettant l'intéressée, qui n'établit pas ne plus avoir d'attaches familiales en Guinée, dans l'impossibilité d'emmener avec elle ses enfants, ou de circonstances mettant son époux, lui-même de nationalité étrangère ne disposant pas de titre de séjour et dont la communauté de vie avec Mme A n'est pas démontrée, dans l'impossibilité de la rejoindre s'il le souhaite, que l'arrêté du 30 juillet 2004 par lequel le PREFET DU VAL D'OISE a décidé sa reconduite à la frontière ait porté à son droit au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; qu'il n'a donc pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DU VAL D'OISE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé son arrêté de reconduite à la frontière ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demande la SCP Delaporte, Briard et Trichet, avocat de Mme A, au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le jugement en date du 5 octobre 2004 du magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Cergy-Pontoise est annulé.

Article 2 : La demande présentée par Mme A devant le tribunal administratif de Cergy-Pontoise ainsi que ses conclusions devant le Conseil d'Etat sont rejetées.

Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DU VAL-D'OISE, à Mme X... A et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.


Synthèse
Formation : 6eme sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 273651
Date de la décision : 20/01/2006
Sens de l'arrêt : Satisfaction totale
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 20 jan. 2006, n° 273651
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Bonichot
Rapporteur ?: Mlle Maud Vialettes
Rapporteur public ?: M. Guyomar
Avocat(s) : SCP DELAPORTE, BRIARD, TRICHET

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2006:273651.20060120
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