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25/01/2006 | FRANCE | N°272331

France | France, Conseil d'État, 3eme et 8eme sous-sections reunies, 25 janvier 2006, 272331


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 17 septembre et 29 décembre 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Michel X, demeurant ... ; M. X demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 6 juillet 2004 du tribunal administratif de Marseille en tant qu'il a rejeté ses demandes tendant, d'une part, à l'annulation pour excès de pouvoir de la décision du 11 juillet 2002 du directeur du service départemental d'incendie et de secours des Bouches-du-Rhône et de la décision du même jour du préfet des Bouches

-du-Rhône et du président du conseil d'administration du service départ...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 17 septembre et 29 décembre 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Michel X, demeurant ... ; M. X demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 6 juillet 2004 du tribunal administratif de Marseille en tant qu'il a rejeté ses demandes tendant, d'une part, à l'annulation pour excès de pouvoir de la décision du 11 juillet 2002 du directeur du service départemental d'incendie et de secours des Bouches-du-Rhône et de la décision du même jour du préfet des Bouches-du-Rhône et du président du conseil d'administration du service départemental d'incendie et de secours affectant le requérant, en qualité de lieutenant de sapeurs-pompiers volontaire, au groupement Est des Bouches-du-Rhône à compter du 5 juillet 2002 et, d'autre part, à ce qu'il soit enjoint au directeur du service départemental d'incendie et de secours de le réintégrer dans ses précédentes fonctions au centre de secours de Meyrargues ;

2°) de mettre à la charge du service départemental d'incendie et de secours des Bouches-du-Rhône une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

Vu la loi n° 96-370 du 3 mai 1996 ;

Vu le décret n° 99-1039 du 12 décembre 1999 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Edouard Crépey, Auditeur,

- les observations de la SCP Choucroy, Gadiou, Chevallier, avocat de M. X et de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat du service départemental d'incendie et de secours des Bouches-du-Rhône,

- les conclusions de M. François Séners, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que, par un arrêté du 11 juillet 2002 du préfet des Bouches-du-Rhône et du président du conseil d'administration du service départemental d'incendie et de secours des Bouches-du-Rhône, M. Michel X, lieutenant de sapeurs-pompiers volontaire qui occupait les fonctions d'adjoint au chef du centre de secours de Meyrargues, a été affecté au groupement Est des Bouches-du-Rhône à compter du 5 juillet 2002 ; que, par un jugement du 6 juillet 2004, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Marseille a, notamment, rejeté les demandes présentées par celui-ci tendant, d'une part, à l'annulation de cet arrêté et d'une lettre adressée le même jour par le directeur du service départemental d'incendie et de secours et, d'autre part, à ce qu'il soit enjoint à ce directeur de le réintégrer dans ses précédentes fonctions au centre de secours de Meyrargues ; que M. X se pourvoit, dans cette mesure, contre ce jugement ;

Considérant qu'en estimant que la lettre du 11 juillet 2002 du directeur du service départemental d'incendie et de secours des Bouches-du-Rhône avait seulement pour objet d'informer l'intéressé du changement d'affectation décidé par l'arrêté de la même date du préfet des Bouches-du-Rhône et du président du conseil d'administration de cet établissement et que, par suite, cette lettre ne lui faisait pas grief, le tribunal administratif a, sans dénaturer les pièces du dossier, exactement qualifié les faits ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond, et notamment de la deuxième partie du rapport de commandement du 1er juin 2002 relatif au fonctionnement du centre de Meyrargues, que le changement d'affectation dont a été l'objet M. X est intervenu à raison de faits qui lui étaient reprochés dans l'exercice de ses fonctions, et liés, notamment, à la signature irrégulière de notes de service à la place du chef de centre, à la méconnaissance répétée de ses obligations hiérarchiques ainsi qu'à l'utilisation abusive de véhicules de service ; qu'il a en outre eu pour effet de le priver de ses missions opérationnelles et de sa qualité d'adjoint au chef du centre de secours de Meyrargues ; que, par suite, et alors même qu'elle aurait été également prise dans l'intérêt du service, la décision litigieuse n'en a pas moins revêtu un caractère disciplinaire à l'égard de cet agent ; qu'ainsi, en jugeant que la décision du 11 juillet 2002 n'avait pas été prise dans un but disciplinaire, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Marseille a commis une erreur de qualification juridique ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X est fondé à demander l'annulation du jugement attaqué en tant seulement qu'il rejette ses conclusions dirigées contre la décision du préfet des Bouches-du-Rhône et du président du service départemental d'incendie et de secours en date du 11 juillet 2002 et celles tendant à ce qu'il soit réintégré dans ses précédentes fonctions et en tant qu'il statue sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, de régler, dans cette mesure, l'affaire au fond ;

Considérant qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, le changement d'affectation dont a été l'objet M. X présente un caractère disciplinaire ; qu'il ressort des pièces du dossier que cette mesure est intervenue sans avoir été précédée d'une procédure disciplinaire dans les conditions prévues par les dispositions de la sous ;section 4 de la section 2 du décret du 12 décembre 1999 susvisé ; que, par suite, M. X est fondé à demander l'annulation de l'arrêté contesté du 11 juillet 2002 ;

Considérant que cette annulation, qui concerne un changement d'affectation prononcé pour raisons disciplinaires, implique nécessairement la réintégration de M. X dans les fonctions dont il a été illégalement privé ; que, par suite, il y a lieu d'enjoindre au service départemental d'incendie et de secours d'y procéder ;

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. X, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que le service départemental d'incendie et de secours des Bouches-du-Rhône demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge du service départemental d'incendie et de secours des Bouches-du-Rhône le paiement d'une somme de 3 000 euros au titre des frais dont M. X demande le remboursement sur le même fondement ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le jugement du 6 juillet 2004 du magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Marseille en tant qu'il a rejeté les conclusions de M. X tendant, d'une part, à l'annulation de l'arrêté du 11 juillet 2002 du préfet des Bouches-du-Rhône et du président du conseil d'administration du service départemental d'incendie et de secours et, d'autre part, à ce qu'il soit enjoint à celui-ci de réintégrer l'intéressé dans ses précédentes fonctions et en tant qu'il a statué sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ensemble ledit arrêté, sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au service départemental d'incendie et de secours des Bouches-du-Rhône de procéder à la réintégration de M. X dans les fonctions qu'il occupait au centre de secours de Meyrargues.

Article 3 : Le service départemental d'incendie et de secours des Bouches-du-Rhône versera une somme de 3 000 euros à M. X au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de M. X ainsi que les conclusions du service départemental d'incendie et de secours des Bouches-du-Rhône tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetés.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. Michel X, au service départemental d'incendie et de secours des Bouches-du-Rhône et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 25 jan. 2006, n° 272331
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : M. Martin
Rapporteur ?: M. Edouard Crépey
Rapporteur public ?: M. Séners
Avocat(s) : SCP CHOUCROY, GADIOU, CHEVALLIER ; SCP LYON-CAEN, FABIANI, THIRIEZ

Origine de la décision
Formation : 3eme et 8eme sous-sections reunies
Date de la décision : 25/01/2006
Date de l'import : 04/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 272331
Numéro NOR : CETATEXT000008237933 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2006-01-25;272331 ?
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