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08/02/2006 | FRANCE | N°269500

France | France, Conseil d'État, 7eme sous-section jugeant seule, 08 février 2006, 269500


Vu la requête, enregistrée le 6 juillet 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DU VAL-DE-MARNE ; le PREFET DU VAL-DE-MARNE demande au Conseil d'Etat d'annuler le jugement du 14 avril 2004 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Melun a annulé son arrêté du 19 mars 2004 décidant la reconduite à la frontière de M. Marcel X ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'ordonnance n° 45-2658

du 2 novembre 1945 modifiée relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrang...

Vu la requête, enregistrée le 6 juillet 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DU VAL-DE-MARNE ; le PREFET DU VAL-DE-MARNE demande au Conseil d'Etat d'annuler le jugement du 14 avril 2004 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Melun a annulé son arrêté du 19 mars 2004 décidant la reconduite à la frontière de M. Marcel X ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Francis Girault, Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat de M. X,

- les conclusions de M. Nicolas Boulouis, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 en vigueur à la date de l'arrêté attaqué : Le représentant de l'Etat dans le département et à Paris, le préfet de police peuvent par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (…) 3° Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait (…) ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X, ressortissant capverdien, s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 10 septembre 2003, du refus de titre de séjour opposé le 3 septembre 2003 par le PREFET DU VAL-DE-MARNE ; qu'il se trouvait ainsi dans le cas où, en application du 3° du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;

Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (…) Il ne peut y avoir d'ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure … nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales ;

Considérant que si les sept frères et soeurs de M. X ont la nationalité française, si ce dernier est hébergé par l'un d'eux depuis son arrivée en France en mai 2000 et s'il dispose d'un travail dont il déclare les revenus aux services fiscaux, il ressort des pièces du dossier que M. X est arrivé en France à l'âge de trente-quatre ans et qu'il a laissé au Sénégal, où il demeurait, son épouse et son enfant ; que, dans ces circonstances et eu égard aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière, l'arrêté litigieux n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; que par suite, c'est à tort que le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Melun s'est fondé sur la violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales pour annuler l'arrêté du PREFET DU VAL-DE-MARNE ordonnant la reconduite à la frontière de M. X ;

Considérant qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. X en première instance et en appel ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que l'arrêté attaqué ordonnant la reconduite à la frontière de M. X comporte les éléments de fait et de droit sur lesquels il se fonde ; qu'ainsi, le moyen tiré de son insuffisante motivation manque en fait ;

Considérant que si M. X fait valoir que le centre de sa vie familiale et professionnelle se trouve en France, cette circonstance, compte-tenu de ce qui précède, n'est pas de nature à faire regarder l'arrêté attaqué comme entaché d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DU VAL-DE-MARNE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Melun a annulé son arrêté en date du 19 mars 2004 décidant la reconduite à la frontière de M. X ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat de M. X, demande en application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, pour les frais que le requérant aurait exposés s'il n'avait pas bénéficié de l'aide juridictionnelle ;

D E C I D E :

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Article 1er : Le jugement en date du 14 avril 2004 du magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Melun est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. X devant le tribunal administratif de Melun et le surplus de ses conclusions sont rejetés.

Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DU VAL-DE-MARNE, à M. Marcel X et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.


Synthèse
Formation : 7eme sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 269500
Date de la décision : 08/02/2006
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 08 fév. 2006, n° 269500
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Delarue
Rapporteur ?: M. Francis Girault
Rapporteur public ?: M. Boulouis
Avocat(s) : SCP BORE ET SALVE DE BRUNETON

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2006:269500.20060208
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